Zakaria Boualem réagit au tirage au sort de la Coupe du monde

Par Réda Allali

Cette semaine, les amis, nous allons parler de football. Vous pouvez grogner si vous voulez, geindre à souhait, vous plaindre tant que vous voulez de cette terrible obsession qui hante notre héros, le résultat est le même : Zakaria Boualem, en parfait accord avec le doustour de cette page qu’il a écrite tout seul, et sans le moindre souci de ménager les apparences en invoquant une vague transition démocratique, va vous parler de foot cette semaine. Vous le savez sans doute, le Guercifi passe beaucoup de temps à regarder des matchs, et encore plus de temps à les commenter. Quand il ne parle pas de ballon, il s’y réfère pour mieux se faire comprendre, c’est terrible ! C’est que nous parlons d’un sport fascinant, qui autorise tous les discours. Il est possible de tenir à peu près n’importe quel propos sans passer pour un débile, c’est un avantage considérable. Nous parlons ici d’un jeu à score bas, c’est-à-dire que l’affaire se règle le plus souvent sur un ou deux buts.

Au basket, on peut admettre qu’une équipe qui marque 100 points est supérieure à celle qui en marque 80, pareil au tennis. Au football, c’est différent. Un défenseur qui s’oublie une petite seconde, un ballon qui rebondit mal, un arbitre mal luné, et le score peut changer. On passe de la gloire aux ténèbres, de l’euphorie à la déprime sur la base d’un de ces micro-évènements où le hasard tient une place considérable. Ensuite, on analyse, on parle, on écrit à l’infini, on remplit les cafés, les réseaux sociaux et les plateaux de glorieuses affirmations. On cherche à rationnaliser la victoire, la défaite, mais on sait qu’il existe une bonne partie de matchs qui, s’ils étaient rejoués avec les mêmes équipes, donneraient des scores différents.

Le foot produit une quantité extraordinaire de produits dérivés culturels (débats, livres, articles…) parce qu’il ressemble à la vie, tout simplement. On peut vaincre avec félonie, on peut aussi s’incliner avec honneur, ou se couvrir de ridicule devant le monde entier, gagner par hasard ou perdre logiquement, tout est possible. Revenons à Zakaria Boualem. Quand il a vu le tirage au sort (l’Espagne, le Portugal et l’Iran si vous habitez sous l’eau), il a commencé par gémir sur son sort, en maudissant son infortune sur fond de raï des années 1990. Vous imaginez le tableau. Puis, au bout de quelques jours, il a changé d’attitude, il a relevé la tête, il s’est mis à voir les choses différemment, il est sorti des épaisses té- nèbres dans lesquelles l’avait précipité la main fourbe de la FIFA. C’est ainsi : le cerveau humain sécrète de l’espoir, un peu comme notre administration sécrète des problèmes ou le Matin du Sahara les bonnes nouvelles, c’est un réflexe lié à sa nature profonde. Depuis, il est en roue libre, le bougre. Au rythme où il va, il va bientôt vous expliquer que nous allons nous qualifier sans problème, que ce sera presque trop facile, et qu’il aurait bien remplacé l’Iran par le Brésil pour corser cette affaire. C’est la magie du foot, encore une fois, on peut voir les choses comme on veut, on n’a jamais vraiment raison ni entièrement tort. Voici un exemple. Phrase 1 : c’est une malédiction, nous allons affronter le Portugal, mené par un joueur surnaturel et champion d’Europe. Phrase 2 : quel champion d’Europe ? Ils ont eu trois points au premier tour, ils étaient troisièmes et ils auraient dû être éliminés dès les poules si on avait eu le même règlement qu’à la Coupe du Monde. Vous voyez bien le potentiel d’une discussion qui dé- marre sur de telles bases, on peut fabriquer très vite une boucle infinie. On a déjà le plus grand mal à comprendre ce qui s’est passé lors d’un match joué la veille, vous imaginez donc l’audace qu’il faut pour imaginer ce qui va se passer dans six mois. C’est pourtant ce que nous allons faire, sans hésiter, jusqu’à la Coupe du Monde, et merci