Le parquet de Paris a ouvert, ce mardi 20 juillet, une enquête sur l’espionnage d’une trentaine de journalistes et directeurs de médias français dont l’infiltration de téléphones par le logiciel Pegasus pour le compte de l’Etat marocain, qui le conteste, a été révélée dimanche par un consortium de médias, a-t-il annoncé dans un communiqué.
Cette enquête a été ouverte pour une longue liste de dix infractions dont “atteinte à la vie privée”, “interception de correspondance”, “accès frauduleux” à un système informatique et “association de malfaiteurs”. Elle fait suite à la plainte déposée par le site Mediapart, dont deux journalistes ont été espionnés, à laquelle doit s’ajouter une plainte similaire du Canard enchaîné.
“Espionnés par les services secrets marocains”
L’enquête vise également d’autres infractions d’atteintes à un système informatique, telles que l’introduction, l’extraction et la transmission frauduleuses de données, qui peuvent être potentiellement reprochées aux utilisateurs de Pegasus.
Elle concerne aussi la “mise à disposition et détention d’un équipement” permettant des atteintes à un système de données et “l’offre et la vente sans autorisation d’un dispositif de captation de données”, qui visent cette fois potentiellement la commercialisation du logiciel et les intermédiaires impliqués.
Plusieurs médias dont Le Monde, le Guardian et le Washington Post ont révélé dimanche que le fondateur de Mediapart Ewdy Plenel et la journaliste de son média Lénaïg Bredoux avaient été espionnés par les services secrets marocains.
Le Canard enchaîné, lui, aurait été visé notamment à travers son ancienne collaboratrice Dominique Simmonnot, aujourd’hui contrôleure générale des lieux de privation de liberté, qui a également annoncé qu’elle allait saisir personnellement la justice.
Les investigations ont été confiées à l’Office central de lutte contre la criminalité liée aux technologies de l’information et de la communication (OCLCTIC), a précisé le parquet.
Indignation du monde entier
Le gouvernement marocain a annoncé “rejeter et condamner catégoriquement” des accusations d’espionnages “dénuées de tout fondement”, dans un communiqué publié ce lundi 19 juillet. Il y précise n’avoir “jamais acquis de logiciels informatiques” pour infiltrer des appareils de communication.
Selon l’enquête publiée dimanche par un consortium de 17 médias internationaux, le logiciel Pegasus, élaboré par l’entreprise israélienne NSO Group, aurait permis d’espionner les numéros d’au moins 180 journalistes, 600 hommes et femmes politiques, 85 militants des droits humains ou encore 65 chefs d’entreprise de différents pays.
Le logiciel espion Pegasus, introduit dans un smartphone, permet d’en récupérer les messages, photos, contacts et même d’écouter les appels de son propriétaire.
Ces révélations ont suscité l’indignation dans le monde entier d’organisations de défense des droits humains, de médias et de dirigeants politiques, tels que la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen.
NSO, régulièrement accusé de faire le jeu de régimes autoritaires, assure que son logiciel sert uniquement à obtenir des renseignements contre des réseaux criminels ou terroristes.
Le travail mené par les 17 médias, dont les quotidiens français Le Monde, britannique The Guardian et américain The Washington Post, se fonde sur une liste obtenue par le réseau basé en France Forbidden Stories et l’ONG Amnesty International. Elle compte, selon eux, 50.000 numéros de téléphone sélectionnés par les clients de NSO depuis 2016 pour une surveillance potentielle.
(Avec AFP)