Smyet bak ?
Rahal.
Smyet mok ?
Aïcha.
Nimirou d’la carte ?
B84948.
Vous êtes amplement ministrable. On vous a déjà proposé un poste ?
La coutume veut qu’on ne réponde pas à cette question.
Comme beaucoup de communistes, y a-t-il une histoire de famille derrière votre engagement ?
Non. C’est plutôt dû à l’époque. J’ai rejoint un syndicat lycéen quand j’étais au lycée Al Khawarizmi. Puis tout s’est fait naturellement, j’ai pris ma carte au PLS (Parti de la libération et du socialisme, ancêtre du PPS, ndlr) clandestin, en 1974, qui allait tenir son premier congrès constitutif en 1975.
Vous avez voyagé dans des “pays frères” ?
Oui, en tant que militant et en tant qu’ingénieur. Je suis allé en Tchécoslovaquie, en URSS, en Pologne et, en 2004, je suis allé en Chine sur invitation du PCC (Parti communiste chinois) pour m’enquérir de la gestion agricole.
C’est de vos camarades chinois que vous vient cette idée de refiscaliser l’agriculture ?
40% de la population vit ici en milieu rural. 2000 exploitations seraient susceptibles de payer l’impôt agricole.
Ce ne seront pas les plus pauvres qui passeront à la caisse. Les gens qui sont exonérés depuis 20 ans doivent maintenant participer.
Les impôts sur la fortune, c’est votre dada. A votre avis, le roi devrait-il en payer ?
Le roi n’est pas un citoyen ordinaire certes, mais un citoyen. Lui-même a parlé, je crois, de monarchie citoyenne. Je crois que les gens disposant d’importantes fortunes doivent payer l’impôt. Quant à ses entreprises, c’est autre chose : les entreprises qui sont dans le giron royal payent les impôts, ce sont même celles qui sont les plus transparentes et les plus formelles.
On ne trouve pas un communiste dans le monde qui ne veuille imposer l’héritage. C’est faisable au Maroc ?
La réforme est un art difficile. L’important est de préparer les esprits : si on fait preuve de pédagogie, on y arrive. Et un tel impôt n’est en vérité pas anti-religieux.
Vous êtes le seul ould châab du parti, non ?
Le PPS est un parti de cadres. On appelle ça dans notre jargon le “militant organique” : il est dans l’élite mais reste préoccupé par le sort des plus humbles.
Miloud Lâaraj, pouvez-vous nous le présenter et nous dire pourquoi vous le citez ?
C’était un délinquant notoire de Hay Mohammadi, il organisait un racket et redistribuait aux plus pauvres. La délinquance fût elle généreuse est condamnable mais il reste une figure du patrimoine du quartier et des années 1960-70.
Parlez-nous de Hay Mohammadi…
J’y ai tout appris. J’y suis resté jusqu’à mes 18 ans. Je passais mes journées à Dar Chabab, la première du Maroc. C’est dans ce lieu que sont nés Masrah Nass, Nass El Ghiwane… C’est dommage que ces lieux soient en perdition. Il faudrait les reprendre en main, ce sont des outils primordiaux pour la jeunesse.
Votre fenêtre donne sur le Boultek. C’est une sorte de Dar Chabab, non ?
Oui, en quelque sorte. D’ailleurs, j’ai beaucoup de respect pour ces jeunes actifs. C’est une vraie renaissance de la culture.
Le Hay, vous avez des idées pour sa réhabilitation ?
Oui, bien sûr. Je ne veux pas regarder dans le rétro tout le temps, mais je crois qu’un endroit comme le centre de détention de Derb Moulay Chrif doit devenir un lieu de préservation de la mémoire, un musée par exemple. Je milite dans une association, Mountada Saâda, pour qu’on retape, sauvegarde et réactive le cinéma Saada, Dar Chabab…
Il paraît que vous êtes fâché avec le PPS ?
Oui, j’ai pris mes distances car je suis contre l’entrée dans un gouvernement PJD. Cela va à l’encontre de tout ce que le PPS a porté comme combats.
Les écarts de salaires dans les offices par lesquels vous êtes passé ne vous choquent pas ?
Notre pays gagnerait à avoir une classe moyenne plus large. Le resserrement entre les salaires les plus bas et les plus hauts est une solution.
Vous êtes pour un revenu minimum de solidarité ?
C’est impératif. Il faut mettre en place une redistribution visant à “l’empowerment”, pour assurer l’éducation et la santé de tous, même des plus démunis. 2 dirhams en plus sur le prix de l’essence financeraient cet acte de solidarité.
En parlant d’essence : vous avez été solidaire avec Benkirane quand il a été sous le feu des critiques à ce propos ?
Je ne l’ai pas applaudi, il a fait ce qui devait être fait. Je pense même qu’il aurait pu aller un peu plus loin quant aux augmentations de prix. Nous sommes 32 millions, il y a 1 million et demi de voitures en circulation, il est normal que les utilisateurs paient.
Vous êtes un des rares à ne pas craindre le mot “déficit”.
Le déficit, s’il permet de créer des richesses, ne pose pas de soucis. Il faut juste éviter qu’il ne pèse sur nos enfants.
Vous avez travaillé à la CGEM. Bizarre pour un homme de gauche…
Nous étions plusieurs responsables politiques à travailler sur un comité d’éthique en 1997 et nous avons fait sauter un tabou : parler de corruption au sein du patronat. Non, ce n’est pas bizarre.
Vous clamez que le Maroc doit se doter de centrales nucléaires, alors même qu’on sort de catastrophes écologiques majeures. Vous n’avez pas peur ?
Il faut savoir prendre des risques. Je veux des centrales nucléaires au Maroc pour dessaler l’eau de mer, pour l’agriculture qui absorbe 80% des besoins en eau du pays.
Vous étiez au CIH à l’époque des scandales aujourd’hui sous la loupe des juges et des médias…
Je n’ai aucun commentaire à apporter à des affaires en cours d’instruction par la justice.
Vous avez un pied dans l’économie et l’autre dans la politique. Vous confirmez l’assertion selon laquelle la première a maintenant le dessus sur la seconde ?
Non. L’économie, c’est de l’intendance. La primauté reste à la politique.
Vous êtes plus Keynes que Lénine finalement…
Aujourd’hui, notre pays traverse une phase économique délicate, qui requiert un pilotage très fin. On ne peut donc pas se contenter des classiques, des grandes lignes.
Jeune, vous étiez déjà aussi pragmatique ?
C’est ce qui m’a sauvé du dogmatisme. Un camarade nous a dit un jour : “Si à 20 ans, on n’est pas communiste, on n’a pas de cœur. Mais si à 50, on est toujours dogmatique, alors on n’a pas de tête.”
Antécédents
1956. Naissance à Hay Mohammadi
1974. Décroche son baccalauréat mathématique, intègre le PLS
1980. Diplômé en ingénierie dans l’aviation civile
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1981. Entre à la RAM
1988. Naissance de sa fille Myriam
2012. Prend ses distances avec le PPS
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