Salut à vous, infatigables bâtisseurs du Maroc moderne, c’est un Zakaria Boualem enjoué qui vous accueille cette semaine à l’extrémité de cet estimable magazine, et vous souhaite la bienvenue, plaisir des yeux mon frère la gazelle le gazou et celui qui n’achète pas il peut se détendre. La première nouvelle de la semaine est un peu triste les amis.
Figurez-vous qu’on note “un faible engouement pour la vaccination contre la grippe saisonnière”, c’est la presse sérieuse qui l’annonce. Zakaria Boualem fait partie, hélas, de ces gens qui n’ont pas un seul instant imaginé qu’ils devraient se faire vacciner contre la grippe saisonnière. Il va même vous expliquer pourquoi.
Cette semaine, les Marocains ne veulent pas se vacciner contre la grippe, un prévenu a mordu la main d’une avocate et avalé un chèque de 400 000 dirhams, et le projet de tunnel sous la détroit de Gibraltar refait parler de lui, “seulement” 45 ans après son lancement
Il est un grand traumatisé du Covid, voilà la vérité. Pas de la maladie qu’il a chopée trois fois, mais du traitement que nous lui avons appliqué. Tous ces barrages policiers, ces couvre-feux prolongés à l’infini, ces tests PCR tellement chers que même le gouvernement a eu pitié de nous, ces écoles fermées la veille de la rentrée, ces fêtes interdites, ces vaccins à exhiber avant de voyager, ces dépressions en cascade, ces gosses en échec scolaire, ces divorces, etc.
Il se demande s’il n’a pas été – un peu – pris pour un calamar, c’est juste une question. Mais à chaque fois qu’il la pose, on l’accuse de complotisme, d’être un crétin, un peu comme ces illuminés qui pensent que la terre est plate. Du coup, il se tait, mais vous disposez maintenant d’une piste d’explication pour le manque d’enthousiasme pour ce nouveau vaccin, et merci.
L’autre nouvelle qui a attiré l’attention du Boualem nous vient du Nord. On annonce qu’un prévenu a mordu la main d’une avocate puis avalé un chèque de 400.000 dirhams. Il faut prendre un instant pour imaginer la scène. Un malheureux accusé d’avoir émis un chèque sans provision, qui n’a pas de quoi l’honorer malgré la plainte. Quand ce petit papier ridicule qui va l’envoyer à l’ombre est agité sous ses yeux par une avocate, juste à quelques centimètres de son visage, le voilà qui trouve la solution à ses maux, en mordant l’avocate pour lui faire lâcher prise et ensuite avaler l’objet de son infortune, convaincu que cette initiative malheureuse permettra de faire disparaître le problème, par digestion.
L’article précise que cette scène surréaliste a eu lieu durant une procédure de réconciliation. Du coup, cela prend tout son sens, puisqu’on sait que chez nous, il n’y a pas de réconciliation possible sans un bon repas, et merci.
On peut rester dans la région et signaler qu’un géant allemand de la construction s’est rallié au projet de tunnel entre le Maroc et l’Espagne. C’est une grande nouvelle, nous progressons à grands pas, puisque ce projet date exactement de 1979, c’est prodigieux. Mais il serait injuste d’accuser nos responsables de lenteur (même si quelques théâtres semblent prendre eux aussi beaucoup de temps à ouvrir). Imaginez un peu qu’en 1869, l’ingénieur français Laurent de Villedemil s’était déjà, comme on dit, penché sur le sujet, sans jamais se relever le pauvre. Il est bien possible qu’on nous annonce que les Almohades, en 1199, avaient déjà réfléchi à cette affaire, mais, pour leur part, sous forme de catapulte géante.
Pour terminer, et toujours sur le thème du rythme, cette déclaration d’une responsable d’un des fleurons de notre système politique, le RNI, qui a tenu à expliquer qu’en matière de réforme de la Moudawana, “il ne fallait pas aller plus vite que la musique”. Elle a parfaitement raison, il faut ralentir encore un peu le processus, qui ne date après tout que de quelques années, la précipitation est un grand danger. C’est tout pour la semaine, et merci.