Le 6 septembre 2024, des pluies diluviennes s’abattent sur le sud-est du pays. Les crues qui en ont découlé ont provoqué la destruction de maisons, de routes et d’infrastructures. Au niveau humain, les derniers bilans font état de près d’une vingtaine de morts et plusieurs dizaines de blessés. Les secours et les forces de l’ordre se mobilisent de façon exceptionnelle. Mais un homme se distingue par son silence : le Chef du gouvernement.
Le 15 septembre, le poste-frontière de Bab Sebta est le théâtre d’une tentative de migration clandestine massive annoncée près de deux semaines à l’avance par différents profils sur les réseaux sociaux. Là aussi, la mobilisation des forces de l’ordre est massive. Les responsables du ministère de l’Intérieur, connaisseurs de la région, sont mobilisés pour tenter d’endiguer le flux de migrants clandestins ambitionnant d’atteindre Sebta à tout prix. Mais là encore, un homme se distingue par son absence : le Chef du gouvernement.
Ce même 15 septembre, Aziz Akhannouch était occupé à jouer au président du RNI dans son fief d’Agadir. Alors que la date de l’événement était connue d’avance, notre Chef du gouvernement a visiblement préféré entendre les basses rythmées par la musique d’ElGrande Toto plutôt qu’un brief sur l’assaut qui se déroulait en même temps. Dans cette ambiance de fête, le Chef du gouvernement n’a pas prononcé un mot en direction de ces milliers de Marocains qui ont tenté de fuir le pays plutôt que de subir sa politique. Non. Le président du RNI a surtout profité de sa tribune pour verser dans l’autosatisfecit et s’attaquer à ses critiques en les qualifiant d’“opposants et de clowns”.
Aziz Akhannouch a choisi d’ignorer ces drames parce qu’ils rappellent ses échecs à la tête de l’Exécutif. Des ratés évitables, mais non évités, car le Chef du gouvernement n’a pas pris au sérieux les signaux d’alarme qui lui ont été lancés. Alerté par le CESE sur les risques posés par les NEET, Aziz Akhannouch s’est offusqué en suggérant que le Conseil présidé par Ahmed Reda Chami cherchait à perturber “son” bilan de mi-mandat. Il s’était même permis d’affirmer que la problématique était “connue”, sans pour autant proposer de pistes de solutions. Quatre mois plus tard, les NEET constituaient l’essentiel de la cohorte de harragas tentant de rallier Sebta.
“L’emploi, la “priorité” du Chef du gouvernement a été sous-traitée aux consultants de McKinsey”
Et même lorsqu’il décide de s’impliquer, Aziz Akhannouch ne parvient pas à traduire sa volonté en action. Alerté tour à tour sur les chiffres de l’emploi par le HCP de Ahmed Lahlimi à la mi-février et par Abdellatif Jouahri en juillet, il jure à qui veut l’entendre que l’emploi sera la priorité de sa deuxième partie de mandat. Plus de sept mois plus tard, rien n’a été fait. Ou presque… La “priorité” du Chef du gouvernement a été sous-traitée aux consultants de McKinsey, qui devront donner forme à la vision royale pour l’emploi énoncée en octobre 2022.
Aziz Akhannouch et une grande partie de son gouvernement donnent l’impression d’être déconnectés des Marocains. À coup de publications LinkedIn, ces membres de l’Exécutif se gargarisent des rencontres avec les responsables d’entreprises aux quatre coins du monde. Sur le plan intérieur, la politique gouvernementale ne fait que conforter les marges indécentes récupérées par les grandes entreprises et intermédiaires tout en rendant la vie de plus en plus chère pour les Marocains. Certains produits de base ont vu leur prix plus que doubler, en l’espace de trois ans. Là encore, les quelques actions entreprises par l’Exécutif n’ont pas amélioré la situation de la grande majorité.
Nous sommes donc condamnés à subir un gouvernement offshore. Physiquement absente et déconnectée de la réalité du terrain, une grande partie de l’Exécutif ne fait simplement plus le travail. Le problème est de taille, car un pays ne peut pas être géré par une poignée de ministres et les forces de sécurité. Si l’inconscience se poursuit, c’est la stabilité du Maroc qui sera en jeu.