Vendredi dernier, la majorité gouvernementale a déposé au bureau de la Chambre des représentants une proposition de loi pour plafonner les salaires des hauts fonctionnaires des administrations, institutions et entreprises publiques et revoir les indemnités qu’ils perçoivent.
Une semaine après l’adoption de la première partie du projet de Loi de finance 2018, la coalition formée par le PJD, l’USFP, le MP, l’UC et le PPS (excepté le RNI qui ne figure pas parmi les signataires) entend, par cette proposition de loi, relancer le débat autour de la rationalisation des dépenses publiques.
C’est notamment suite à la publication, mardi 22 novembre, par la Cour des comptes d’un rapport révélant que la masse salariale du secteur public pèse très lourd sur le budget de l’État, passant de 75,4 à 120 milliards de dirhams (MMDH) entre 2008 et 2016, soit de 11,38% à 11,84% du PIB.
A en croire les dispositions de cette proposition de loi, dont TelQuel détient une copie, l’objectif serait de «réduire le poids de la masse salariale» via différents leviers. Le plus élémentaire d’entre eux, lit-on dans le texte, est celui du «plafonnement à 120.000 DH nets mensuels du salaire des hauts fonctionnaires dans un délai de 2 mois après la promulgation de la loi, sans attendre la publication des décrets relatifs à la loi organique 02.12 relative aux nominations des hauts postes de l’Etat».
La majorité à l’œuvre
«C’est en fait l’une de mes propositions lorsque j’étais président du groupe parlementaire du PJD durant la précédente législature. C’était en 2013, mais la procédure légale n’avait pas suivi son chemin», nous explique Abdallah Bouanou, député-maire PJD de Meknès.
L’actuel président de la Commission des finances à la première chambre justifie cette proposition par «l’écart aberrant entre les 3000 dirhams nets d’impôt comme SMIG dans la fonction publique et les 300.000 DH que peuvent percevoir certains dirigeants d’organismes ou entreprises de l’Etat».
Pour Amam Chokran, président du groupe USFP à la première chambre, cette proposition de loi validée par 5 des six formations de la coalition gouvernementale répond à une question d’ordre politique et non de gestion. «Le récent rapport de la Cour des compte corrobore notre analyse de la situation socio-économique du pays», enchérit le député socialiste.
A l’aune de la Loi de finances de cette année, le chef de file des députés du parti de la Rose estime que cette proposition de loi, une fois débattue et votée, aura un impact positif sur les comptes publics. «Dans ce cas de figure, l’Etat enregistrera des économies sur certains postes budgétaires essentiels», estime-t-il.
Une opposition sceptique
« Tant que le texte ne figure pas dans le programme de travail de la commission des finances, le débat autour de cette question restera secondaire», affirme Allal Amraoui, député de l’Istiqlal. Rappelant que son parti s’est abstenu du vote du projet de Loi de finance 2018, l’élu de Fès explique que les propositions de loi ne sont soumises au débat qu’en cas d’aboutissement de la procédure légale.
«Certaines propositions de lois ne sont portées que dans le but d’affirmer les principes politique d’un parti», nuance-t-il. L’istiqlalien voit davantage dans cette proposition un «effet d’annonce» qu’une issue concrète à même d’assainir les comptes publics.
Le député du PAM Abdelatif Ouahbi insiste quant à lui sur les répercussions immédiates que pourrait avoir cette mesure. «Si une telle loi voit le jour, nous nous retrouverons dans une situation où de hauts cadres compétents déserteront pour rejoindre le secteur privé, naturellement plus attractif en termes de rémunération», prévient-t-il.
L’élu de Taroudant estime qu’il s’agit d’un «faux débat» puisque la nomination des hauts fonctionnaires se fait sur contrat avec des objectifs à atteindre.
«Le plafonnement de ces salaires influera sur le rendement d’organismes étatiques si l’on se retrouve à désigner des cadres de niveau inférieur», conclut Abdellatif Ouahbi.
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