Le 29e sommet de l’Union africaine s’est clôturé avec une demi-journée d’avance le 4 juillet à Addis-Abeba. Le ministre des Affaires étrangères, Nasser Bourita, en a profité pour tenir une conférence de presse au cours de laquelle il a dressé le bilan de l’action et des résultats de la diplomatie marocaine au cours de ce premier sommet de l’organisation panafricaine auquel le royaume participe en tant que membre à part entière.
Il explique que le but était double. D’une part, « contribuer aux efforts pour l’action de l’organisation« , et d’autre part « présenter le point de vue du Maroc sur les sujets qui l’intéressent, et notamment la question du Sahara, pour amener l’organisation à des positions plus équilibrées et qui tiennent compte de l’évolution du dossier. »
Réformes institutionnelles, jeunesse, migration…
La contribution du Maroc à l’UA a notamment été marquée par le discours de Mohammed VI, lu le 3 juillet par Moulay Rachid, et qui couvre selon le ministre trois aspects. Premièrement, la réforme de l’Union africaine. La « vision » de Mohammed VI sur la question est « fondée sur l’ambition pour cette organisation qui doit être au diapason des aspirations des États et des peuples africains » et « pragmatique« .
« Le problème de cette organisation c’est certes l’autonomie financière, mais également des méthodes de travail, une efficacité dans l’action et une crédibilité dans les prises de décisions qui doivent être suivies d’actes« , détaille Bourita. Le ministre annonce que le Maroc a remis un « papier » à ce sujet au Rwanda, dont le président Paul Kagame est chargé de mener des réformes institutionnelles pour l’Union africaine.
De son côté Mohammed VI avait été chargé par ses pairs africains de rédiger un rapport sur la migration en Afrique. Moulay Rachid a remis en main propre la note préliminaire de ce rapport au président en exercice de l’UA, le Guinéen Alpha Condé. « Pour nous, c’est un sujet important parce qu’il est non seulement devenu structurant des relations internationales dans le monde, mais c’est un sujet qui se pose dans les rapports entre l’Afrique et ses partenaires partout dans le monde« , déclare Nasser Bourita.
Il résume les constats de Mohammed VI en trois points : « Premièrement, il y a des concepts qui doivent évoluer. La migration africaine est d’abord intra-africaine, elle est marginalement en dehors de l’Afrique. Deuxièmement, la notion de pays d’origine, de transit, d’arrivée est dépassée puisque tous les pays sont les trois à la fois. Troisièmement, pour que l’Afrique soit forte dans son interaction avec ses partenaires, elle doit d’abord mettre en place sa propre vision« .
Cette même vision se décline aux niveaux nationaux, sous-régionaux, régionaux pour être continentale. « Chaque pays africain doit d’abord faire ses devoirs en termes d’accueil et d’intégration des migrants. Mais si un pays est entreprenant et préserve le droit des migrants alors que son voisin bafoue ses droits ou instrumentalise le drame des migrants, ça ne marchera pas. Donc, il faut une coordination sous-régionale. Sur cette base, on peut construire une politique de l’Afrique pour qu’elle interagisse avec ses partenaires en position de force« , explique le ministre.
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Enfin, le thème adopté à l’Union africaine pour l’année 2017 étant la jeunesse, le discours de Mohammed VI présente la jeunesse comme « une énergie qui peut être utilisée pour l’émergence de cette nouvelle Afrique, comme elle peut devenir un fardeau pour l’Afrique. Ça dépendra des politiques qu’on mettra en place en termes de formation, d’intégration du marché du travail, enseignement…« , résume Bourita.
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… mais surtout le Sahara
Sur la question du Sahara, « le Maroc est très satisfait des débats qui ont eu lieu et des décisions qui ont été prises, » déclare le ministre des Affaires étrangères. « On est dans une logique où les réalités commencent à être posées sur la table. Les manœuvres, les tergiversations ont été écartées. Aujourd’hui, les positions vont dans le bon sens« , poursuit-il. Le dossier du Sahara a été évoqué à trois reprises au cours du Sommet.
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D’abord dans un rapport de la Commission africaine des droits de l’Homme et des peuples qui recommandait l’envoi d’une « mission d’évaluation des droits de l’Homme dans les territoires occupés de la RASD« . Validé par le Comité des représentants permanents, le Maroc est parvenu à faire amender ce texte en Conseil exécutif. La version finale devient : « Quelques délégations ont proposé l’envoi d’une mission dans le territoire connu à l’ONU comme Sahara occidental et à l’UA comme RASD. D’autres délégations ont exprimé leur opposition ferme à cette mission« .
« Ce genre de texte était adopté de manière quasi automatique par le passé parce que des pays considéraient que cette organisation était un instrument pour faire avancer des agendas, et l’organisation a été prise en otage. Aujourd’hui, les choses sont plus claires. Le rapport se contente de rappeler les divergences de positions en appelant à un dialogue constructif. Toute la terminologie provocatrice – ‘territoire occupé’, ‘violation des droits de l’Homme’ – a été nettoyée, » relève Bourita.
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Le Sahara est également cité dans une résolution adoptée par les chefs d’État le 4 juillet et qui constitue « une grande évolution« , pour le diplomate marocain. « L’Union africaine reconnait que l’ONU a le leadership sur le dossier et la définition de la solution évolue puisque l’UA parle de ‘solution mutuellement acceptée par les parties’ et soutient le secrétaire général pour ‘parvenir à une solution consensuelle et définitive du conflit' », explique Nasser Bourita.
« On est dans un langage onusien qui respecte enfin la légalité internationale. Toute la terminologie d’avant – ‘référendum’, etc. – n’est plus mentionnée dans cette résolution« , poursuit-il.
Le rôle du Haut-représentant de l’UA pour le Sahara, le Mozambicain Joaquim Chissano, qui n’est pas en odeur de sainteté au Maroc, a également disparu de la résolution sur le Sahara. « Le seul maitre d’œuvre de ce processus, c’est Monsieur Horst Köhler, nouvel envoyé spécial de l’ONU, dont l’UA se félicite de la nomination dans cette résolution« , conclut Bourita.
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Le Sahara était encore mentionné dans le rapport d’une réunion du mois de mars du Conseil Paix et sécurité (CPS), et présenté aux chefs d’État pour ratification le 4 juillet. Cette fois, la terminologie précédemment citée et présentée comme appartenant au passé par Nasser Bourita y figure bien. Le CPS « appelle » le Maroc et la RASD à « apporter la coopération nécessaire […] au Haut-représentant de l’UA pour le Sahara« , et parle d’une « solution durable, qui doit prévoir le référendum du peuple du Sahara occidental« .
Néanmoins, « une vingtaine d’États membres [18, NDLR] ont formulé leurs ‘fortes réserves’ de manière écrite, formelle, sur cette décision pour dire qu’il ne correspond pas à la réalité du dossier« , explique encore Nasser Bourita. Ces réserves auraient, comme pour le rapport de la Cour africaine des droits de l’Homme, été mentionnées dans le rapport adopté. « Le rapport est d’ailleurs déjà en contradiction avec la résolution que les chefs d’État viennent de prendre« .
« La délégation marocaine a tenu à agir de manière active, mais constructive, afin que les actions bilatérales du Maroc en Afrique soient amplifiées au niveau multilatéral, tout en restant vigilante sur les sujets qui constituent un intérêt particulier pour le Maroc, comme la question du Sahara marocain« , conclut Nasser Bourita.
Après un entretien bilatéral avec l’ancien président de la Banque africaine de développement chargé par Paul Kagamé du volet économique de ses réformes, le ministre devrait quitter l’Éthiopie.
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