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Quand les extrêmes se rejoignent…

Le PJD et Annahj Addimocrati sont deux partis aux antipodes l’un de l’autre. Référentiel, idéologie, démarche, poids… tout, mais alors tout les sépare. Pourtant, on peut trouver un point commun entre l’extrême gauche et les ultraconservateurs. Il n’y a qu’à décortiquer les titres de leurs doctrines politiques présentées à leurs derniers congrès : “Un partenariat efficace pour une édification démocratique” pour des islamistes, aujourd’hui au pouvoir ; “Un front unifié pour un militantisme populaire contre le Makhzen pour la construction d’un régime démocratique” pour des marxistes, toujours hors jeu des institutions. Les deux partis admettent donc que la démocratie est toujours en chantier. Mais comment arriver à la parachever et commencer, enfin, à récolter ses fruits sur les plans économique et social ? Le PJD pense que la démocratie passe par “un partenariat efficace”, comprenez avec le Palais. Annahj, lui, indique la voie du “militantisme contre le Makhzen”. Problème, difficile de distinguer entre le Palais qui permet d’impulser certains dossiers et ce Makhzen, incarnation de tous les dysfonctionnements et blocages. Car les deux gravitent autour du roi, la seule institution reconnue par la loi fondamentale et qui détient, de surcroît, tous les pouvoirs. Il paraît donc logique, pour arriver à la démocratie, que le chemin le plus court serait de neutraliser ces deux forces que sont le Palais et le Makhzen, quitte à sacrifier les apports de l’un pour se prémunir contre les nuisances de l’autre. C’est simple, ça s’appelle un régime de “monarchie parlementaire” où le roi règne mais ne gouverne pas. Et on peut y arriver, sans attendre que les extrêmes se rejoignent…

Vous dites tolérance ?

Ramadan est là ! Le Maroc redevient comme par enchantement un pays musulman : les moquées réalisent chaque soir une affluence meilleure qu’une prière du vendredi en temps normal ; les débits d’alcool baissent leur rideau et en profitent pour faire des rénovations ; l’économie tourne à un rythme digne des petits moyens de production de la jahilya ; les prix des denrées alimentaires atteignent les niveaux observés dans les pays souffrant de famine ; la mauvaise humeur, la sacrée tremdina, devient un droit légitime que l’on peut librement exercer dans l’espace public… La saison 1433 de ramadan risque de ressembler aux autres, si ce n’est quelques degrés au mercure en plus. Il y en a qui apprécient l’ambiance et font le choix de jouer le jeu à fond. Respects ! D’autres n’ont pas cette force, ne voient pas l’utilité de cette pratique, se sentent étouffés dans une société qui leur impose de se mettre en mood religieux. Les plus chanceux parmi eux parviennent à fuir pour laisser passer cette vague de chaleur religieuse. D’autres sont contraints de rester, de subir le style de vie d’un vampire alors qu’ils auraient bien aimé lézarder sur une plage, une bonne bibine fraîche à la main. Ils auraient aimé que d’autres humains ne s’immiscent pas dans leurs affaires avec Dieu. Mais bon, ils sont minoritaires et n’ont donc aucun droit… Bienvenue au pays de la tolérance !

Quel pétrin !

Ce n’est pas un scoop, le Marocain est le champion du monde de la consommation de pain. Les chiffres sont dignes du Guiness Book : 3 pains par jour et par personne, 35 milliards de khobza avalées par an, 42 milliards de dirhams de chiffre d’affaires. Ce sont donc les budgets d’un TGV et de 5 ans d’INDH qui passent chaque année en a3jina. Et ce produit de première nécessité fait bien entendu l’objet d’une subvention publique de 2,3 milliards par an. Pas grand-chose… Théoriquement, il suffit d’augmenter le prix de la baguette de 10 centimes (pour passer à 1,30 dirhams) pour couvrir cette enveloppe de compensation : le budget public en sera non seulement soulagé mais gagnera un excédent de 1,2 milliard de dirhams. De quoi offrir 4800 logements sociaux par an, payés au prix du marché. En plus, ce n’est pas une telle décision qui risque de plomber le pouvoir d’achat du Marocain fauché : 30 centimes de plus par jour, 110 dirhams par an… Il paraît donc si simple de prendre une telle mesure. Mais on n’y arrive pas. Et cela n’a rien à voir avec “la volonté du gouvernement de préserver le pouvoir d’achat des citoyens”. En vérité, ce système de subvention de la farine est tellement compliqué qu’il faut d’abord le démêler pour pouvoir le démanteler. D’autre part, la mesure est très risquée politiquement : une hausse dans le prix du pain peut être la mèche qui ferait exploser une marmite sociale qui bouillonne sous la pression des défaillances socio-économiques. Si ce n’est pas cela une gouvernance à la zouj d’rial, avec des responsables qui pédalent dans la semoule, au lieu de sortir le pays du pétrin…

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