Minute Rabat-joie : de l’inuit à la darija, la différence entre la neige et la grêle

Évènement. Un fin manteau blanc a été observé le 19 janvier entre Rabat et Casablanca au cours d’une brève, mais rare, chute de grêle. Et non pas de neige. Explications sémantiques et météorologiques.

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Crédit : CC Darkone

Une idée largement répandue veut que les Inuits, qui peuplent les régions au nord du Canada, disposent de 52 mots différents pour désigner la neige et la glace. Pour le linguiste missionnaire Lucien Schneider (Dictionnaire français-esquimau du parler de l’Ungava, 1970), il n’y a en fait qu’une douzaine de mots de base, qui se déclinent ensuite pour décrire la neige sous toutes ses formes. Il cite par exemple « qanik » (la neige qui tombe), « aputi » (la neige sur le sol) « pukak » (la neige cristalline sur le sol), « siku » (la glace en général), ou encore « nilak » (glace d’eau douce, pour boire).

Cette richesse linguistique chez les Inuits s’explique par la nécessité de décrire leur environnement, effectivement recouvert de neige et de glace une bonne partie de l’année. À l’inverse, la rareté de la neige et de la grêle dans certaines régions du Maroc pourrait expliquer que, jusque dans certains médias francophones, les mots « neige » et « grêle » se retrouvent utilisés comme synonymes pour rapporter l’épisode de chute de grêle observé entre Rabat et Casablanca le 19 janvier. La darija fait pourtant bien la différence entre « tabrouri » (grêle) et « telj » (neige).

Au-dessus de nos têtes

La neige et la grêle sont toutes les deux des types de précipitations atmosphériques solides. Elles viennent toutes deux de l’évaporation d’eau qui quitte la terre ferme sous forme de vapeur d’eau pour se transformer en cristaux puis en gouttes d’eau. Les gouttes d’eau sont entrainées vers le haut du nuage et se transforment en cristaux de glace sous l’effet du froid. Ils deviennent alors très lourds et redescendent vers le sol. Parfois, ils fondent et arrivent sur la Terre sous forme de goutte d’eau. C’est la pluie. Mais si au cours de cette descente la température reste en dessous de 0°C, les cristaux de glace fusionnent et forment des flocons de neige.

La grêle, ce sont des gouttes d’eau qui ont donc entamé leur descente à plus de 0°C, mais qui sont recongelées dans leur chute. Petites, elles peuvent alors être entrainées à nouveau vers le haut du nuage, etc., etc. Mais lorsque le ballet se répète, les gouttes d’eau décongelées puis recongelées sans cesse prennent du volume et deviennent trop lourdes pour remonter une dernière fois. Elles entament alors leur dernière chute, sous forme de grêlons. Et provoquent l’étonnement des Rbatis.

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