France : l’incarcération d’un policier fait craindre une fronde au sein de l’institution

Le patron de la police en France a demandé lundi la remise en liberté d’un policier inculpé dans une affaire de violences en marge des émeutes, requête jugée “gravissime” par des syndicats de magistrats et une partie de la gauche.

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(Image d'illustration) Crédit: Christophe Archambault / AFP

Quatre policiers soupçonnés d’avoir violemment frappé un jeune homme à Marseille ont été inculpés dans la nuit de jeudi à vendredi pour violences en réunion par personne dépositaire de l’autorité publique.

Ils sont accusés d’avoir roué de coups un jeune de 21 ans dans le centre de Marseille, dans la nuit du 1er au 2 juillet alors que la cité phocéenne, comme de nombreuses villes de France, était en proie aux violentes émeutes après la mort de Nahel, un adolescent de 17 ans tué par un policier à Nanterre, en région parisienne, lors d’un contrôle routier.

Alors hospitalisé, quelques jours après les faits, le jeune homme, Hedi, avait affirmé avoir été frappé par un groupe de quatre à cinq personnes après avoir reçu un tir de LBD (balle de défense) dans la tempe. “Il a été tiré comme un lapin puis roué de coups”, avait dénoncé vendredi auprès de l’AFP son avocat, Me Jacques-Antoine Preziosi.

“Je considère qu’avant un éventuel procès, un policier n’a pas sa place en prison, même s’il a pu commettre des fautes ou des erreurs graves dans le cadre de son travail”

Frédéric Veaux, DG de la Police nationale

Après une visite samedi auprès de ses troupes à Marseille, le directeur général de la Police nationale (DGPN) a déclaré dimanche souhaiter la libération du policier. Le savoir en prison m’empêche de dormir”, a dit Frédéric Veaux, dans un entretien au journal Le Parisien“De façon générale, je considère qu’avant un éventuel procès, un policier n’a pas sa place en prison, même s’il a pu commettre des fautes ou des erreurs graves dans le cadre de son travail”, ajoute Frédéric Veaux.

Les propos de Frédéric Veaux surviennent alors que l’ire de ses hommes ne faiblit pas. Depuis la détention de leur collègue, plusieurs centaines de policiers de la cité phocéenne se sont mis en arrêt maladie, selon une source syndicale, ou n’assument plus que des missions d’urgence et essentielles en signe de protestation.

Dès jeudi soir, jusqu’à 250 d’entre eux s’étaient réunis devant le Palais de justice de Marseille et avaient chaudement applaudi leur collègue emmené en voiture, selon des images largement diffusées sur les réseaux sociaux.

“La loi est la même pour tous”

Les deux principaux syndicats de magistrats ont jugé lundi gravissimes” les propos du patron de la police nationale. “Il y a un principe fondamental dans une démocratie : la loi est la même pour tous”, a souligné auprès de l’AFP la présidente du Syndicat de la magistrature (SM, classé à gauche), Kim Reuflet.

Les propos du patron de la Police nationale sont scandaleux” et gravissimes dans un état de droit”, a également réagi Cécile Mamelin, vice-présidente de l’Union syndicale des magistrats (USM, majoritaire).

Le patron des socialistes, Olivier Faure, a lui jugé gravissimes » ces déclarations. Toute la hiérarchie policière se place au dessus de la justice et des règles de la détention provisoire, et le ministre de l’Intérieur est en arrêt maladie ! Ce qui se joue là, c’est la démocratie et le respect de l’État de droit”, a-t-il poursuivi.

“Alors ? Darmanin, Macron et l’arc républicain refusent d’appeler la police au calme et au respect de la loi ? Donc ils les encouragent à faire la guerre aux nuisibles ? Écœurant. L’État ridiculisé”, a tweeté l’ancien candidat à la présidentielle et leader de la gauche radicale Jean-Luc Mélenchon, avant la publication d’un communiqué de son parti, La France insoumise.

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