Depuis février 2024, Bali impose une taxe de 9 euros aux voyageurs étrangers. En Nouvelle-Zélande, le droit d’entrée a triplé, atteignant 56 euros. Venise, pionnière des taxes touristiques en Europe, a fixé un droit d’entrée à 10 euros.

Le Bhoutan applique quant à lui une taxe de développement durable de 100 USD par jour et par visiteur, avec une incitation pour les séjours prolongés.
D’autres sites emblématiques suivent cette tendance : la basilique Sainte-Sophie d’Istanbul impose un droit d’entrée de 25 euros, tandis qu’Amsterdam détient le record européen avec une taxe de séjour de 12,5 % sur le prix des nuitées. Ces initiatives visent avant tout à limiter l’affluence touristique et à préserver la qualité de vie des habitants.
Elles illustrent également une réalité incontournable : le tourisme ne peut plus être pensé indépendamment de son impact écologique. Personne n’aime voir arriver de nouvelles taxes, surtout celles obligatoires.

À travers le monde, les effets de cette taxe sont assez contrastés entre les destinations qui peuvent se passer de l’économie du tourisme en privilégiant la qualité de vie de leurs habitants, et celles dont la survie économique dépend entièrement de cette activité.
Le Maroc face à l’urgence environnementale
Chaque année, le Maroc accueille plusieurs millions de visiteurs. Si cette activité constitue un levier de développement économique indéniable, elle engendre aussi une forte pression sur les ressources naturelles, notamment dans un contexte de sécheresse persistante et de stress hydrique croissant.
“Le tourisme ne peut plus être pensé indépendamment de son impact écologique”
L’instauration d’un timbre écologique — une contribution fixée à 20 euros par touriste à son entrée sur le territoire — permettrait de financer des initiatives concrètes en faveur du climat et de la préservation des ressources naturelles.
Ce prélèvement, relativement modeste au regard du coût d’un voyage, deviendra bientôt la norme à l’échelle mondiale. Il faut s’y préparer, car les touristes devront, tôt ou tard, assumer leurs externalités, c’est-à-dire les impacts négatifs qu’ils génèrent.
Un fonds vert pour un tourisme durable
Le tourisme contribue largement à la pollution, notamment par la consommation excessive d’eau en bouteille et la production de déchets, dont seule une fraction est recyclée. La mise en place d’un fonds vert permettrait de financer des projets concrets, tels que :
• Le recyclage et la valorisation des déchets plastiques, notamment les bouteilles d’eau, afin de réduire la pollution.
• Le reboisement et la préservation des espaces verts, essentiels pour lutter contre la désertification.
• L’installation de stations de traitement des eaux usées dans les infrastructures touristiques, favorisant la réutilisation de l’eau pour l’arrosage et les sanitaires
• Le développement des énergies renouvelables, en incitant les hôtels et restaurants à investir dans l’énergie solaire et l’efficacité énergétique.
Une gestion transparente pour une adhésion collective
Pour être efficace et accepté, ce dispositif devra être encadré par des principes de gouvernance rigoureux :
• Une transparence totale sur la collecte et l’utilisation des fonds, afin d’éviter tout soupçon d’écoblanchiment.
• Un encadrement strict des dépenses, pour s’assurer que chaque dirham contribue réellement à la transition écologique.
•Une information régulière des parties prenantes, notamment des citoyens et des professionnels du tourisme.
• Une harmonisation des initiatives entre les villes et régions concernées.
• Une communication responsable auprès des touristes, pour qu’ils comprennent l’impact positif de leur contribution.
Un engagement commun pour un avenir durable
Ce timbre écologique ne doit pas être perçu comme une contrainte, mais comme un engagement mutuel entre le Maroc et ses visiteurs pour préserver un patrimoine naturel exceptionnel. Le pays n’a pas à choisir entre économie et écologie : il doit réconcilier les deux pour bâtir un avenir où le tourisme rime avec durabilité.

“Le Maroc n’a pas à choisir entre économie et écologie : il doit réconcilier les deux pour bâtir un avenir où le tourisme rime avec durabilité”
À travers cette approche, le Maroc pourrait se positionner comme une destination pionnière en matière de tourisme responsable. Miser sur la qualité plutôt que la quantité permettrait non seulement de préserver ses ressources naturelles, mais aussi d’attirer un public plus soucieux de son empreinte écologique.
Le temps n’est plus à l’attente, mais à l’action. Ce timbre écologique constituerait une première étape vers un tourisme plus vertueux, conciliant prospérité économique et préservation de l’environnement.
A propos de l’auteur :
Said Marghadi est guide, réalisateur, entrepreneur, militant écologique, président de Touda Ecolodge et de l’Ecomusée vallée Bougmez.