Nous avons réalisé en une année ce qui n’a pas été fait en dix ans”, se félicitait Aziz Akhannouch, le 12 février, lors du dernier conseil national du RNI. Devant un parterre ravi de cadres et de militants du parti au pouvoir, le Chef du gouvernement s’est dit “fier” du bilan d’étape de son équipe, avant de promettre de “continuer sur la même approche”.
Le triomphalisme d’Akhannouch est cependant aux antipodes de la réalité crue des chiffres, qui prête beaucoup moins à l’optimisme. Le véritable coup de semonce pour le chef de l’Exécutif a été asséné par le Haut-commissariat au plan (HCP).
Dans une note sur l’emploi publiée mi-février, le HCP décrit un panorama du travail proprement cauchemardesque. C’est bien simple : jamais autant de Marocains en âge de travailler n’avaient été à ce point exclus du marché de l’emploi.
Le diagnostic que pose l’instance présidée par Ahmed Lahlimi fait froid dans le dos. En 2022, sur une population en âge d’activité de 27,5 millions de personnes âgées de 15 à 64 ans, seuls 12,2 millions sont en situation d’activité. Le reste, c’est-à-dire 15,3 millions de personnes, demeurent exclues du marché du travail. Résultat, un taux d’emploi de 44,3%. Le plus bas de l’histoire.
L’implacabilité de ces chiffres tranche sévèrement avec les promesses de campagne du candidat Akhannouch. Ce dernier promettait en effet de créer un choc de croissance susceptible de générer 200.000 emplois nets par an. En relançant notamment l’investissement privé, le projet du RNI se fixait comme cible de doper le PIB de 4% par an.
À cela était associée la promesse de créer 1 million d’emplois au terme de la législature. Or, ni la croissance ni la création d’emplois annoncées n’ont été au rendez-vous. Au terme d’une première année de mandat pleine et entière, le PIB n’a cru que de 1,3%, selon le HCP.
Ce faisant, l’économie nationale a été incapable de produire suffisamment d’emplois pour, d’après le HCP, “absorber l’augmentation de la population en âge de travailler”.
Autrement dit, ces 400.000 jeunes qui chaque année frappent aux portes d’un marché du travail anémié. Par conséquent, la diminution du nombre d’emplois conjuguée à une main-d’œuvre plus abondante, mais aussi à la prégnance du secteur informel, ont eu pour conséquence une recrudescence sans précédent de l’inactivité.
Le chiffre qui fâche : 24 000 emplois détruits en 2022
Mais il y a pire. Alors que l’on croyait le Maroc installé sur une trajectoire de rattrapage de la crise Covid, avec notamment un exercice 2021 sanctionné par une croissance de 7,8% et 480.000 postes nets créés, sous le gouvernement Akhannouch, le retour à la “normale” est mis en péril.
De fait, en 2022, non seulement l’économie n’a pas créé d’emplois nets, mais elle en a détruit… 24.000. On est loin, très loin des 200.000 emplois annuels promis par Aziz Akhannouch. En comparaison, le dernier exercice avant Covid du gouvernement El Othmani s’était soldé par 165.000 créations d’emplois nets.
Mais alors, pourquoi cette soudaine dégringolade ? Pourquoi, alors que le Maroc n’est pas en récession et que le retour à la normale post-pandémie semblait être consommé, l’économie sous Akhannouch détruit-elle autant d’emplois ? Que valent des dispositifs comme Forsa et Awrach promus à grands renforts de budgets marketing ? Qu’a tenté ce gouvernement pour limiter l’hémorragie, mais surtout qu’a-t-il raté ?