Maroc-Espagne : d'égal à égal

Rabat a obtenu de Madrid une nouvelle confirmation du soutien à son plan d’autonomie. À présent, le Maroc aspire à un partenariat économique et diplomatique privilégié. Plus de crises et de bouderies, place à la realpolitik.

Par et

TELQUEL

En diplomatie, comme dans un couple, il n’y a pas d’amour sans preuves. “Il n’y a jamais eu autant d’accords signés. Nous ne sommes pas allés à Rabat à la recherche de photos ou d’actes formels, nous sommes allés à la recherche de résultats et le résultat principal est un nouveau modèle de relation”, a affirmé le ministre espagnol des Affaires étrangères José Manuel Albares au journal La Vanguardia, au lendemain de la 12e Réunion de Haut Niveau entre les deux pays, tenue à Rabat les 1er et 2 février.

Dix-huit accords signés et le doublement des investissements publics au Maroc sont venus solder cette rencontre très attendue, après un gel de huit ans. Ces deux dernières années, des frictions ont à nouveau émaillé les relations entre les deux voisins du détroit. Après avoir scellé une réconciliation, Rabat et Madrid sont-ils pour autant prémunis contre les crises ?

Une source diplomatique marocaine se veut optimiste: “L’objectif est de construire une relation irréversiblement bonne. Cela veut dire que nous ne voulons pas tomber dans des crises. Le cadre juridique aide l’ensemble des acteurs, étatiques et privés, à avoir une sécurité et l’aisance pour travailler et produire. Je dirai que cette relation est bien multiforme parce qu’elle repose sur une relation économique et commerciale solide”.

Accords cruciaux, partenariat d’exception

Le sommet de Rabat, un nouvel élan pour la relation entre les deux pays ? En tout cas, “une manifestation de la volonté politique des deux parties de consolider la réconciliation”, d’après Irene Fernandez-Molina, spécialiste des relations Maghreb-Espagne à l’université d’Exeter, en Grande-Bretagne.

C’est que les enjeux de ce sommet étaient, eux aussi, de haut niveau. Notamment sur le plan économique où le bilan est positif pour le Maroc. Le moment a été l’occasion pour la délégation espagnole de réitérer la volonté de Madrid de se positionner en tant “qu’investisseur de référence” sur le marché marocain.

Une volonté qui devrait se traduire, selon la déclaration commune publiée à l’issue de la rencontre, par le doublement des budgets d’investissement espagnols au Maroc, passant à 800 millions d’euros.

Cette enveloppe devrait cibler, via des instruments financiers remboursables et non remboursables, des “projets d’intérêts prioritaires”, notamment dans les domaines des infrastructures, des énergies renouvelables, de l’eau et de l’assainissement, des équipements d’éducation, de santé et des secteurs productifs.

“L’Espagne a besoin du marché africain occidental. Lorsque les deux pays étaient en crise, Madrid a été confrontée à la colère du patronat qui avait peur d’être isolé”

Mohamed Badine El Yattioui

Une impulsion dont s’est réjoui le Chef du gouvernement Aziz Akhannouch, affirmant que “les relations économiques entre nous (Maroc/Espagne. ndlr) connaissent un développement qualitatif (…) pour inclure des projets communs à dimension stratégique”.

C’est que ces accords commerciaux entre les deux pays sont cruciaux, comme le confirme Mohamed Badine El Yattioui, professeur de géopolitique à l’Université américaine de Dubaï : “L’Espagne a besoin du marché africain occidental. Lorsque les deux pays étaient en crise, Madrid a été confrontée à la colère du patronat qui avait peur d’être isolé et de perdre sa capacité d’influence si la brouille diplomatique perdurait”. Lire la suite.

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