Dégroupage : l’ANRT condamne Maroc Telecom à une astreinte de 2,45 milliards de dirhams

Dans un communiqué rendu public ce 26 juillet, Maroc Telecom indique que le montant de l’astreinte imposée par l’ANRT a été fixé à 2,45 milliards de dirhams. Décortiquons le contexte de cette sanction.

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Abdeslam Ahizoune, président du directoire de Maroc Telecom. Crédit: Rachid Tniouni

Ce qui a été annoncé : Dans le cadre de la décision du 17 janvier 2020 portant sur le dégroupage, le montant de l’astreinte imposée à Maroc Telecom (IAM) par l’Agence nationale de réglementation des télécommunications (ANRT) a été fixé.

La situation avant : Tout commence en février 2006 lorsque Driss Jettou, alors Premier ministre et président du conseil d’administration de l’ANRT, fixe la date de mise en œuvre du “dégroupage de la boucle locale” au 8 janvier 2007. Il s’agissait alors de permettre aux concurrents de l’opérateur historique d’exploiter ses infrastructures moyennant un “loyer”. Dans les faits, cet arrêté signait la fin du monopole dans les segments du fixe et de l’ADSL.

En 2013, la tension monte d’un cran entre Inwi et Maroc Telecom lorsque ce dernier modernise ses infrastructures pour proposer un meilleur débit ADSL, refusant l’accès à celles-ci aux ingénieurs de ses concurrents, et demande la réévaluation des frais d’accès. Malgré une intervention de l’ANRT, Maroc Telecom reste droit dans ses bottes et réclame un loyer en moyenne 20 % supérieur à celui en vigueur dans les pays européens.

Pour IAM, il ne s’agit pas de rejeter le dégroupage, bien au contraire, et Abdeslam Ahizoune le martelait à chacune de ses conférences annuelles : Maroc Telecom souhaite même que ses “concurrents deviennent des clients”, mais que les conditions tarifaires soient équitables. Et de rappeler que son entreprise a “osé” investir sur un créneau qu’il estime pourtant non rentable.

En septembre 2016, l’ANRT hausse de nouveau le ton avec un avertissement reprochant à l’opérateur historique “un manquement partiel à ses obligations réglementaires découlant de sa qualité d’exploitant exerçant une influence significative sur le marché de gros de l’accès à l’infrastructure constitutive de sa boucle locale cuivre”.

Contesté par Maroc Telecom, cet avertissement est suivi trois mois plus tard d’une demande de mise en demeure adressée par Inwi, qui mènera à l’action en justice. À travers cette action, Inwi saisit également l’ANRT, greffée au dossier à la demande d’Inwi.

Le contexte : En mars 2007, Maroc Telecom se voit reprocher une “fourniture de service de gros ADSL de mauvaise qualité”, des “contrats comportant des clauses anticoncurrentielles et illégales” ainsi que “la non-réplicabilité des offres de services de détails ADSL à débit garanti”. La plainte est alors déjà fondée “sur l’abus par IAM de sa position dominante”. À ces accusations, l’opérateur historique répond que “le lien de causalité entre la position dominante et l’abus n’existe pas”.

Le litige est tranché par l’ANRT en août 2007. Le régulateur appelait ainsi Maroc Telecom à résoudre tous les problèmes liés à l’accès ADSL dans un délai de 15 jours. L’Agence invitait également les deux opérateurs à “engager des négociations afin de revoir le contrat d’accès ADSL” et ordonne à l’opérateur historique de proposer à Inwi une offre de gros d’accès à l’ADSL devant “être raisonnable, objective et non discriminatoire”.

Une demande à laquelle IAM se pliera en proposant des frais d’accès approuvés par l’ANRT en 2010 et 2012.

Plus tard, en 2020, le groupe Wana, détenteur de la marque Inwi, retire sa plainte, mais l’ANRT maintient la décision de son comité de gestion relative à la liquidation de l’astreinte imposée à Maroc Telecom dans le cadre de la décision du 17 janvier 2020 portant sur le dégroupage.

L’impact de l’annonce : Le montant de l’astreinte est fixé à 2,45 milliards de dirhams, et Maroc Telecom dispose d’un délai de 30 jours pour former un recours devant la Cour d’appel de Rabat, selon le communiqué de Maroc Telecom, rendu public le 22 juillet 2022.

Pour en savoir plus : Aux origines du clash entre les deux géants des télécommunications, le dossier du dégroupage a été la source de plusieurs amendes et de cette astreinte imposée à Maroc Telecom. Après l’intervention d’Al Mada, le 21 février 2020, Wana retirait sa plainte contre Maroc Telecom, laissant l’ANRT s’occuper du dossier.

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