Le procès historique de Donald Trump entre dans le vif du sujet

Le procès historique de Donald Trump entre ce 21 janvier dans le vif du sujet au Sénat américain, où s’affrontent deux camps irréductibles : l’opposition démocrate qui réclame la destitution du président des États-Unis, et la majorité républicaine déterminée à l’acquitter, si possible au pas de course.

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Les démocrates, qui ne disposent que de 47 sièges sur 100 au Sénat, sont conscients qu’ils n’ont quasiment aucune chance d’obtenir la destitution du président, une majorité des deux tiers étant nécessaire. Crédit: SAUL LOEB / AFP

Quatre mois après le début de l’affaire ukrainienne qui empoisonne la fin du premier mandat du républicain Donald Trump, et à moins de dix mois de l’élection présidentielle où il compte en briguer un second, les 100 sénateurs vont se retrouver ce mardi 21 janvier à 13 heures (18 heures GMT) sous la présidence du chef de la Cour suprême John Roberts.

Au cœur du scandale : un coup de téléphone en juillet au cours duquel le président américain demandait à son homologue ukrainien Volodymyr Zelensky d’enquêter sur Joe Biden, son adversaire démocrate potentiel à la présidentielle de novembre.

Plaider l’innocence

La tâche de ces élus, qui ont prêté serment jeudi 16 janvier en tant que jurés lors de l’ouverture formelle du procès, est de déterminer si Donald Trump est bien coupable d’abus de pouvoir et d’entrave au travail du Congrès, comme le décrit l’acte d’accusation adopté en décembre par la Chambre des représentants.

Le rendez-vous s’annonce d’autant plus grave et solennel qu’il s’agit seulement du troisième procès en destitution d’un président américain, après Andrew Johnson en 1868 et Bill Clinton en 1999. Donald Trump sera physiquement absent des audiences au Sénat et y sera représenté par une équipe d’avocats.

Les démocrates, majoritaires à la Chambre qui a mené l’enquête, accusent l’ex-magnat de l’immobilier d’avoir exercé un chantage sur Kiev : vous lancez l’enquête, ou nous bloquons une aide militaire cruciale. “Le président n’a rien fait de mal”, répondent les avocats de Donald Trump dans leur argumentaire de 110 pages soumis lundi au Sénat.

Rapport de forces

C’est la ligne de défense de l’ex-homme d’affaires new-yorkais âgé de 73 ans, qui enchaîne les provocations et aime casser les codes politiques. Depuis des mois, il fustige une “chasse aux sorcières” et affirme que son coup de fil était “parfait”. Dénonçant un “processus truqué” qui a abouti à “une perversion dangereuse de la Constitution”, ses avocats ont estimé que les chefs d’accusation adoptés avec les seules voix démocrates n’étaient pas passibles de destitution, car “ils ne comportent aucun crime ou violation de la loi”.

L’équipe juridique de la Maison-Blanche, qui a recruté quelques vedettes des prétoires comme l’ex-procureur Kenneth Starr qui tenta de faire tomber Bill Clinton dans l’affaire Lewinsky, a d’ailleurs appelé le Sénat à “acquitter immédiatement” le 45e président des États-Unis.

Pour les démocrates chargés de porter l’accusation lors du procès, Donald Trump affirme ainsi “que le Sénat ne peut pas le destituer même si les accusations contre lui sont prouvées”. Au regard du rapport de forces au Sénat, où les républicains disposent de 53 élus sur 100, en effet, cela s’annonce difficile.

Fautes graves

Celui qui assumera le rôle de procureur général, l’élu démocrate Adam Schiff, entend au contraire prouver que le locataire de la Maison-Blanche “s’est livré à un tiercé de fautes constitutionnelles méritant une destitution” : “Il a sollicité une ingérence étrangère, mis en danger notre sécurité nationale, et tenté de tricher en vue de la prochaine élection.

Il est le pire cauchemar des pères de la Constitution”, a-t-il martelé lundi 20 janvier. En réalité, l’acquittement semble pratiquement assuré pour Donald Trump, grâce à la majorité républicaine du Sénat qui fait bloc derrière lui.

Cafouillage sur la durée des débats

La durée des débats reste en revanche une question en suspens. À quelques heures de l’ouverture des débats, en effet, le plus grand flou planait encore sur le déroulement du procès, qui devrait d’ailleurs démarrer par des votes pour fixer la procédure. Selon des membres du camp présidentiel, l’influent Mitch McConnell, chef de la majorité républicaine au Sénat, souhaite imposer des débats à marche forcée, bien décidé à offrir à Donald Trump l’acquittement rapide qu’il espère, idéalement dans un délai de deux semaines.

Au programme, selon des règles du jeu proposées lundi 20 janvier au soir, Mitch McConnell prévoit deux journées de 12 heures pour l’accusation et autant pour la défense afin qu’elles exposent leurs arguments, puis 16 heures de questions des sénateurs. Beaucoup trop court, selon l’opposition démocrate au Sénat.

Leur chef, Chuck Schumer, a dénoncé une “honte nationale”. Ce n’est qu’après cette première phase que Mitch McConnell entend mettre aux voix la question cruciale des témoins. Les démocrates réclament que quatre acteurs-clés de l’affaire ukrainienne soient convoqués à la barre, dont le chef de cabinet de la Maison-Blanche Mick Mulvaney et l’ex-conseiller à la sécurité nationale John Bolton.