Rapprochement Rabat-Nouakchott: Moulay Rachid reçoit un émissaire d'Ould Abdelaziz

Sur ordre de Mohammed VI, le prince Moulay Rachid a reçu, le 26 février à sa résidence de Rabat, le président du parti présidentiel mauritanien Sidi Mohamed Ould Maham, qui lui a remis un message du président Mohamed Ould Abdel Aziz à l'intention du roi.

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Le prince Moulay Rachid à Accra (Ghana) en septembre 2018. (image d'illustration) Crédit: CRISTINA ALDEHUELA / AFP

Cette audience s’est déroulée en présence de l’ambassadeur de Mauritanie à Rabat, M. Mohamed Lemine Ould Aboye, rapporte l’agence MAP.

Elle fait suite à une série de rencontres maroco-mauritaniennes qui témoignent d’un rapprochement grandissant entre Rabat et Nouakchott.

En juin 2018, le président mauritanien avait accordé une audience à l’ambassadeur du Maroc en Mauritanie Hamid Chabar à l’issue de laquelle il lui avait remis ses lettres de créance. Depuis le décès de l’ambassadeur marocain Abderrahmane Benomar en décembre 2016, le poste était resté inoccupé. Hamid Chabar avait en effet été nommé en avril 2017, mais n’avait pas pris ses fonctions à Nouakchott. Plusieurs mois après sa nomination, la Mauritanie avait finalement accepté, en octobre 2017, d’accréditer Hamid Chabar. En décembre 2017, le voisin du sud nommait à son tour un ambassadeur à Rabat, poste vacant depuis 2012.

En novembre 2018, le ministre des Affaires étrangères Nasser Bourita s’est rendu à Nouakchott pour remettre un message du roi Mohammed VI au président mauritanien. Le diplomate marocain avait également fait état de la volonté commune des deux chefs d’Etat « d’impulser les relations (entre les deux pays, NDLR) et de les hisser au niveau escompté ». Une nouvelle impulsion qui sera accompagnée de « changements importants », a indiqué le ministre sans donner plus de précisions.

Le mois suivant, en décembre 2018, le chef du gouvernement Saad Eddine El Othmani rencontrait son homologue mauritanien Mohamed Salem Ould El Bechir dans le cadre du G5 Sahel.

Quelques jours plus tôt, se tenait à Genève la table ronde sur le Sahara, réunissant pour la première fois les pays impliqués dans le dossier du Sahara (le Maroc, l’Algérie et la Mauritanie, ainsi que le Front Polisario).

Actuellement, le Maroc est le premier investisseur africain en Mauritanie où les entreprises marocaines opèrent notamment dans les secteurs des télécoms, le secteur bancaire la distribution du gaz ou encore la transformation des produits de la pêche.

Les échanges commerciaux entre les deux pays sont estimés à 203 millions de dollars, mais la balance commerciale penche très largement en faveur du Maroc (200 millions de dollars d’exportation marocaine vers la Mauritanie contre 3 millions de dollars d’exportation mauritanienne vers le Royaume).

Sur la scène continentale, Nouakchott avait appuyé le retour du Maroc au sein de l’Union africaine au mois de janvier 2017. Un an plus tard, la Mauritanie a, selon la diplomatie marocaine, soutenu la candidature du Royaume au Conseil paix et sécurité de l’organisation panafricaine. Plus récemment, la Mauritanie, qui reconnait la RASD, a soutenu la candidature marocaine à l’organisation du Mondial 2026.

10 ans de crise larvée

Au cours de la dernière décennie, les relations entre le Maroc et la Mauritanie n’ont pas toujours coulé de source.

Deux ans après l’élection de Mohamed Ould Abdelaziz à la présidence suite à son coup d’État en 2009, le correspondant marocain de l’agence MAP, Havidh Elbaghali, était sommé de quitter le territoire mauritanien dans un délai de 24 heures, accusé d’être un agent de la DGED. Depuis, la tension allait crescendo.

Alors que Mohamed Ould Abdelaziz a présidé l’Union africaine en 2014 et que la lutte contre le terrorisme exige des actions concertées sur le terrain dans le cadre du G5 Sahel (Mauritanie, Mali, Burkina Faso, Niger, Tchad), le président a pu se sentir floué lors des dernières tournées africaines de Mohammed VI qui n’a pas fait escale en Mauritanie. Plusieurs médias rapportent d’ailleurs que le président mauritanien n’aurait pas apprécié que le roi du Maroc n’ait pas accepté de le rencontrer en marge du sommet Inde-Afrique à New Delhi, en octobre 2015.

Autre sujet de mésentente, deux des principaux opposants au régime d’Ould Abdelaziz ont trouvé asile au Maroc. Son cousin, et autrefois allié, Ould Bouamatou, gère ses milliards depuis Marrakech, tandis que Moustapha Limam Chafi a installé sa famille à Rabat.

En février 2016, le Maroc avait renoncé à l’organisation du sommet arabe qui devait se tenir deux mois plus tard à Marrakech, avançant que « les conditions objectives pour garantir le succès d’un sommet arabe, à même de prendre des décisions à la hauteur de la situation et des aspirations des peuples arabes, ne sont pas réunies  ». Ignorant cette position, la Mauritanie s’était alors annoncée comme remplaçante au pied levé. Un affront pour le Maroc, qui avait refusé de recevoir à deux reprises le ministre mauritanien des Affaires étrangères, Isselkou Ould Ahmed Izidbih, muni d’une invitation à remettre à Mohammed VI pour ce sommet arabe.

Autre affront, ce coup de téléphone, relayé par les médias mauritaniens, d’Ould Abdelaziz à Mohamed Abdelaziz, l’ex-chef du Polisario, le jour même où Mohammed VI célébrait le 40e anniversaire de la Marche verte en grande pompe à Laâyoune. Le mois suivant, en septembre 2015, des militaires mauritaniens hissaient leur drapeau dans la commune marocaine de Lagouira. Réaction immédiate du Maroc : le ministre des Affaires étrangères de l’époque Salaheddine Mezouar, le général Bouchaïb Arroub, ex-commandant de la zone sud, et le directeur de la DGED Yassine Mansouri se rendaient à Nouakchott pour demander des explications à Ould Abdelaziz.

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