Plusieurs lois judiciaires très controversées ont été adoptées le 26 mars par la deuxième chambre du parlement espagnol. L’une d’entre elles, la loi organique de sécurité citoyenne, appelée aussi « loi bâillon » par ses détracteurs, donne plus de pouvoirs aux forces de l’ordre, afin de limiter fortement le nombre et l’ampleur des manifestations. Mais un article de cette loi pourrait avoir des répercussions directes sur le Maroc puisqu’il concerne le sort réservé aux migrants qui tentent d’entrer dans les enclaves espagnoles de Sebta et Melilia. En effet, il donne le droit aux forces de l’ordre d’expulser les sans-papiers qui tentent d’escalader la barrière séparant l’Espagne du Maroc, « à chaud » avant même qu’ils aient pu déposer une demande d’asile. Ce renvoi à la frontière existait déjà dans la pratique mais devient maintenant légal.
Pourtant, les expulsions qui empêchent les personnes de faire appel de leur renvoi et d’exposer leur situation individuelle, sont contraires à la législation européenne et aux conventions internationales. Cette réforme est donc décriée par des ONG comme Amnesty International qui a dénoncé, dans un communiqué «un jour sombre pour l’Espagne». En outre, elle est dénoncée par des institutions internationales comme le Haut commissariat aux réfugiés (HCR), organisme onusien. De nombreux réfugiés, syriens notamment, tentent de passer cette frontière pour fuir le conflit qui sévit dans leur pays. En 2013, 2 000 Syriens, dont 70 % de femmes et d’enfants sont ainsi entrés clandestinement dans les deux enclaves.
Le HCR est aussi préoccupé par le recours croissant à la violence à la frontière pour dissuader les migrants et les demandeurs d’asile d’entrer. Cette année, plusieurs incidents violents ont été signalés ainsi qu’une hausse des refoulements depuis les enclaves.
Pour Mehdi Alioua, président du Groupe anti-raciste d’accompagnement et de défense des étrangers et migrants (Gadem), cette réforme ne devrait a priori « pas changer beaucoup de choses pour le Maroc puisqu’elle ne fait que légaliser une pratique qui existe déjà ». Par contre, le sociologue s’inquiète pour le sort réservé aux migrants en Espagne : « cette loi est contraire aux engagements internationaux de l’Espagne donc qu’est-ce qui lui empêche d’en violer d’autres ? », s’interroge-t-il, parlant « d’une fuite en avant vers un système répressif ».
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