La réunion du Comité Al Qods à Marrakech, sous la présidence de Mohammed VI, peut servir de prétexte pour examiner l’évolution de la diplomatie chérifienne. L’insoluble conflit du Proche-Orient – qui cristallise chez nous des débats passionnés au sujet des relations avec Israël (lire p.38) – ne risque pas de connaître un grand avancement à l’issue de ce 20e sommet du genre. Révolu le temps où le Maroc était un facilitateur incontournable des pourparlers israélo-palestiniens. Le royaume a énormément perdu de son influence sur le processus de paix dans cette région. Car le monde a changé.
Mohammed VI est moins visible sur ce dossier que l’a été son père, c’est une évidence. Le style des deux monarques est aux antipodes : Hassan II, plus extraverti, se plaisait à se retrouver au cœur des négociations politiques, tandis que Mohammed VI, plus réservé, préfère agir sur le volet social dans les territoires occupés à travers l’Agence Bayt Mal Al Qods. Mais limiter le bilan diplomatique de Mohammed VI à ce dossier conflictuel serait un raccourci.
Le roi s’en sort comme il peut sur le plan des Affaires étrangères. Le Maroc n’a jamais été une super-puissance qui a son mot à dire sur la scène internationale. Et il est plus compliqué de se faire entendre dans le monde d’aujourd’hui, un monde multipolaire traversé par de nouveaux phénomènes (montée de l’extrémisme, instabilité des régimes, fragilité des systèmes financiers…). Alors, la diplomatie du royaume markette comme elle peut les atouts dont elle dispose (stabilité politique et économique, islam tolérant…) pour garder un minimum de visibilité et remporter parfois de petites victoires.
Pourtant, quand il s’agit de sorties royales, on cherche souvent à les magnifier en y associant des résultats concrets. On peut rappeler sa dernière visite aux Etats-Unis, qui s’est soldée par un communiqué conjoint avec l’administration américaine assez réconfortant sur le dossier du Sahara. Avant cela, le déplacement de Mohammed VI pour la cérémonie d’investiture du président malien s’est accompagné d’une aide médicale et d’une assistance religieuse pour contribuer à la reconstruction de ce pays qui incarne les dangers de l’extrémisme au Sahel. Enfin, la récente visite de l’émir du Qatar a permis de débloquer l’aide octroyée au Maroc par le Conseil de coopération du Golfe. Autant de réalisations à mettre sur le compte de Mohammed VI.
Mais le monarque peut faire davantage pour le rayonnement du royaume. Sa tendance à bouder de nombreux sommets internationaux reste incompréhensible, car il s’agit d’occasions ratées pour gagner en visibilité au sein de la communauté internationale. Ce sentiment de retrait du concert des nations est renforcé par le fait que Mohammed VI n’a jusque-là réalisé aucun grand coup diplomatique pour marquer son règne. Pourtant, il ne manque pas d’atouts : son tropisme africain, ses relations chaleureuses avec les monarchies pétrolières, son image auprès des puissances occidentales sont autant de leviers à activer. Il suffit alors de trouver la bonne combinaison.