Smyet bak ?
Ahmed Ben Allal
Smyet mok ?
Fatna Bent Ahmed
Nimirou d’la carte ?
B 38 66 30
Le suicide de l’adolescente Amina Filali a mis un coup de projecteur sur l’article 475 du Code pénal. Pourquoi demandez-vous son abrogation ?
L’article 475 permet à quelqu’un qui a détourné un mineur sans usage de la violence d’échapper aux poursuites judiciaires s’il l’épouse. C’est ainsi que la loi absout le détournement de mineur.
Vous avez accusé le ministre de la Justice, Mustafa Ramid, de partialité dans cette affaire. Vous n’y allez pas un peu fort ?
Mustafa Ramid a parlé de consentement d’Amina Filali au moment de son mariage. On ne peut pas être consentante à 15 ans. A cet âge-là, on n’a pas encore la maturité nécessaire. De plus, le ministre de la Justice est en totale contradiction avec le Code de la famille, qui détermine la majorité à 18 ans. Amina était mineure et n’avait donc pas l’âge légal pour prendre la décision de se marier. C’est la loi qui le dit.
On peut aussi vous accuser de ne pas avoir respecté la présomption d’innocence en parlant de violeur et non pas de présumé violeur ?
Le détournement de mineur est un viol ! On n’a pas forcément besoin d’être violent avec une mineure, on peut la menacer ou user de persuasion. Mais cela reste un viol.
Vous êtes très remontée contre le PJD depuis qu’à éclaté le scandale d’Amina Filali…
Nos protestations contre l’article 475 n’ont pas commencé avec l’arrivée du PJD à la tête du gouvernement. Nous organisions déjà des sit-in pour son abrogation quand le ministère de la Femme était tenu par Nouzha Skalli du PPS.
En même temps, avec Bassima Hakkoui, la ministre PJD de la Femme, ce n’est pas le grand amour…
Ce n’est pas à cause de sa couleur politique. Nous déposons des études et des rapports depuis 2006 auprès du gouvernement pour que le Code pénal soit refondé. Bassima Hakkoui demande que l’on “ouvre un débat” sur l’article 475. C’était quand même trop : il est ouvert depuis longtemps le débat ! Sa proposition était surtout une manière de ne pas prendre position.
Et vous attendiez quoi d’elle sachant qu’elle n’est pas connue pour son féminisme ?
Nous connaissions les positions de Bassima Hakkaoui, membre d’un parti conservateur opposé depuis toujours à l’égalité femmes-hommes. Mais nous attendions de la nouvelle ministre de la Femme plus de réactivité, quelle que soit sa formation politique. Car le contexte l’exige. Le gouvernement a la charge de mettre en application la nouvelle Constitution, qui instaure l’égalité entre les hommes et les femmes. Une Constitution pour laquelle le PJD a appelé à voter oui.
Les jeunes, choqués par l’histoire d’Amina Filali, ont utilisé de nouvelles formes de communication, plus modernes que les vôtres : tee-shirts, slogans et formules chocs. L’ancienne militante que vous êtes a-t-elle apprécié la nouveauté ?
Ce n’est pas si nouveau. Nous avions déjà utilisé ce système en 2000, au moment où nous réclamions la réforme de la Moudawana. Cela dit, le concept des tee-shirts dédiés à Amina Filali et la mobilisation sur les réseaux sociaux ont apporté un vrai plus. Les Facebookers et les utilisateurs de Twitter ont été plus performants que nous dans ce domaine. Ils sont jeunes et maîtrisent les nouveaux
outils de communication.
Et au moment de passer à la protestation active, ils ne viennent pas au sit-in pour l’abrogation de l’article 475. Vous vous êtes retrouvés à 300, entre habituées…
Je m’y attendais, je suis rodée (sourire). C’est déjà bien que les gens derrière leur ordinateur s’intéressent à la question. Après, passer du virtuel au concret demande des sacrifices. C’est du temps investi, des déplacements, etc.
Autrefois, vous vous investissiez et vous vous déplaciez non pas pour défendre les femmes mais les lendemains qui chantent…
J’ai été militante à l’UNEM, à l’AMDH et au sein de l’aile gauche de l’USFP. Puis j’ai adhéré aux idées de l’extrême gauche en rejoignant le PADS.
Pourquoi ne vous êtes-vous pas consacrée tout de suite à la cause des femmes ?
J’ai combattu tout d’abord pour les droits de l’homme car c’était une priorité pendant les années de plomb. La question des droits des femmes était secondaire même pour les partis politiques progressistes. L’idée qui prédominait était que les femmes seraient libérées avec l’avènement du socialisme.
Et vous y avez cru, vous, à cet avènement du socialisme qui libèrerait les femmes ?
Non. On nous demandait d’attendre que tout le peuple marocain soit libre avant de se pencher sur la question des femmes. Il y avait tellement d’inégalités que nous avons décidé de nous organiser et de prendre les choses en main. Nous étions plusieurs militantes de gauche à vouloir nous réunir dans une association féministe indépendante des partis politiques, chose qui n’existait pas à l’époque. C’était le seul moyen d’imposer notre combat. C’est ainsi que nous avons créé la Ligue démocratique pour les droits de
la femme (LDDF).
Les hommes que vous avez croisés dans la mouvance de gauche étaient-ils aussi machistes que les autres ?
Ils l’étaient dans leur comportement quotidien, en contradiction totale avec l’égalité qui était inscrite dans les statuts des partis et organisations auxquels ils adhèrent. Il m’est d’ailleurs arrivé de croiser des hommes de droite moins machistes que certains militants de gauche.
Vous vous êtes plainte auprès de la HACA à propos d’un spot télé où des femmes organisent une marche en réclamant leur lessive préférée. Tout ce boucan pour une pub juste “pas inspirée” ?
Cette publicité rabaissait le combat des femmes par son utilisation de l’imaginaire militant. On le banalisait pour vendre de la lessive en montrant une manifestation couverte par une journaliste. Elle était interprétée de surcroît par une comédienne qui présente sur le petit écran une émission sur la famille. C’est cette concomitance d’éléments que nous avons dénoncée car leur assemblage à la télévision renforce les stéréotypes. C’est aussi par la pub que l’on forge les mentalités.
Antécédents :
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1993. Fonde la LDDF 2000. Marche pour la réforme de la Moudawana Mars 2012. Se bat pour l’abrogation de l’article 475 |
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