Contribution libératoire: du rififi entre l’Office des changes et les banques

L'Office des changes qui réclamait les numéros de déclarations de contribuables en infraction, a vu sa demande rejetée par les banques qui sont tenues au secret bancaire.

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Crédit : DR.

Un peu plus de huit mois après avoir déclaré leurs avoirs à l’étranger et bénéficié de l’amnistie, certains déclarants n’ont toujours pas rapatrié leur fonds. Ils avaient jusqu’au 31 janvier 2015 pour le faire, à condition qu’ils aient effectué leur déclaration avant le 31 décembre.  Au vue de cette situation d’infraction par rapport à la réglementation, l’Office des changes a adressé une demande aux banques afin d’avoir connaissance des numéros de déclaration de ces contribuables qui doivent rapatrier  leurs fond de l’étranger  et qui ne l’ont pas fait.  Une demande à laquelle les banques ont répondu par la négative, estimant qu’elle violait le secret bancaire.

« Les banques trouvent que c’est une charge supplémentaire pour elles parce que ce sont des dossiers qui ont été déjà clos. En plus  elles expliquent que l’information ne peut pas directement être tirée du système et qu’elle est de nature à divulguer l’identité des déclarants », nous explique Hicham Brahmi, le directeur de communication de l’Office des changes.

Un avis que partage maître Amin Hajji, un avocat d’affaire dans une interview accordée au quotidien l’Economiste dans son édition du 7 septembre.  « Les banques ne peuvent lever  le secret bancaire sur leurs clients que sur la base d’une requête judiciaire. Sur le plan juridique,  ces administrations, [l’Office des changes ndlr] n’ont pas le droit parce que les règles qui s’appliquent aux contributions libératoire ont été très claires » explique t-il.

Il ajoute que « l’administration peut demander la liste des retardataires aux banques, mais ce serait en violation de tout le dispositif de la contribution libératoire qui garantit l’anonymat ».

Seul le parquet peut l’exiger aux banques

Mais Hicham Brahmi nous rassure que la demande de l’Office des changes  aux banques a été  « faite dans un objectif purement statistique parce qu’il nous fallait réactualiser la valeur des biens déclarés ». « Nous allons tenir une réunion avec le groupement professionnel des banques du Maroc pour trouver un terrain d’entente et aplanir  les difficultés ». ajoute –t-il.

L’avocat d’affaire estime de son côté que « c’est le parquet qui peut requérir  des banques de dévoiler les opérations s’il s’avère qu’elles peuvent faire l’objet d’une enquête pour le compte de l’Etat ».

Quoi qu’il en soit, les retardataires seront sanctionnés, puisque pour bénéficier de l’amnistie, les personnes concernées devaient non seulement déclarer leurs biens avant le 31 décembre 2014 auprès d’une banque,  mais aussi payer la contribution libératoire au taux prévu et ensuite rapatrier les fonds avant le 31 janvier 2015.« A partir du moment où l’une de ces trois conditions n’est pas remplie, on ne peut pas prétendre bénéficier de ce que prévoit l’amnistie. Ces personnes demeurent en infraction par rapport à la réglementation de change et restent dont soumises au texte réglementaire en vigueur », souligne le directeur de communication de l’Office de changes.

Notons également que l’Office des changes avait précisé que les personnes qui viendront se présenter de manière spontanée pourront voir leur situation traitée « à l’amiable ».

Lire  aussi : Amnistie financière: des aménagements pour les retardataires

28 milliards de dirhams déclarés

Pour rappel, l’amnistie financière  introduite par la loi de finances 2014 a permis aux Marocains détenant illégalement des biens, avoirs ou actifs à l’étranger, de réaliser leur déclaration en étant dispensés des sanctions normalement en vigueur. En échange, ils ont dû payer une « contribution libératoire » variant de 2 à 10 % selon la nature des déclarations.

Environ 28 milliards de dirhams ont été déclarés dans le cadre de cette amnistie fiscale, alors que le ministère tablait, lors du lancement de l’opération, sur 5 milliards de dirhams.

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