Le bilan d'Abdelilah Benkirane à la loupe

Quels sont les chantiers sur lesquels le gouvernement a un peu, beaucoup ou pas assez avancé. TelQuel fait le point.

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Abdelilah Benkirane lors de son Grand oral du 8 juillet. Crédit : Rachid Tniouni

Le chef du gouvernement a défendu son bilan pendant près de deux heures devant le parlement, axant sa communication essentiellement sur les réformes économiques et sociales.

La rue est plus calme ? Oui, mais….

Pour Abdelilah Benkirane, le royaume a traversé avec « le minimum de dommages » le « printemps démocratique » mais aussi « l’automne arabe ». Il en veut pour preuve la fin des manifestations du 20-Février et les mouvements de grève qui ne plombent plus le fonctionnement des administrations (Justice, Santé, etc.). « Nous avons repris l’initiative et rendu à l’État son aura (« hiba»). Abdelilah Benkirane peut effectivement l’affirmer, même s’il oublie les chômeurs qui continuent de manière presque hebdomadaire à manifester devant le parlement.

Une presse plus libre ? Faux

Un nouveau Code de la presse sans peine privative de liberté, un Conseil national indépendant, une législation sur la diffamation, et sur la presse électronique. Le chef du gouvernement détaille toutes les mesures sur lesquelles travaille le département de la communication. « Tout cela n’existait pas avant », affirme-t-il. Sauf que Benkirane oublie que tout cela n’existe pas encore… Si le nombre de poursuites judiciaires engagées contre la presse est en baisse, l’année 2013 a tout de même enregistré l’arrestation du journaliste Ali Anouzla, pour apologie du terrorisme. Le directeur de Lakome a passé 40 jours en prison. Un autre journaliste, Mustapha Hasnaoui, se trouve, lui, toujours en prison.

Une protection des droits de la femme? Pas vraiment

"Le travail est un droit de la femme", lit-on sur l'une des pancartes brandies par des parlementaires. Crédit : Rachid Tniouni
« Le travail est un droit de la femme », lit-on sur l’une des pancartes brandies par des parlementaires. Crédit : Rachid Tniouni

A son arrivée au parlement, Abdelilah Benkirane est accueilli par des pancartes « assez d’atteintes contre les droits des femmes ». Tout le monde a encore en mémoire la sortie hasardeuse du chef du gouvernement, qui a qualifié la femme au foyer d’ « astre qui illumine la maison ». La déclaration de Benkirane a provoqué l’ire des militantes féministes qui ont organisé un sit-in de protestation devant le parlement.

Abdelilah Benkirane ne s’est pas longtemps attardé sur les droits des femmes lors de son discours de mi-mandat. Il a rappelé surtout les mesures entreprises par son gouvernement pour davantage d’équité : programme d’alphabétisation destinée aux femmes, réintégration des fillettes en abandon scolaire dans l’école, un meilleur accès aux soins, une nouvelle politique contres la violence et des infrastructures pour améliorer les conditions de vie… Sans surprise, le chef du gouvernement évoque donc davantage l’équité que l’égalité, fidèle en cela avec la ligne politique conservatrice de sa formation. Il réitère tout de même sa promesse d’augmenter la pension perçue par les veuves qui reçoivent toujours une misère de l’État.

Une politique économique courageuse ? Vrai

Abdelilah Benkirane n’est pas peu fier d’avoir réduit les dépenses de la Caisse de compensation. En effet, de 57 milliards de dirhams de dépenses en 2013, le Maroc est passé à 35 milliards cette année, grâce à l’indexation des prix du pétrole sur le marché international. Autres mesures économiques fortes prise par le gouvernement, et qui devraient améliorer la situation financière des entreprises : la réduction des taxes pour les entreprises dont le chiffre d’affaire est inférieur à 300 000 dirhams, la mesure d’amnistie pour les avoirs à l’étranger, qui devrait rapporter à l’État près de 6 milliards de dirhams, le remboursement de la TVA butoir, etc. Le chef du gouvernement revient également sur le plan de sauvetage de l’ONEE ou encore la nécessaire réforme des retraites. Deux mesures qui coûteront cher à l’État (et au contribuable) mais que le gouvernement a tout de même entreprises. « A chaque fois que cela s’avère nécessaire, nous prenons les décisions qui vont dans l’intérêt du pays même et on se fiche du coût politique », affirme Abdelilah Benkirane. Que l’on soit d’accord ou pas avec ces mesures économiques, force est de constater qu’elles sont effectivement courageuses.

 Un bilan social encourageant? Oui, mais…

« Plus aucun fonctionnaire ne touchera moins de 3 000 dirhams », se félicite Abdelilah Benkirane, qui met en avant les hausses de salaires obtenues dans la fonction publique, mais aussi en négociant avec le secteur privé. Si ces augmentations restent sommes toutes relatives, dans la mesure ou le coût de la vie est lui en hausse, il y a une mesure sociale en particulier dont Abdelilah Benkirane est particulièrement satisfait. Il s’agit de la baisse du prix des médicaments. « Le prix de 320 médicaments a baissé en 2012 et 1 250 en 2014. La baisse est située entre 20 et 80%, et concerne essentiellement les traitements pour des maladies chroniques », explique-t-il.

Pour d’autres secteurs, pourtant vitaux, tels que l’éducation et l’emploi, l’État a plus de difficulté à trouver des solutions. La question du chômage, qui concerne pourtant près de 30% des jeunes Marocains, n’a été évoquée que rapidement par le chef du gouvernement qui compte sur le tissu privé et des formations plus en adéquation avec le marché du travail pour en atténuer l’impact.

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  • Mr Benkirane oublie les mauvais classements du Maroc ! liberttè de presse 136: RSF – pour la liberté d expression Freedom house classe le Maroc 147e , le Mali 47e , la Mauritanie ,et le Sènègale 95e – L endettement qui atteint 69,2 milliards de dollars !
    la loi contre la corruption laissée de côté l extrême pauvreté dans les compagnes _ le Hiba et la stabilité obtenue par : la répression des manifestations; 339 dètenus politiques, la torture qui sévit , l impunité assurée pour les bourreaux ! l insécurité galopante notamment Tcharmil (entailler la chair humaine) et l image d un pays qui pratique la prédation économique et la répression politique pointé des doigts par les ONG –
    Benkirane reçoit les directives ! mais en rajoute par zèle !!

  • Comme tout les conservateurs, ils ne cassent pas le cul a travailler comment répartir équitablement les richesses, les riches payent toujours moins d’impot et échappe facilement au fisc alors que les petits se font choper par la gorge, par le fisc.. il se contente de faire dans l’ultra-libéralisme (a part l’augmentation du smic, qui ne veut rien dire vu qu’au maroc il n’ y a pas d’inspection du travail digne de ce nom, qui puissent veiller a ce que les travailleurs sois tous payé au smig, le smic avoisine maintenant les 2000dh mais il est bien facile de trouver des gens qui sont payé moins que ca…bref, du populisme.)