Classement 2024 : RSF s’inquiète de pressions politiques sur les médias et de propagande accrue

Les pressions politiques sur la presse augmentent dans le monde alors même que la moitié de la planète vote cette année, alerte Reporters sans frontières (RSF) dans son classement 2024 publié vendredi.

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La Norvège reste en tête de ce 22e classement de la liberté de la presse, tandis que l’Érythrée arrive en dernière position, 180e, après la Corée du Nord les deux années précédentes.

Le Maroc a gagné quelques places, passant de la 144e position en 2023 à la 129e en 2024. Si le Royaume augmente notamment ses indicateurs politique (119e place en 2024 contre 151e en 2023), économique (135e contre 164e), législatif (128e contre 129e) et sécuritaire (123e contre 139e), il diminue son indicateur social (125e contre 117e).

Globalement, les conditions d’exercice du journalisme sont mauvaises dans les trois quarts des pays du monde.

L’autonomie des médias en question

L’ONG dénonce en particulier l’“absence manifeste de volonté politique de la communauté internationale à faire appliquer les principes de protection des journalistes” à Gaza. Plus de 100 reporters palestiniens ont été tués par l’armée israélienne, dont au moins 22 dans l’exercice de leurs fonctions, rappelle RSF.

Plus largement, cette édition 2024 met en exergue une moindre protection du journalisme par les États, quand ce n’est pas un rôle actif de ceux-ci dans la désinformation.

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RSF pointe ainsi “une détérioration préoccupante du soutien et du respect de l’autonomie des médias”, alors que “2024 est la plus grande année électorale de l’histoire mondiale”. Près de la moitié de la population est concernée par au moins un scrutin, de l’Inde aux États-Unis en passant par les élections européennes, ce qui laisse présager de nouvelles “pressions très fortes”.

En Argentine (66e, -26 places), le nouveau président ultralibéral Javier Milei a annoncé en mars la fermeture de l’agence de presse publique Télam, qu’il accuse de “propagande”. “La situation est particulièrement inquiétante” dans ce pays dirigé par un des “prédateurs revendiqués de la liberté de la presse”, alerte l’ONG.

Au Sahel, les juntes qui ont pris le pouvoir au Niger (80e), au Burkina (86e) et au Mali (114e) “ne cessent de resserrer leur emprise sur les médias et d’entraver le travail des journalistes”, estime-t-elle.

Le contrôle des réseaux sociaux et d’internet est très poussé au Vietnam (174e) et en Chine (172e), un pays qui, en plus d’emprisonner le plus grand nombre de journalistes au monde, pratique censure et surveillance.

À l’est de l’Europe et en Asie centrale également, “les censures de médias se sont intensifiées, dans un mimétisme spectaculaire des actes de répression russes”, observent les spécialistes de RSF, citant le Bélarus (167e), la Géorgie (103e), le Kirghizistan (120e) et l’Azerbaïdjan (164e). La Russie, où Vladimir Poutine a été réélu en mars, se classe 162e.

L’intelligence artificielle, nouvel outil de désinformation

De plus, l’arsenal de la désinformation s’est enrichi de l’intelligence artificielle générative. En témoigne un “deepfake” audio (montage perfectionné) dont a été victime la journaliste Monika Todova en Slovaquie (29e, -12 places) avant les législatives à l’automne dernier. Un contenu qui a “clairement profité à la désinformation pro-russe qui sévit dans le pays”, d’après RSF.

Ailleurs en Europe, la liberté de la presse est “éprouvée par les majorités au pouvoir en Hongrie, à Malte et en Grèce”.

Dans plus des trois quarts des pays du monde est relevée une implication régulière des acteurs politiques dans les campagnes de propagande ou de désinformation. Cette implication est qualifiée de “systématique” dans 31 pays.

Les reculs les plus importants en matière de liberté de la presse s’observent en Afghanistan sous l’empire des talibans (178e, -26 places), au Togo (113e, -43) et encore en Équateur (110e, -30).

À l’inverse, la situation s’améliore au Chili (52e, +31), au Brésil (82e, +10) et en Pologne (47e, +10). “La volonté politique peut permettre de meilleures garanties” pour les médias, souligne Anne Bocandé. L’association propose des mesures concrètes à chaque échéance électorale.

Ce classement est réalisé sur la base “d’un relevé quantitatif des exactions commises envers les journalistes” d’une part et “d’une étude qualitative” de l’autre. Cette dernière se fonde “sur les réponses de centaines d’experts de la liberté de la presse (journalistes, universitaires, défenseurs des droits humains) à une centaine de questions”.

(avec AFP)