Exposition : entre Mohamed Melehi et Loft Art Gallery, plus de 10 ans de collaboration

Quatorze expositions, dix années de collaboration. Entre la Loft Art Gallery à Casablanca et Mohamed Melehi, toute une histoire sur laquelle les galeristes Myriem et Yasmine Berrada Sounni reviennent dans une exposition-hommage à l’artiste, du 8 décembre au 18 janvier.

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"Melehi à Loft Art Gallery 2009-2020", du 8 décembre au 18 janvier à Casablanca. Crédit: Loft Art Gallery

Melehi ? C’est une lumière polaire en constante réverbération dans la suprématie de plus en plus évidente de nos temps crépusculaires.” La phrase du poète Mostafa Nissabouri ouvre le catalogue de cette exposition-hommage à l’un des plus grands artistes marocains, disparu le 28 octobre 2020.

“Melehi à Loft Art Gallery 2009-2020” revient, du 8 décembre au 18 janvier, sur plus d’une dizaine d’années de collaboration entre Mohamed Melehi et la galerie Loft, une collaboration qui a débuté avec l’ouverture de la galerie en 2009. Une manière pour les galeristes Myriem et Yasmine Berrada Sounni de partager leur expérience, et de présenter des œuvres sélectionnées.

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Il ne s’agit pas de faire une rétrospective, mais plutôt de raconter l’histoire de la complicité entre un artiste et sa galerie, et de témoigner humblement de notre grande admiration pour l’artiste et pour l’homme qui a si bien marqué toutes les époques de sa carrière artistique”, tient à préciser Myriem Berrada Sounni. Et à Yasmine d’inviter le public à “contempler ensemble les dix dernières années d’expositions de Melehi, à travers le recueil de ses propos avertis et éveillés, pour admirer l’œuvre de cet artiste mûr, une force de la nature lui-même, à l’apogée de son parcours artistique”.

Résolument contemporain

Il m’arrive de penser qu’on ne s’est pas encore suffisamment arrêté sur sa dernière décennie, pour prendre le temps de regarder l’évolution de son œuvre et combien ses propos étaient dans l’air du temps, estime Yasmine Berrada Sounni. En quoi étaient-ils importants ? Comment raisonnent-ils dans son discours premier et comment subliment-ils la genèse de son travail ? Il traitait ses sujets — les catastrophes climatiques en flammes, le corps féminin en courbes, les astres, les arbres et les ondes, bref, la force de notre monde naturel — de manière si précise, si avant-gardiste, engagée et sincère. Comment les expositions de ces dix dernières années illustrent une nouvelle fois le pouvoir de son œuvre ? Intemporel et résolument contemporain…

À travers la dernière décennie, Melehi se préoccupait de l’avenir de la planète, en déployant son propre langage visuel pour affronter les enjeux du changement climatique. Il s’est exprimé à propos d’un nouveau départ dans sa mobilisation et dans son art : “C’est ce qui constitue aujourd’hui l’essentiel de ma réflexion qui est par ailleurs devenue une préoccupation majeure sur le plan international : quel est le devenir de notre planète, voire le destin de l’humanité ? Une exposition sur le climat ne m’aurait jamais traversé l’esprit dans les années 1950 ou 1960, car notre combat était différent ; il était surtout d’ordre social et politique en parallèle avec nos préoccupations plastiques et professionnelles”, disait-il en 2019.

Dans la revue Souffles, le poète Mostafa Nissabouri disait de Melehi : “Et plus que chez aucun autre artiste… on se doutait vite que la peinture pour lui — sinon l’art en général — était indissociable d’une vision globale de la modernité, non pas ailleurs, mais ici et maintenant.

Yasmine Berrada Sounni confirme cet aspect visionnaire : “Il abordait la vie par instinct, un visionnaire qui puisait dans sa sensibilité et une forte introspection. Très inspiré par le soufisme et le zen, Melehi était tout d’abord en accord avec lui-même, donc capable de recevoir les messages, les fulgurances.”

Courage, sensibilité et audace, résume Myriem Berrada Sounni. Ces vertus font de Melehi une légende, une force tranquille dans le monde de l’art. Pour nous, il s’est montré complice, une sorte de mentor, plein de générosité, toujours impliqué de près ou de loin dans l’évolution de la galerie.