Cybercriminalité : le père du Français Sébastien Raoult, incarcéré au Maroc, déplore le “mutisme” de Paris

Le père de Sébastien Raoult, un ex-étudiant français incarcéré au Maroc et menacé d’extradition aux États-Unis qui l’accusent de cybercriminalité, a déploré dans un entretien à l’AFP à Rabat “le silence et le mutisme” des autorités françaises.

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Paul Raoult, le père de Sébastien, et son avocat Philippe Ohayon en conférence de presse à Paris le 2 août 2022. Crédit: Bertrand Guay / AFP

Paul Raoult et son épouse ont pu rendre visite pour la première fois mardi et mercredi à leur fils détenu depuis le 2 juin à la prison de Tiflet 2, près de Rabat. “Physiquement, il va bien, visiblement il mange bien. Son état mental est toujours aussi fort. Il ne se laisse pas du tout abattre, il est dans un bon état d’esprit”, a déclaré M. Raoult à l’AFP mercredi.

“On l’a vu une bonne demi-heure à chaque fois, hier et ce matin, dans un parloir aménagé”, a ajouté le père qui a été reçu avec son épouse “pendant plus de deux heures” mardi au consulat général de France à Rabat.

Sébastien Raoult est accusé par la justice américaine de “complot en vue de commettre fraude et abus électronique”, “vol d’identité grave”, et d’être un membre des “ShinyHunters”, groupe de “cybercriminels” soupçonnés par la justice américaine d’être derrière des cyberattaques d’entreprises. Parmi les victimes figurerait Github, propriété du géant américain de l’informatique Microsoft, selon des experts interrogés par l’AFP.

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Les autorités américaines réclament l’extradition de l’ex-étudiant en informatique âgé de 21 ans, originaire d’Épinal (est de la France). Il a été arrêté le 31 mai à Tanger (nord du Maroc) sur la base d’une notice rouge émise par Interpol à la demande de la justice américaine, alors qu’il s’apprêtait à prendre l’avion pour rentrer en France.

Depuis son incarcération au Maroc, Sébastien Raoult a bénéficié de quatre visites consulaires. Il dispose d’un lit et partage une cellule avec sept codétenus. Mais son père assure n’avoir “à ce jour toujours aucune nouvelle, aucune information d’aucun ministère en France”. “Tous gardent un silence et un mutisme à notre égard”, regrette-t-il après avoir écrit au président français, Emmanuel Macron, à la Première ministre Elisabeth Borne et aux ministères de la Justice et des Affaires étrangères.

Début août, le ministre français de la Justice, Eric Dupond-Moretti, a indiqué ne pas avoir “la possibilité, à ce stade, d’intervenir” dans cette affaire. La Cour de cassation du Maroc a émis en août un “avis favorable” à cette extradition, mais son sort est entre les mains du Premier ministre marocain qui doit donner son feu vert à son éventuel transfèrement.

Aux États-Unis, l’ex-étudiant risque jusqu’à 116 ans de prison s’il est reconnu coupable, selon l’avocat du jeune homme, Me Philippe Ohayon, qui veut, comme Paul Raoult, obtenir son transfèrement en France.

Domicilié chez ses parents à Épinal, le jeune homme était en deuxième année d’études d’informatique quand il a arrêté sa formation en décembre 2021, selon sa famille.

“J’aimerais bien que la France fasse entendre sa voix et sa souveraineté par rapport à des faits qui se sont passés en France et non en Amérique, par rapport à la disproportionnalité de la peine encourue”, argue M. Raoult.

“Je ne dis pas que mon fils est innocent, je ne sais pas et aujourd’hui là n’est pas la question. Ce sera à un juge français de dire s’il est coupable ou s’il est innocent ou non”, a estimé M. Raoult. “La question est de savoir comment la France se débrouille pour le faire revenir ? Comment la France protège-t-elle ses ressortissants ?”

“Il faut vraiment que toute la lumière soit faite sur cette affaire, que l’on en tire les conclusions de manière à ce que plus jamais aucun ressortissant français ne se retrouve dans cette situation d’être complètement abandonné par son pays”, plaide Paul Raoult.

(avec AFP)