Les opérateurs du bâtiment à Akhannouch : “Sauvez-nous !”

Frappé de plein fouet par l’inflation galopante et traînant encore les séquelles de la crise Covid, le secteur du bâtiment, en pleine agonie, adresse un SOS à Aziz Akhannouch.

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chantier BTP
Yassine Toumi / TelQuel

L’année 2022 n’aura finalement pas été celle du rebond. Même si, pour le moment, la parenthèse Covid est dans le rétroviseur. D’autres aléas négatifs sont venus assombrir les perspectives d’une relance durable de l’économie. Sécheresse, conflit en Ukraine, les facteurs d’instabilité ne manquent pas et leurs répercussions sur les citoyens et les acteurs économiques sont palpables.

Ainsi, les tensions inflationnistes, symptôme principal de l’instabilité du contexte géopolitique, taillent des croupières dans le pouvoir d’achat des Marocains et fragilisent le business modèle des secteurs entiers dont les intrants flambent, bouleversant chaînes de productions et flux logistiques.

BTP à l’agonie

Il en est ainsi d’une véritable locomotive de l’économie : le secteur du bâtiment, deuxième créateur d’emplois du pays après l’agriculture, et un poids dans la création de valeur ajoutée estimé à 20 % du PIB. Dans un courrier adressé au chef du gouvernement et dont TelQuel détient copie, le président de la Fédération nationale du bâtiment et des travaux publics (FNBTP), El Mouloudi Benhamane, brosse un tableau noir de la situation des opérateurs.

Jusqu’à ce jour, nos entreprises n’ont bénéficié d’aucun concours de la part de l’État et sont laissées à elles-mêmes dans cette situation catastrophique”

El Mouloudi Benhamane, président de la FNBTP

“Les entreprises du BTP, déplore-t-il, font face aujourd’hui à une crise inédite liée principalement au contexte inflationniste actuel, marqué par l’ascension sans précédent des prix des matières premières, des coûts du transport, matériel de construction, entraînant des coûts de production et la perturbation de la gestion des projets BTP.”

Datée du 11 mars, la lettre de la FNBTP à Aziz Akhannouch fait état de l’extrême vulnérabilité des opérateurs dans une année “éprouvante” qui aura siphonné l’essentiel de leur trésorerie et provoqué une “chute vertigineuse de leur activité”. Le verdict de Benhamane est sans appel : “La majorité des entreprises se trouvent dans l’impossibilité d’honorer leurs engagements vis-à-vis des banques et des fournisseurs.”

Le président de la FNBTP rappelle en outre que les entreprises de son secteur, à l’inverse des acteurs du tourisme et plus récemment des transporteurs, n’ont jamais bénéficié du soutien de l’État sous quelque forme que ce soit. “Jusqu’à ce jour, nos entreprises n’ont bénéficié d’aucun concours de la part de l’État et sont laissées à elles-mêmes dans cette situation catastrophique qui présage de la disparition de la majorité d’entre elles si aucune mesure de soutien n’est prise”, alerte Benhamane.

Une aide d’urgence

Pour sortir de l’ornière, ce dernier propose au chef de l’Exécutif une batterie de dispositions à prendre d’urgence.

Première mesure : juguler cette hausse continue des prix des matières ou, si cela n’est pas possible, “accorder des aides à l’entreprise pour pallier ce phénomène qui relève du cas de force majeure”. Seconde proposition de la FNBTP : “amener les maîtres d’ouvrage à plus de flexibilité en vue de mettre en place un système de révision des prix spécial et ponctuel” qui serait conforme à la conjoncture actuelle.

Dans la même veine, il est proposé d’instruire les maîtres d’ouvrage, d’annuler toutes les actions “coercitives” à l’encontre des entreprises du BTP, du type mise en demeure, résiliation avant délai des contrats ou autres confiscations des cautions.

Sur le volet financier : les acteurs du bâtiment, fortement déstabilisés, réclament des banques un report de 24 mois du paiement des échéances de remboursement des crédits “Relance” et “Oxygène”, accordés en 2020 afin d’atténuer les effets du confinement sur l’activité.

Plus globalement, les représentants du bâtiment demandent à Aziz Akhannouch de peser sur les banques afin que celles-ci “allègent les conditions et les procédures à l’octroi de crédits” destinés aux entreprises du secteur.

En conclusion, El Mouloudi Benhamane implore le chef du gouvernement d’“alléger les souffrances des entreprises et de permettre la sauvegarde du secteur du BTP, pilier principal du tissu de l’économie national”, peut-on lire dans le courrier.

Jusqu’ici, aucune aide au secteur du bâtiment n’a été annoncée officiellement.