Le crowdfunding au Maroc face à la méfiance des institutions bancaires

Sarah Jaidi, co-fondatrice de Kiwi Collecte. Crédit: DR

Tout est prêt pour le démarrage du crowfunding au Maroc. Il ne manque que la connexion avec l’écosystème bancaire. Radioscopie de cette nouvelle forme de financement collectif avec Sarah Jaidi, la co-fondatrice de Kiwi Collecte, l’une des plateformes agréées par Bank Al-Maghrib.

L’adoption de la loi 15-18 a marqué un tournant dans le déploiement du dispositif de crowdfunding au Maroc. L’arsenal juridique est-il aujourd’hui bouclé pour permettre le démarrage effectif de cette activité innovante ?

Sarah Jaidi : Le crowdfunding est une activité nouvelle au Maroc avec un arsenal réglementaire qui lui est propre, notamment la loi 15-18 qui date de 2021 et les différents textes applicatifs qui encadrent l’activité. Après une longue période de travaux et d’attente pour les acteurs de cet écosystème naissant, tous les textes ont été promulgués et les agréments octroyés par Bank Al-Maghrib à des opérateurs, dont notre entreprise Kiwi Collecte.

Marché embryonnaire, quelles sont les niches à fort potentiel pour le développement du crowdfunding au Maroc ?

Pour Kiwi Collecte, notre focus est sur quatre niches à fort potentiel : la solidarité, le sport, la culture, la santé. Il s’agit de faire financer des initiatives par des porteurs de projets brillants et par des communautés de personnes touchées par le projet. Et ce, qu’il s’agisse d’un petit projet ou d’une collecte de grande ampleur. Le défi est de faire jouer la magie du collectif pour créer de l’impact.

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Notre rôle est de contrôler en amont les projets soumis au financement pour garantir qu’il s’agit de dossiers viables et vérifiés.

En tant que start-up sur une nouvelle niche, quel est votre modèle économique pour garantir la viabilité de votre entreprise ?

Notre modèle économique est basé sur une offre de collecte de dons en ligne. Ces collectes seront sous forme de campagnes délimitées dans le temps en fonction d’un objectif attendu. Chaque campagne est vérifiée en amont de notre part sur les thématiques traditionnelles de don (solidarité, études, santé), mais aussi les campagnes de financement d’initiatives à fort impact pour des TPE & PME ou des projets culturels ou sportifs.

Par conséquent, notre modèle économique, loin de toute logique de profitabilité à court terme, se veut simple et le plus encourageant pour les donateurs avec des frais les plus bas possibles. L’enjeu est de viabiliser la plateforme avec un maximum de projets financés, d’autant plus que nous dépendons totalement des frais bancaires et de paiement que nous paierons en tant que plateforme pour la faire fonctionner.

Au-delà des défis de viabilité de ce modèle économique, quelles sont, selon vous, les chances d’adoption du crowdfunding au Maroc ?

Sur le volet don du crowdfunding, le terrain est fertile au Maroc. Les initiatives solidaires sont dans l’ADN des Marocains. Le défi est de mettre à profit la puissance du digital, du marketing et de la communication sur les réseaux sociaux au bénéfice non pas seulement de nouveaux business, mais aussi pour financer du social et rafraîchir le sens de ce terme qui est trop souvent opposé au monde économique.

Concrètement, après l’agrément de la Banque centrale, c’est pour quand le démarrage de votre plateforme ?

Tout est prêt de notre côté. La régulation, la plateforme, les premiers projets et la communication. Mais après deux ans de travaux, nous en sommes encore à devoir convaincre l’écosystème de la Fintech, à savoir les banques et le paiement, de l’intérêt économique et de la sécurité d’une telle activité, agréée, d’ailleurs, par Bank Al-Maghrib.

Presque tous les feux sont au vert, mais nous regrettons que l’écosystème bancaire soit toujours méfiant et tarde à suivre, à l’heure où tout le monde appelle de ses vœux l’éclosion de la Fintech au Maroc.