Agropoles : l’avenir de l’agro-industrie ?

Si l’industrie agroalimentaire marocaine se porte bien, son développement – et notamment celui de ses exportations – est confronté à des défis majeurs. Et si les agropoles étaient la solution ?

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L’industrie agroalimentaire marocaine, l’une des clés de voûte de l’économie nationale, génère 30 milliards de DH (MMDH) en valeur ajoutée, soit 26% du PIB industriel, et emploie plus de 150 000 personnes. Enregistrant une croissance moyenne de 6% par an, l’agroalimentaire représente près de 5% du PIB national, ce qui en fait le deuxième secteur industriel du pays (derrière l’automobile).

Mais ce dernier fait face à des défis majeurs, notamment l’insuffisance de l’offre exportable et un cadre réglementaire et fiscal contraignant. Son orientation principale reste le marché domestique : 12% de la production est exporté, pour une valeur de 1,7 milliard de dollars. Les exportations agroalimentaires ont même légèrement décru en 2023. Ce qui montre la nécessité de mieux valoriser les produits agricoles pour favoriser leur exportation.

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Plus de technologie pour les petits producteurs

Les agropoles regroupent au sein d’une même zone des entreprises, des centres de recherche et des organismes de formation liés à l’agriculture, la transformation alimentaire et la distribution

Pour ce faire, l’une des pistes est le développement des agropoles, qui regroupent au sein d’une même zone des entreprises, des centres de recherche et des organismes de formation liés à l’agriculture, la transformation alimentaire et la distribution. Ainsi, le Plan Maroc Vert (lancé en 2008) a engagé des investissements pour établir sept agropoles stratégiques dans les principales zones de production du pays.

Les agropoles de Meknès, Berkane, du Tadla et du Souss sont déjà opérationnels. Cependant, les projets dans le Haouz, Gharb et Loukkos font face à des retards dus principalement à des complications dans les études techniques et les acquisitions foncières.

Pourtant, Salma Kabbaj, cofondatrice et directrice générale d’Impact Lab (un accélérateur de startups), souligne l’importance de développer ces agropoles, qui permettent d’intégrer les petites exploitations dans le tissu économique national : “70% des exploitations marocaines ont moins de 5 hectares. Il est donc crucial que les agropoles jouent un rôle de sensibilisation et d’accessibilité technologique pour ces petits agriculteurs”.

“70% des exploitations marocaines ont moins de 5 hectares. Il est donc crucial que les agropoles jouent un rôle de sensibilisation et d’accessibilité technologique pour ces petits agriculteurs”

Salma Kabbaj, cofondatrice et directrice générale d’Impact Lab

L’experte met en lumière le rôle des technologies basées sur les données dans l’amélioration de la gestion des ressources naturelles. “En optimisant l’utilisation de l’eau et des intrants, ces innovations permettent une réponse plus précise aux besoins des cultures, ce qui contribue ainsi à la durabilité de l’agriculture marocaine”, explique-t-elle. Pour Salma Kabbaj, ces technologies offrent une solution au défi persistant du stress hydrique et à la nécessité de préserver les sols pour les générations futures.

Ouvrir la voie aux agritech

Or, “la principale barrière à l’innovation dans l’agro-industrie marocaine réside dans la difficulté d’accès au marché pour les startups agritech”, précise la CEO d’Impact Lab. Elle pointe du doigt les obstacles rencontrés par les jeunes entreprises innovantes, notamment les différences de mentalités et les processus décisionnels rigides qui entravent la collaboration avec les acteurs établis du secteur.

“Cette démarche de co-construction, cruciale pour tester et adapter des solutions innovantes, est malheureusement entravée par un manque de synergie entre les startups et les grandes entreprises”, regrette-t-elle. Elle appelle donc à une action concertée pour fournir aux petites exploitations agricoles la formation nécessaire et des options de financement adaptées qui leur permettraient de bénéficier des avancées technologiques.

Certes, de nombreuses initiatives ont été lancées et sont appuyées par le ministère de l’Agriculture, ou par des entreprises privées. Salma Kabbaj souligne cependant le besoin d’une stratégie plus coordonnée et de mesures incitatives, comme des crédits d’impôt, pour encourager une collaboration fructueuse entre les grandes entreprises, les startups, et les agriculteurs.

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