Engie positionné dans les starting-blocks, à horizon 2030-2035

La publication de la circulaire du Chef du gouvernement présentant l’“Offre Maroc” a créé de l’effervescence chez les investisseurs. Loïc Jaegert-Huber, DG Afrique du Nord d’Engie, décrypte la feuille de route que l’énergéticien français va décliner dans l’hydrogène vert dans le royaume.

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Le développement des énergies renouvelables au Maroc est un atout pour la production d’hydrogène vert. Crédit: DR

En quoi consiste votre projet dans l’hydrogène vert au Maroc ?

Loïc Jaegert-Hubert

Le groupe Engie, qui est déjà un acteur mondial de la transition énergétique, s’est positionné très tôt comme un leader dans le domaine de l’hydrogène renouvelable et bas carbone, ainsi que des e-molécules dérivées. Nous développons actuellement quelques dizaines de projets d’hydrogène renouvelable dans une dizaine de pays, dont la moitié est dédiée à la production.

Engie est présent sur l’ensemble de la chaîne de valeur de l’hydrogène, de la production au stockage, de la distribution au transport. Notre approche globale permettra non seulement aux clients des secteurs de l’industrie et de la mobilité d’atteindre leurs objectifs de neutralité carbone, mais aussi de fournir un ensemble de solutions modulables et reproductibles.

En parallèle et en toute complémentarité, nous étudions le potentiel marocain en hydrogène blanc, l’hydrogène naturel présent dans le sous-sol. Cette stratégie est une autre face de l’engagement d’Engie au Maroc, notamment pour lui permettre d’atteindre ses objectifs de décarbonation.

Quels sont vos objectifs à moyen terme sur le marché marocain ?

Les objectifs d’Engie dans l’hydrogène renouvelable à moyen terme (horizon 2030-2035) au Maroc incluent le développement d’un hub renouvelable à grande échelle, combinant énergie éolienne et solaire avec la production d’hydrogène par électrolyse et la conversion en ammoniaque ; le tout avec des coûts compétitifs et un écosystème d’acheteurs pour assurer un marché fiable à l’exportation, tout en développant les besoins du marché intérieur. L’accent devra être mis sur l’infrastructure, la localisation stratégique, et la création d’un écosystème solide pour le succès à long terme du projet.

Pour cette filière naissante, quels seraient, à votre avis, les facteurs-clés de sa compétitivité ?

Atteindre la neutralité carbone, notamment grâce à l’hydrogène renouvelable, nécessite en effet des efforts sans précédent. Le Maroc y a néanmoins tout intérêt, puisque la décarbonation représente une opportunité de croissance économique majeure, tout comme un levier d’attractivité et de compétitivité.

Une capacité de production élevée permettra de bénéficier d’économies d’échelle, réduisant ainsi les coûts unitaires. Cela implique une infrastructure robuste, une utilisation optimale des équipements et une demande soutenue.

“Parmi les nombreux défis encore à surmonter dans le domaine de l’hydrogène renouvelable, le Maroc doit avant tout développer une filière industrielle adaptée à la production, au transport et au stockage”

Loïc Jaegert-Huber, DG Afrique du Nord d’Engie

Parmi les nombreux défis encore à surmonter dans le domaine de l’hydrogène renouvelable, le Maroc doit avant tout développer une filière industrielle adaptée à la production, au transport et au stockage. Le développement de l’ensemble de la chaîne de valeur nécessite la sécurisation de financements compétitifs et de grande ampleur : le soutien public sera ainsi essentiel, au moins dans un premier temps.

Plus largement, il reste prioritaire d’actualiser le cadre réglementaire, de renforcer le réseau électrique, et de développer la production privée d’énergie renouvelable. Nous y travaillons avec les autorités et les autres acteurs du secteur. En résumé, la compétitivité de la filière dépend de la disponibilité de sources d’énergie renouvelable compétitives, de la réalisation d’une masse critique dans la production, et des progrès technologiques pour réduire les coûts de manière significative.

Comptez-vous vous appuyer sur des partenariats locaux ?

Nous sommes présents au Maroc depuis plus d’un siècle et avons l’habitude de travailler avec des partenaires locaux. Par exemple, notre parc éolien de Tarfaya, actuellement en opération, ou notre usine de dessalement en cours de construction à Dakhla, se font avec notre partenaire historique Nareva.

Ces collaborations avec des partenaires expérimentés renforcent notre capacité à naviguer dans le marché local et à partager les risques industriels associés à ce type de projets complexes. Ainsi, de nombreuses discussions sont en cours, y compris au sein de l’excellent Cluster Green H2.

 

Le royaume tiendrait 4% du marché mondial

Le Maroc pourrait produire jusqu’à 9 millions de tonnes d’hydrogène renouvelable par an d’ici 2050, représentant potentiellement 4% du marché mondial, selon une étude publiée en août 2023 par le cabinet Deloitte. Le royaume envisage de devenir un hub énergétique majeur, exploitant son énorme potentiel en hydrogène renouvelable pour ouvrir des opportunités d’exportation.

L’“Offre Maroc” prévoit d’allouer une grande partie, plus de 70%, de la future production d’hydrogène à l’exportation vers l’Europe. Cependant, il est à souligner que l’hydrogène renouvelable produit au Maroc doit également répondre aux besoins nationaux.

Engie travaille sur un système multi-usages et multi-secteurs pour satisfaire une demande domestique estimée à 4 TWh d’ici 2030. L’exportation oui, mais pas au détriment du besoin local.