Après la visite de Benny Gantz au Maroc, l'Algérie se dit “visée” par l'axe Rabat-Tel-Aviv

La visite du ministre israélien de la Défense à Rabat a provoqué une première réaction officielle à Alger. Salah Goudjil, le président du Conseil de la nation, a indiqué qu'avec le voyage de deux jours de Benny Gantz et la signature d'un accord de défense Maroc-Israël, son pays est directement “visé”.

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Le président par intérim du Sénat algérien Salah Goudjil à Alger, le 28 décembre 2020. Crédit: RYAD KRAMDI/AFP

Jusqu’ici, les réactions algériennes à la visite au Maroc de Benny Gantz étaient portées par les réseaux sociaux et la presse locale à coups d’éditos ou via des paroles d’experts en tout genre.

Désormais le déplacement de deux jours du ministre israélien de la Défense a fait réagir l’Algérie officielle avec la déclaration de Salah Goudjil, le président du Conseil de la nation. Deuxième personnage dans l’ordre protocolaire algérien, il s’est exprimé en marge de l’adoption de la Loi de Finances 2022 au sein de la chambre haute du parlement.

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Pour Salah Goudjil, à la place de Benny Gantz, si le Maroc avait reçu la visite d’un ministre israélien du Tourisme ou de l’Economie, cela aurait pu être interprété “comme entrant dans le cadre des relations déjà en place, bien que dissimulées » entre les deux pays, a-t-il déclaré à l’APS, l’agence de presse officielle algérienne. “Mais dès lors qu’il s’agit de la visite du ministre de la Défense de cette entité au Maroc, c’est l’Algérie qui est visée”, assure Salah Goudjil.

La déclaration intervient au moment où Benny Gantz achevait un voyage officiel de deux jours à Rabat. “Historique” et “importante” selon l’hôte israélien, cette visite a été marquée par la signature du premier accord militaire liant le Maroc à Israël. Outre la collaboration dans le renseignement, l’industrie militaire et la formation, le texte offre aussi un cadre juridique et légal aux ventes d’armes de l’Etat hébreu au royaume. C’est une première avec un pays arabe.

Abdellatif Loudiyi, ministre délégué auprès du chef du gouvernement, chargé de l’administration de la Défense nationale, et son homologue israélien Benny Gantz.Crédit: DR

À Alger, ce rapprochement est mal vu. “Les ennemis se mobilisent de plus en plus pour porter atteinte à l’Algérie. Aujourd’hui, les choses sont claires avec la visite du ministre de la Défense [israélien] au Maroc, après celle effectuée par le ministre des Affaires étrangères (…). Ce dernier avait menacé l’Algérie à partir du Maroc et il n’y a eu aucune réaction du gouvernement marocain”, rappelle avec véhémence Salah Goudjil.

Le président de la chambre haute algérienne fait allusion à la visite en août dernier de Yaïr Lapid, le chef de la diplomatie israélienne. Cette dernière avait permis au Maroc, qui a normalisé ses relations avec Israël en décembre 2020, d’enrichir la coopération bilatérale de plusieurs accords dans les domaines de l’aviation, de la culture, des sports, de l’eau et de la finance. Avec la visite de Benny Gantz, les deux pays ont étendu leur coopération au domaine très stratégique de la Défense.

Au cours de son voyage officiel, le ministre israélien de la Défense a rencontré Abdellatif Loudiyi, son homologue marocain, avant d’être reçu en audience par Nasser Bourita, le ministre des Affaires étrangères. Avec deux généraux israéliens d’origine marocaine présents dans sa délégation, Benny Gantz a rencontré Belkhir El Farouk, l’inspecteur général des FAR avant de visiter l’unité des parachutistes de l’armée marocaine à Salé.

Une alliance maroco-israélienne qui dépasse le cadre des livraisons d’armes annoncées et ouvre le champ à des perspectives de collaboration notamment dans le développement industriel militaire et des exercices conjoints entre les FAR et Tsahal, les forces de défense et de sécurité israéliennes.