Helena Maleno est fondatrice de l’ONG espagnole Caminando Fronteras, qui vient en aide aux migrants en difficulté en permettant aux secours de les localiser au large des côtes espagnoles. Au cours d’une conférence de presse à Madrid, la militante de 50 ans a affirmé que les autorités marocaines l’avaient empêchée de rentrer le 23 janvier dans le pays, où elle vit depuis près de 20 ans, et l’avaient fait monter dans un avion pour Barcelone depuis Tanger, la séparant de sa fille de 14 ans plus d’un mois.
“La police m’attendait à l’aéroport de Tanger, je ne savais pas ce qui se passait”, a-t-elle raconté à la presse, affirmant que ses papiers lui avaient été confisqués et qu’on l’avait empêchée de boire de l’eau ou de prendre ses médicaments dans le cadre d’un traitement “humiliant”. Selon elle, le ministère espagnol de l’Intérieur était au courant de l’expulsion, mais pas le ministère des Affaires étrangères.
Contactés par l’AFP, le ministère espagnol de l’Intérieur et les autorités marocaines n’étaient pas joignables dans l’immédiat. Mme Maleno a fait l’objet d’enquêtes ces dernières années en Espagne et au Maroc. En 2019, la justice marocaine avait classé sans suite une enquête pour trafic d’êtres humains en lien avec sa lutte contre les naufrages de migrants en Méditerranée.
Une première procédure à son encontre avait été classée sans suite en Espagne en avril 2017 après que la police espagnole avait remis au parquet un rapport faisant état de ses possibles liens avec une “organisation criminelle”. Mais, malgré ces décisions de justice en sa faveur, elle affirme avoir continué à être victime de harcèlement depuis. “Depuis avril 2020, moi et ma famille avons été victimes de 37 attaques et je tiens les gouvernements espagnol et marocain responsables”, a-t-elle poursuivi. Elle assure notamment que la porte de son domicile marocain avait été forcée à trois reprises ou qu’elle avait été suivie. “Le cas de Helena est malheureusement l’exemple typique de ce qui peut arriver à toute personne défendant les droits (des migrants) aux frontières de l’Union européenne”, a déclaré Maria San Martin, de l’ONG basée en Irlande, Front Line Defenders.
L’Espagne est l’une des portes d’entrée des migrants dans l’UE. Alors que l’Europe a passé des accords avec plusieurs pays, dont le Maroc, pour lutter contre l’immigration illégale en Méditerranée, la route migratoire vers l’archipel des Canaries, extrêmement dangereuse, est l’une des routes privilégiées. L’an dernier, 23.023 migrants sont arrivés aux Canaries, un chiffre huit fois supérieur à celui de 2019 et depuis le début de l’année, le flux des arrivées ne s’est pas tari. Selon l’ONG de Helena Maleno, 1851 personnes sont mortes l’an dernier en tentant d’atteindre les Canaries.