Ce n’est plus qu’une question de temps avant que l’invité russe, le vaccin Spoutnik-V, ne prenne part à la quête de l’immunité collective. Comme annoncé par TelQuel ces dernières semaines, le produit issu du laboratoire Nikolaï Gamaleïa devrait recevoir le feu vert des autorités sanitaires avec une autorisation temporaire d’utilisation d’urgence, délivrée par la Direction du médicament et de la pharmacie (DMP) dépendant du ministère de la Santé — tout comme une autre version du vaccin AstraZeneca-Oxford produit par SK Bioscience, un industriel pharmaceutique sud-coréen.
Après avoir donné satisfaction au Comité technique national de vaccination, qui s’est prononcé à titre consultatif en début de semaine sur le vaccin, les tractations autour du Spoutnik-V sont en cours par les différentes parties concernant l’acquisition des précieuses doses.
D’après nos informations, obtenues de sources proches des discussions, un million de doses du vaccin Spoutnik-V ont été commandées par le royaume auprès de la partie russe. Des négociations sont encore cours concernant l’échéancier des livraisons, mais aussi pour l’acquisition de davantage de doses.
Deux doses efficaces à 92 %
Un renfort bienvenu au moment où la campagne de vaccination, démarrée le 28 janvier, patine sur le terrain. La faute à une forte pression mondiale autour de l’approvisionnement, nécessaire à chaque pays pour immuniser la population et enrayer la propagation du Covid-19.
Ce vaccin a vecteur viral a longtemps eu mauvaise presse tant il a été reçu avec un certain scepticisme de la communauté scientifique, au moment où la Russie s’autoproclamait “grande gagnante de la course aux vaccins” l’été dernier. Principale accusation : un vaccin déployé avant la publication de données détaillées quant à ses effets. Depuis, la solution a fait du chemin et est désormais courtisée par l’Union européenne, l’Agence européenne des médicaments (EMA) ayant commencé l’examen du dossier de Spoutnik-V.
Un changement lié à la publication des résultats intermédiaires détaillés du vaccin, dans la revue The Lancet. Sur la base de l’étude des résultats de troisième phase des essais cliniques, menée sur 21.977 participants âgés de plus de 18 ans, Spoutnik-V s’est avéré efficace à 92 %. Des résultats jugés “bons et encourageants”, malgré certains cas d’effets secondaires observés par les scientifiques, allant de petites fatigues post-vaccination à des cas de manifestations cutanées (29 cas sur 21.977).
Le vaccin Spoutnik-V fonctionne de la même manière que le vaccin AstraZeneca-Oxford, déjà utilisé au Maroc. Nécessitant deux doses, il s’appuie sur la technique du “vecteur viral”, utilisant un virus de type froid, conçu pour être inoffensif, comme vecteur pour délivrer un petit fragment du coronavirus dans l’organisme. Cela consiste à injecter une instruction génétique dans les cellules et à les laisser produire l’antigène qui va lancer la réponse immunitaire, permettant au corps de produire des anticorps spécialement adaptés au Covid-19.
Spoutnik-V déjà dans l’orbite nord-africaine
Validé dans 46 pays, l’utilisation de Spoutnik-V est déjà approuvée par plusieurs États européens tels que la Hongrie, la Slovaquie et la République tchèque. Plus proche du Maroc, la Tunisie a réceptionné, ce 9 mars, un premier lot de 30.000 doses sur les 500.000 commandées. L’Égypte a donné son autorisation au vaccin le 24 février, et l’Algérie a démarré sa campagne de vaccination avec ce produit fin janvier.
L’Égypte a donné son autorisation au vaccin le 24 février, et l’Algérie a démarré sa campagne de vaccination avec ce produit fin janvier
L’arrivée prochaine du Spoutnik-V dans le ciel de l’opération a été l’objet de discussions menées depuis l’automne, notamment depuis l’intérêt manifesté par le laboratoire pharmaceutique marocain Galenica, implanté à Bouskoura. L’industriel, le seul en Afrique certifié GMP pour exporter en Russie, avait décroché l’exclusivité pour le royaume via un accord quadripartite signé en septembre avec le ministère de la Santé russe, le Fonds d’investissement direct russe (RDIF) et l’Institut de recherche Nikolaï Gamaleïa, qui a conçu Spoutnik-V.
“Nous attendons l’autorisation de mise sur le marché temporaire d’urgence pour pouvoir importer le vaccin russe”, nous a déclaré, en début de semaine, Abdelghani El Guermaï, à la tête de Galenica. Toutefois, les modalités d’approvisionnement n’ont toujours pas été confirmées à TelQuel, les discussions portant actuellement sur la quantité de doses. Celles-ci pourraient être précisées dans le document d’autorisation temporaire d’utilisation d’urgence, délivré par la DMP.
Ce 10 mars, le RDIF a annoncé avoir signé des contrats pour la production du vaccin Spoutnik dans des usines allemandes, espagnoles, suisses et italiennes. La veille, la Chambre de commerce italo-russe signait le premier accord européen “pour la production sur le territoire de l’UE du vaccin Spoutnik-V”, évoque l’AFP. Selon la même source, “dix millions de doses” devraient être produites entre le 1er juillet 2021 et le 1er janvier 2022.