Attendu sur le tarmac de Rabat ce mardi 22 décembre en début d’après-midi pour une visite “historique”, Jared Kushner a livré ses premières impressions au groupe Maroc Télématique. Publié par Ahdat Al Maghribiya en version arabophone, ainsi que par l’Observateur du Maroc et d’Afrique pour son pli francophone, l’entretien conduit par le patron du groupe de presse Ahmed Charaï revient entre autres sur les récents rapprochements entre Israël et les pays arabes, ainsi que les développements au Sahara. L’occasion d’aborder le poids du roi Mohammed VI dans les discussions.
“J’étais au Maroc il y a deux ans avec le roi, et j’ai eu une très bonne discussion avec lui lors d’un Iftar sur la possibilité de rétablir les relations avec Israël”, avance le gendre et conseiller du président américain Donald Trump. S’il explique avoir été en “contact permanent” avec Mohammed VI et ses conseillers depuis, il concède également que ce dernier lui a “prodigué d’excellents conseils et partagé de nombreuses idées importantes”, ayant conduit à leurs “succès dans la région”.
Effet domino
Dans cet entretien, Jared Kushner revient sur les récents développements au Moyen-Orient visant à rapprocher les États arabes d’Israël. Un procédé qu’il explique par le fait que les “les nations de la région se rendent compte des avantages de se rassembler”, et que chaque pays qui renoue ses relations avec Israël “s’appuiera sur ceux qui l’ont précédé”.
Artisan des rapprochements entre Israël et quatre pays arabes depuis août — les Émirats arabes unis, Bahreïn, le Soudan et le Maroc —, il est également revenu sur les accords d’Abraham, signés avec les deux premiers pays le 15 septembre, comme des “fondations” servant à faire avancer le processus d’une “paix globale, juste, réaliste et durable entre Israël et les Palestiniens”.
“Les nations de la région se rendent compte des avantages de se rassembler”
“Nous devons également reconnaître qu’au cours des trente dernières années, de nombreux pays arabes ont utilisé leur capital politique pour aider les dirigeants palestiniens, souvent aux dépens de leurs citoyens chez eux. Cette tendance touche à sa fin, note-t-il. Les pays peuvent continuer à soutenir la cause palestinienne et offrir une assistance et un soutien constructif, mais en même temps, ils peuvent utiliser leur capital pour défendre les intérêts de leur pays et de leurs citoyens.”
Un État sahraoui, “pas une solution réaliste”
Dans la foulée du rapprochement entre le Maroc et Israël, Washington avait également annoncé reconnaître la souveraineté du royaume sur le Sahara, le 10 décembre dans une série de tweets publiés par Donald Trump. “Pour les États-Unis, le plan d’autonomie sous souveraineté marocaine est l’unique choix réaliste pour une solution juste, durable et acceptable en vue de résoudre le conflit du Sahara”, commente Jared Kushner.
Selon lui, “un État sahraoui indépendant n’est pas une solution réaliste pour résoudre ce conflit” et il exhorte les Nations unies, de concert avec les parties concernées, à utiliser le plan d’autonomie du Maroc “comme seul cadre pour négocier une solution mutuellement acceptable”. Et d’ajouter : “Pour faciliter les progrès vers cet objectif, les États-Unis encourageront le développement économique et social du Maroc, y compris sur le territoire du Sahara, et à cette fin ouvriront un consulat à Dakhla, pour promouvoir les opportunités économiques et commerciales pour la région.”
Un constat appuyé par Meir Ben-Shabbat, membre de la délégation israélo-américaine attendue à Rabat, qui évoque, dans un autre entretien accordé à Al Ahdat Al Maghribiya, l’instauration d’une “coopération économique et technologique dans, notamment, les domaines de l’eau, de l’agriculture, de l’énergie, de la cybersécurité”.
Pour cette première sortie au Maroc, le conseiller spécial du président américain n’est pas sorti des éléments de langage habituellement usités ces dernières semaines. Ahmed Charaï, le patron du groupe Maroc Télématique qui a mené l’entretien, est réputé proche de Jared Kushner et fervent défenseur, dans différents éditoriaux publiés dans les médias de son groupe, d’une normalisation des relations entre le Maroc et l’État hébreu.
À l’automne 2019, il avait déjà pu rencontrer Jared Kushner ainsi que Eran Lerman, vice-président du Jerusalem Institute for Strategy and Security (JISS) comme le relatait la presse israélienne.