Une exposition pour redécouvrir Farid Belkahia et l'Ecole des Beaux-arts de Casablanca

Le Mathaf Farid Belkahia à Marrakech accueille l’exposition « Farid Belkahia et l’Ecole des Beaux-arts de Casablanca, » dont l'artiste était le directeur de 1962 jusqu’à sa démission en 1974. L’occasion de revisiter le contexte de l’émergence d’une modernité artistique au Maroc au lendemain de l'indépendance.

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Farid Belkahia dans son atelier. par Matteo Lonardi

Jusqu’au 31 mars au Mathaf Farid Belkahia à Marrakech, l’exposition « Farid Belkahia et l’Ecole des Beaux-arts de Casablanca » explore le contexte de l’émergence d’une modernité artistique postcoloniale au Maroc. Une école dont l’artiste, né en 1934 et décédé en 2014 à Marrakech, était le directeur de 1962 à 1974. Cette décennie lui a servi, avec ses compagnons de route, de laboratoire pour mener « une réflexion et des expériences sur les nouvelles voies d’accès à la modernité, » nous explique l’historien de l’art, Brahim Alaoui, commissaire de l’exposition aux côtés de la présidente de la Fondation Farid Belkahia, Rajae Benchemsi.

Après un séjour en Tchécoslovaquie, Farid Belkahia rentre au bercail pour diriger aux destinées de l’Ecole des Beaux-arts de Casablanca. Sa démarche ? Repenser la création dans une relation dialectique entre le local et l’international. Pour ce faire, il s’entoure d’une équipe qui partage une vision collective et un encadrement pédagogique cohérent. Deux artistes rejoignent l’équipe, Mohamed Melehi et Mohamed Chebâa et deux historiens de l’art, Toni Maraini et Bert Flint.

« La pensée coloniale soutenait que l’art au Maroc ne pouvait, voire ne devait être naïf ou au mieux, dans le suivisme de l’art occidental, notamment français et espagnol, » déplore Rajae Benchemsi. Dans les colonnes du magazine spécialisé DiptyK, l’écrivaine et critique revient également sur la genèse du travail de Farid Belkahia à la tête de l’Ecole des Beaux-arts de Casablanca : « Farid Belkahia, qui s’est entouré de grands artistes et de grands intellectuels, a véritablement proposé un nouveau concept d’enseignement où la prise en considération de l’importance des arts traditionnels représentait un tournant décisif. »

Bahaus marocain

Des créations  inédites sont exposées lors de cette exposition, comme les œuvres réalisées sur le cuivre, un matériau fortement utilisé dans les arts traditions que Farid Belkahia a adopté après avoir abandonné, en 1962, la pratique de la peinture de chevalet. D’autres œuvres, issues de sa période expressionniste sont gravées ou exécutées en bas-relief sur des plaques de cuivre et font apparaître sa transition progressive.

Sont exposées également les œuvres des années 1960  et 1970 de ses amis et complices, comme Mohamed Melehi et Mohamed Chabaa, ainsi que celles de Mohamed Hamidi, Romain Atala, Mustapha Hafid et André Elbaz. Des documents d’archive, une iconographie et des publications de cette période prolifique pour l’art moderne agrémenteront l’exposition, aux côtés des créations des étudiants de l’époque, Malika Agueznay, Abdallah El Hariri, Abdelkri Ghattas, Abderrahman Rahouleet et Houssein Miloudi. « Il était capital que ces jeunes soient conscients de la culture millénaire de leurs pays, dans toute sa diversité, et qu’ils comprennent qu’ils avaient des choses spécifiques au reste du monde. Il y avait un réel esprit Bauhaus, » conclut Rajae Benchemsi.