Zakaria Boualem vous souhaite une bonne année 2013

Par Réda Allali

Chers amis, Zakaria Boualem vous salue. Arrivé sur les rotules au terme de cette année 2012 pénible, le Guercifi s’adresse à vous cette semaine dans un état proche du végétal. Sévèrement diminué par une grippe tellement fourbe qu’elle a sans doute été conçue dans le labo de synthèse d’un des ennemis de notre nation. Je vous laisse l’identifier, hamdoullah il y a le choix. Nous sommes d’ailleurs entourés d’ennemis, aussi isolés que si nous étions une île. Bon, là n’est pas la question, et merci. Si vous lisez cette page, c’est que la fin du monde n’a pas eu lieu le 21 décembre comme l’avaient prédit les Mayas. C’était d’ailleurs assez évident parce que si les Mayas étaient capables de prédire l’avenir, ils auraient gagné beaucoup d’argent avec la victoire de la Grèce à l’Euro 2004 ou de la Zambie à la CAN 2012. Mais les Mayas, ils sont un peu comme tout le monde, ils galèrent pour payer leurs crédits, et du coup ils sont moins crédibles. Pas de fin du monde, donc. En tout cas pas pour cette semaine. Mais Zakaria Boualem a lu un bouquin cette semaine qui l’a fait réfléchir. Il paraît que le développement n’est pas une fatalité, que la civilisation n’est pas une évidence. C’est bien entendu une affirmation effrayante. L’auteur explique que les Egyptiens, les Chinois, les Mayas et d’autres aussi ont été dans le passé parfaitement héroïques, glorieux, inventifs et inspirés avant de sombrer dans les ténèbres de l’histoire. On ne va pas parler des Grecs, qui étaient tous capables de passer un doctorat de philosophie et qui maintenant souffrent même en économie niveau bac pro… L’histoire nous enseigne donc qu’elle n’avance pas systématiquement vers les lumières, qu’elle connaît des coups d’arrêt, des périodes de chaos, des zones d’ombre qui peuvent durer des siècles, c’est une information importante à rappeler. Depuis qu’il a lu ce truc, Zakaria Boualem pense que nous vivons la fin d’une civilisation, mais il ne sait pas exactement de laquelle il s’agit. Ici par exemple, il semble que nous ayons décidé collectivement de porter aux sommets les faces les plus dures de notre communauté, et avec un bel enthousiasme. Il semble également que nous ayons décidé de faire de la servilité une vertu patriotique, c’est assez déstabilisant comme attitude.

Un peu plus à l’est, certains cousins à nous développent une étrange obsession à l’encontre des femmes. Ils veulent les faire disparaître, tout simplement. Il faudrait qu’elles se cachent, qu’elles ne travaillent pas, qu’elles ne parlent pas, qu’elles ne marchent pas dans la rue, qu’elles n’étudient pas, qu’elles ne conduisent pas. Et comme, en même temps, ils sont contre le mariage gay, on se demande un peu quel modèle de société ils proposent. Il se trouve aussi un nombre important de penseurs qui appellent chaque jour à l’interdiction de l’art, tout simplement. Ils le disent rarement en ces termes, ils préfèrent parler d’art respectable, mais bon, en général ils n’ont pas trop de tableaux ou de CD à la maison. Ils n’ont pas dû en trouver de suffisamment respectables. Zakaria Boualem n’est pas un grand spécialiste de l’histoire de l’homme, mais il sent bien qu’il y a là-dedans les signes d’une certaine plongée dans les ténèbres, un truc comme un recul de la pensée, la négation de l’humain ou de la vie, c’est à creuser. Mais il serait injuste de réduire ce phénomène à la seule oumma. Il fut un temps où des gens comme Churchill ou De Gaulle présidaient aux destinées de l’Europe. Aujourd’hui, c’est un septuagénaire libidineux qui menace de revenir pour battre le record de longévité à la tête d’une démocratie et c’est nettement moins brillant. L’Europe, grande productrice d’idées, d’idéologies, d’idéaux, fait comme tout le monde en ce début de siècle : elle cale, se rabougrit. Elle geint. Et quand elle décide de débattre, elle choisit le thème de l’identité nationale, ça ne vole pas très haut… Notre époque ne produit plus de héros, et même s’il en apparaissait un, il serait détruit par quelques images volées par un téléphone et postées sur YouTube, suivies par une volée de commentaires cruels sur Twitter. Nous sommes absorbés par la médiocrité, c’est plus fort que nous.

Bon, il faut arrêter ce pénible délire, sans doute dû à la fièvre, on n’a pas donné cette page à Zakaria Boualem pour déprimer tout le monde, le reste de l’actualité s’en charge. Bonne année à tous, donc, et merci.