Lors de la présentation de son bilan de mi-mandat le 24 avril devant le parlement, Aziz Akhannouch a à peine effleuré la thématique de l’emploi. Pourtant, le Chef du gouvernement a érigé ce sujet en priorité depuis la publication des chiffres de l’emploi par le HCP début février. Il a même multiplié les réunions de crise pour atteindre les objectifs fixés par la vision royale pour l’emploi.
Selon nos sources, Aziz Akhannouch n’aurait pas vu l’orage venir. La surprise serait donc à l’origine de la convocation des ministres des secteurs productifs à la chefferie du gouvernement, qui ont dû expliquer pourquoi leurs projections ne s’alignent pas sur la réalité des chiffres fournis par le HCP. Des ministres comme Mohamed Sadiki et Fatima-Zohra Ammor se sont ainsi vu signifier que ce sont désormais les chiffres du HCP qui feront foi et non pas leurs projections.
Idem pour Ryad Mezzour, qui défendait pourtant les perspectives gouvernementales il y a quelques mois, déclarant que “si nous avions suivi le HCP, nous aurions arrêté tous les projets de développement”. Le ministre de l’Industrie avait également suggéré que les données de l’instance pilotée par Ahmed Lahlimi ne reflétaient pas la réalité des chiffres du gouvernement. Quant à Younes Sekkouri, pourtant ministre de l’Emploi, son absence à la “réflexion stratégique” initiée par le Chef du gouvernement sonne comme un désaveu.
Cette stratégie de Aziz Akhannouch n’est pas nouvelle. Elle ressemble à s’y méprendre à celle qu’il avait déployée en s’impliquant dans le dossier du statut des enseignants. Le Chef du gouvernement avait alors contribué à renforcer la position des grévistes et affaiblir la position de Chakib Benmoussa et de sa réforme. Sauf que, du côté de l’éducation nationale, il n’a pas eu à recourir aux services des cabinets de consulting pour résoudre la crise, comme il a décidé de le faire pour l’emploi en confiant l’élaboration d’une politique publique aux consultants de McKinsey.
Pouvait-il faire autrement ? Oui, certainement. Car le Chef du gouvernement dispose des ressources nécessaires dans la fonction publique pour élaborer et assurer la cohérence d’une politique publique de l’emploi. C’est sous son gouvernement que Mouhcine Jazouli s’est vu confier le portefeuille de l’Investissement, de la convergence et l’évaluation des politiques publiques.
“Mis bout à bout, tous ces éléments donnent l’impression que Aziz Akhannouch veut cacher sa difficulté à coordonner l’action gouvernementale”
Par sa nature, ce ministère doit fournir les outils nécessaires aux autres départements pour faire converger les politiques publiques, notamment, dans le cas qui nous intéresse, en termes de création d’emplois. Mieux, il peut également fournir les outils pour évaluer ces mêmes politiques à différentes étapes de leur réalisation.
Autant de tâches que le Chef du gouvernement a choisi de “déléguer” à McKinsey depuis le début du mois de mars pour concevoir une stratégie transversale pour l’emploi. Mis bout à bout, tous ces éléments donnent l’impression que Aziz Akhannouch veut cacher sa difficulté à coordonner l’action gouvernementale, comme en témoigne sa gestion du secteur de l’Energie. Il s’agit pourtant de sa mission première. Sauf qu’à vouloir trop masquer cette crise bien réelle, le Chef du gouvernement a pris des allures de marchand de sable. Prêt à tout pour nous endormir.