En 2024, 23 pays faisaient partie du dispositif ARV développé en France.
Le programme, qui s’adresse aux étrangers visés par une Obligation de quitter le territoire français (OQTF), comprend une allocation forfaitaire allant jusqu’à 2500 euros, à laquelle peut s’ajouter le financement d’un projet professionnel. Cette enveloppe dédiée à la “réinsertion”, de 5000 à 6000 euros en moyenne (10.000 euros maximum), peut être financée par des fonds européens via l’agence Frontex.
En 2024, l’Office français de l’immigration et de l’intégration (Ofii) a versé 6908 ARV (+2,36% par rapport à 2023) principalement à des ressortissants géorgiens et albanais (1800), les trois pays du Maghreb (Algérie, Maroc, Tunisie) atteignant le millier.
En comparaison, le nombre d’éloignements “sous contraintes” était lui de plus 11.000 en 2022, la France accusant un “retard notable” pour les retours volontaires face à ses voisins européens (même si tous ne développent pas ce dispositif), l’Allemagne en ayant enregistré 26.545 cette même année, selon un rapport de la Cour des comptes de janvier 2024.
“Un flop”
Apparues pour la première fois en 1977 en France, les incitations au retour visaient à encourager les chômeurs étrangers à rentrer chez eux suite au choc pétrolier.
“Ça a été un flop déjà à l’époque. Les seuls à en bénéficier ont été les Portugais et les Espagnols, qui avaient déjà prévu leur retour et qui n’étaient pas la cible visée”, rappelle Thomas Lacroix, directeur de recherche au CNRS (Centre national de recherche scientifique), spécialiste des migrations.
“Le coût de l’incertitude généré par le retour est supérieur à l’aide proposée”
Dans les années 1980, le dispositif est remplacé, sans succès, par une aide à la réinsertion pour les chômeurs étrangers qui souhaitent développer un projet dans leur pays d’origine. Il est remplacé dans les années 1990 pour la première fois par une incitation financière à destination des migrants en situation irrégulière.
“Ce n’est pas une question d’argent”, pointe Thomas Lacroix pour expliquer le faible succès du dispositif : “Le coût de l’incertitude généré par le retour est supérieur à l’aide proposée.”
“Beaucoup de choses ne se chiffrent pas”, comme les conflits familiaux, l’incertitude économique dans le pays d’origine, etc., souligne-t-il.
Les personnes qui ont immigré se sont souvent endettées auprès de leur famille et le retour est perçu comme un échec, explique le chercheur.
Les retours pourraient être davantage envisagés “si les personnes immigrées pouvaient circuler de manière plus fluide et s’il n’était pas si difficile d’avoir des papiers, il y aurait un mouvement pendulaire d’allers-retours”, estime Lacroix.
Pour sa consœur Camille Le Coz, chercheuse au centre de réflexion Migration Policy Institute, les retours volontaires gagneraient cependant à être développés.
Ils sont “beaucoup plus dignes” pour les personnes concernées, cela crée moins de tensions diplomatiques et coûte moins cher, souligne la chercheuse qui pointe le manque d’information autour de ces dispositifs.
“Politiquement, c’est un peu difficile à défendre, parce que ça veut dire qu’on donne une bourse à des personnes qui sont en situation irrégulière et ça ne plaît pas à l’extrême droite”, note-t-elle.
Mais “le coût d’un retour forcé sous escorte policière avec placement en Centre de rétention administrative est beaucoup plus cher”, souligne le directeur de l’Ofii Didier Leschi. Un rapport parlementaire de 2019 l’a évalué à 13.800 euros.
La Commission européenne, qui avait adopté une nouvelle stratégie pour encourager les retours volontaires et la réintégration des immigrés en 2021, débat désormais sous la pression des partis d’extrême droite, à une révision de la “directive retour” afin d’accélérer et accroître les expulsions forcées.