Les agressions sexuelles peuvent avoir de graves séquelles sur la santé psychologique de l’enfant et sur sa croissance, pouvant durer toute une vie, s’il n’a pas accès à un traitement précoce et rapide”, a précisé El Hassan Daki dans une allocution à l’ouverture d’un atelier de travail organisé par la présidence du Ministère public en partenariat avec le Conseil de l’Europe au sujet des “mécanismes de prise en charge des enfants victimes d’agressions sexuelles à la lumière du système judiciaire national et des principes de la Convention de Lanzarote”.
Afin d’éviter ces répercussions, “il est nécessaire de fournir une assistance spéciale à ces enfants et d’effectuer un suivi méticuleux de leur situation physique, psychologique, familiale et sociale”, a-t-il insisté, soulignant le rôle important joué à cet égard par les cellules de prise en charge des femmes et des enfants créées auprès des tribunaux. Par ailleurs, Daki a précisé que le Ministère public avait veillé à renforcer les capacités de son personnel chargé des affaires de l’enfance et à améliorer ses performances grâce à la formation continue et spécialisée, en s’ouvrant davantage sur les expériences similaires dans les domaines liés aux droits de l’enfant.
Cette rencontre, a-t-il expliqué, “vise à familiariser les juges avec les principes de la Convention de Lanzarote, les meilleures pratiques au niveau international et les jurisprudences du Tribunal européen des droits de l’Homme dans le domaine de la protection de l’enfance”.
Un guide d’écoute des enfants
La présidence du Ministère public se penche actuellement sur la préparation d’un guide d’écoute des enfants en conflit avec la loi, y compris ceux victimes d’abus, clarifiant les techniques à utiliser lors des séances d’écoute afin de préserver les intérêts des enfants et ne pas heurter leur sensibilité, tout en encourageant l’usage des nouvelles technologies et des outils de communication à distance, a fait savoir Daki.
“Les parquets compétents ont enregistré un total de 3295 cas d’agressions sexuelles à l’encontre d’enfants en 2022, soit plus de 41 % du total des actes de violence ciblant des enfants”, a-t-il indiqué.
Et de noter que la présidence du Ministère public s’est engagée dans un programme de coopération internationale visant à intégrer les progrès technologiques dans le domaine de la recherche et de l’investigation, pour permettre aux parties chargées de l’application de la loi de détecter ces crimes, de rassembler les preuves et de traduire en justice leurs auteurs.
Au niveau légal et judiciaire, le législateur marocain a œuvré pour adapter l’arsenal légal national aux normes internationales en introduisant des dispositions pénales qui ont défini toutes les formes d’exploitation et d’agression contre des enfants, dont tous les types d’abus sexuels qui sont passibles de peines sévères, a fait remarquer le président du Ministère public.
Ces dispositions pénales reflètent la détermination du législateur marocain à lutter fermement contre ce type de crimes qui “menace la sécurité des enfants qui représentent le pilier de la nation et son avenir”, a-t-il soutenu, ajoutant que des mesures de protection ont été mises en place afin d’accompagner les victimes, les aider à surmonter les séquelles de l’agression et favoriser leur réinsertion dans la société.
De son côté, la cheffe de Bureau du Conseil de l’Europe au Maroc, Carmen Morte Gomez, a relevé que la Convention de Lanzarote était considérée comme l’une des plus complètes au sujet de la protection des enfants des formes d’exploitation et d’agression sexuelles, indiquant que ce document est “un modèle à suivre pour tous les pays ayant développé des lois et des politiques de prévention contre l’exploitation et l’agression des enfants”.
“La Convention de Lanzarote permet également de protéger les victimes, de sévir contre les agresseurs et de renforcer la coopération nationale et internationale, en plus de fournir une base légale au partenariat entre les différents pays membres”, a-t-elle fait savoir. En outre, la cheffe de Bureau du Conseil de l’Europe au Maroc a expliqué que les actes d’exploitation et d’agression sexuelles des enfants peuvent avoir lieu à la maison, à l’école ainsi que dans d’autres espaces fréquentés par les enfants, soulignant qu’entre 70 et 85 % des agressions sont perpétrées par des individus proches de l’enfant, ce qui engendre des séquelles physiques et psychologiques pouvant durer tout au long de la vie.
Morte Gomez a aussi noté que 90 % des agressions ne sont pas déclarées à la police, tandis que les enfants ayant la capacité de parler de l’agression qu’ils ont subie se heurtent à la complexité des mesures administratives et légales en plus de la difficulté d’accéder aux soins nécessaires.
Cet atelier s’inscrit dans le cadre des efforts déployés par la présidence du Ministère public dans le domaine de la protection des enfants victimes d’exploitation et d’agression sexuelles, la promotion des meilleures pratiques en la matière et la mise en lumière des dispositions de la Convention du Conseil de l’Europe sur la protection des enfants contre l’exploitation et les abus sexuels (Convention de Lanzarote), adoptée en 2007.
(avec MAP)