[Tribune] Startup de logiciel : 50 façons d’échouer et comment les éviter 

Abdel Kander, un vétéran de 35 ans dans la tech B2B, entre la Silicon Valley, Paris et Casablanca, vient de publier un livre-guide de contre-feu pour les startups de logiciel : 50 erreurs qui éclairent les pièges à éviter. Parce qu’en entrepreneuriat, la sagesse commence souvent par savoir ce qu’il ne faut pas faire.

Par

Abdellatif (Abdel) Kander.

On lit beaucoup de choses sur les startups. Des “success stories” brillantes. Des fondateurs géniaux. Des méthodes magiques, en trois étapes ou cinq acronymes, censées vous mener au sommet. Tout ça, très franchement, j’y crois peu.

En 35 ans passés dans l’univers du logiciel B2B, ce que j’ai retenu, ce sont les erreurs. Les vraies. Les petites bêtises du quotidien, comme les grosses fautes de stratégie. Celles qui font mal, qui coûtent cher, qui laissent des traces. Mais surtout : celles qui font grandir. Comme me le disait un de mes profs à l’École centrale : “Ce sont les pièces qui cassent qui nous apprennent le plus.” Je n’ai jamais oublié cette phrase.

Ce livre est né de cette conviction. Il rassemble 50 erreurs fréquentes que j’ai croisées, commises, observées ou évitées de justesse, organisées autour de cinq grands thèmes : Finances, Produit, Marketing, Vente et RH/Management. C’est un carnet de bord plus qu’un manuel. Un retour d’expérience sincère, pas une leçon.

Dans la rubrique finances, j’ai vu des levées de fonds précipitées, des investisseurs ingérables, des fondateurs qui se diluent trop vite, ou d’autres qui se perdent dans la chasse aux subventions, au point d’oublier leur client. Pire encore : des startups entières qui deviennent otages d’un investisseur anxieux ou toxique. Lever des fonds, c’est séduisant. Mais mal préparé, c’est souvent le début des ennuis.

Si cette tribune et le livre peuvent vous épargner quelques chocs, quelques nuits blanches ou quelques erreurs évitables, alors ils auront rempli leur rôle

Côté produit, les illusions sont nombreuses. Croire qu’un POC, c’est une validation. Que la tech se suffit à elle-même. Qu’un produit intelligent va se vendre tout seul. Ou refuser de trancher dans les choix techniques par peur de vexer l’équipe. Ce sont souvent les décisions qu’on reporte qui font le plus de dégâts.

Le marketing, lui, est trop souvent négligé. Soit par naïveté — “on a un bon produit, ça va se vendre” —, soit par confusion : “marketing” n’est pas un logo ou des salons. C’est comprendre son marché, choisir ses batailles, parler juste, savoir se positionner sans se travestir.

Mais c’est dans la vente que j’ai vu le plus de malentendus. Certains fondateurs n’aiment pas vendre, ou confondent ça avec une démo produit. On vend à qui ? Comment ? À quel prix ? Trop de startups dépendent d’un seul client ou partenaire, cassent leurs prix pour accrocher un logo, ou vendent des promesses impossibles à tenir. Et puis il y a ces équipes commerciales mal calibrées, mal managées, ou trop tôt mises en place.

Et puis il y a l’humain. Les egos, les conflits de fondateurs, les rôles mal définis, les recrutements précipités, l’envie de rester entre copains. Là aussi, j’ai vu des boîtes prometteuses exploser à cause d’un non-dit, d’un leadership mal assumé, d’un dirigeant qui refuse de lâcher prise.

à lire aussi

Enfin, il y a ce qu’on oublie trop souvent de dire : la persévérance. Beaucoup abandonnent trop tôt. D’autres confondent levée de fonds et ligne d’arrivée. Or, ce n’est qu’un tremplin. Ce qui fait la différence, c’est l’endurance, la capacité à ajuster, à tenir, à traverser les tempêtes sans perdre son cap.

Je n’ai pas toutes les réponses. Mais si cette tribune et le livre peuvent vous épargner quelques chocs, quelques nuits blanches ou quelques erreurs évitables, alors ils auront rempli leur rôle.

L’odyssée d’un Centralien, vétéran devenu passeur de savoir

Abdellatif (Abdel) Kander, diplômé de l’École Centrale de Paris, est un vétéran de la high-tech qui, après avoir démarré sa carrière en 1989 chez Cap Gemini, a rejoint l’équipe fondatrice de l’éditeur Business Object, première entreprise française à s’introduire au NASDAQ en 1994. Après un passage de sept ans dans la Silicon Valley, il revient en Europe pour diriger des activités de logiciels d’entreprise pour le compte de startups américaines et européennes. Plus récemment, il a dirigé la Software Factory de l’ESN Niji pour laquelle il a mené l’opération d’acquisition à Casablanca d’une structure fer de lance pour servir le marché africain et fournir des ressources qualifiées pour les projets français.

Installé à Paris, il dirige à présent une filiale de l’éditeur italien Cyber Guru, spécialiste de la sensibilisation au risque cyber et a pour mission de servir le marché marocain et africain en plus de la France.