La France est en croisade, c’est officiel. Zakaria Boualem a tout suivi, et il est formel, il n’y a plus aucun doute possible. C’est, bien entendu, par le football qu’il a posé son diagnostic, appliquant encore une fois sa fumeuse théorie qui établit qu’il suffit de suivre son football pour tout comprendre d’une société. La Fédération française de football, donc, que Dieu lui vienne en aide la pauvre, a décidé de frapper une nouvelle fois, avec la finesse qu’on lui connaît.
Un très beau communiqué a été pondu, interdisant formellement les collants et les casques, “même sous prétexte médical”. Ne reculant devant aucun effort lorsqu’il s’agit d’emmerder le monde, le communiqué précise qu’en cas de présentation de certificat médical, il était nécessaire de saisir la commission médicale de la fédération.
Il a fallu au Boualem quelques minutes pour comprendre le fond du problème, même s’il s’en doutait un peu, vu le ton belliqueux de la missive. On suspecte les collants de couvrir des jambes islamistes, voilà la grande infamie. Pour les casques, c’est encore pire, puisque certaines joueuses, qu’on a dévoilées de force l’an passé, les ont adoptés pour se couvrir la tête, démontrant encore une fois la puissance de leur diabolique inventivité.
“La patrie des lumières, des droits de l’homme, est lancée dans une croisade textile sur les terrains de foot, il n’y a pas d’autre façon de le décrire”
Telle est l’affaire, les amis, et c’est un peu navrant en vérité. La patrie des lumières, des droits de l’homme, est lancée dans une croisade textile sur les terrains de foot, il n’y a pas d’autre façon de le décrire. On se demande bien en quoi un type en collant de sport les dérange, mais ce n’est pas la question. On peut aussi se demander au nom de quoi une institution chargée de promouvoir la pratique d’un sport s’échine à en restreindre la population d’amateurs. On peut aussi, dans la foulée, noter l’isolement de ce pays puisque, au niveau mondial, les voiles sont autorisés sur les terrains de foot… Ce seraient des questions légitimes, mais elles engendreraient une perte de temps, et le Guercifi déteste ça.
Il faut éradiquer l’islam, voilà le projet (à défaut de pouvoir éradiquer les musulmans). Ils sont partis tellement loin dans leur délire qu’ils pourraient bien, si un couscoussovore se pointait les jambes à l’air, voire en string, trouver une raison de l’exclure tout de même, à cause de son regard torve, de la longueur exagérée de sa barbe ou de la fréquence de ses ablutions, qu’il faudrait songer à règlementer d’ailleurs.
“Toute la journée, sur les écrans fascistes des chaînes d’info en continu, on s’acharne sur les mêmes sujets, on fustige les mêmes personnes (…) sans même se rendre compte qu’ils déshumanisent une partie de leur propre peuple”
C’est devenu épidermique. Et si on ne trouvait rien à lui reprocher, ce serait encore pire : il serait probablement en opération de takiya. C’est un truc magnifique, cette notion, puisqu’elle fait de tout musulman soit un extrémiste manifeste, soit un extrémiste qui se cache. Et si le bougre était pris d’une étrange envie d’afficher des positions politiques, comme protester contre le génocide perpétré par l’armée la plus morale du monde, par exemple, alors il serait tout simplement persécuté pour antisémitisme, voilà où ils en sont.
Le tout se déroule – c’est important à préciser - sous le regard d’une bonne partie de la population qui trouve que tout est normal. Toute la journée, sur les écrans fascistes des chaînes d’info en continu, on s’acharne sur les mêmes sujets, on fustige les mêmes personnes, et, hamdoullah, ça va. Ils produisent une dose de tension phénoménale, sans même se rendre compte qu’ils déshumanisent une partie de leur propre peuple, mais tout va bien. Le char de la catastrophe dévale la pente de la fatalité à grande vitesse, le choc est inévitable. C’est tout ce que Zakaria Boualem a à dire, et merci.