C’est avec une certaine émotion que le Boualem a appris que la nouvelle priorité de notre gouvernement était désormais… l’emploi. Cette formidable annonce a été faite dans l’enceinte de notre parlement par le Chef du gouvernement lui-même. Il a tenu à préciser devant la noble assistance que cette approche “permettra d’offrir des opportunités d’emploi à l’ensemble des Marocains, dans les zones urbaines et rurales, d’intégrer divers programmes pour une plus grande transversalité et d’accroître l’efficacité des interventions de l’ensemble des acteurs visant à créer des opportunités de travail décent dans notre pays”.
C’est donc une très bonne nouvelle, mais vous connaissez le Guercifi et son mauvais esprit, le bougre se sent obligé de se poser la question : mais quelle était donc la priorité de la précédente période ? S’il suffisait de s’attaquer à ce problème pour “offrir des opportunités d’emploi à l’ensemble des Marocains dans les zones urbaines et rurales”, pourquoi diable ne nous sommes-nous pas intéressés à ce sujet un peu plus tôt ?
“C’est ainsi que Google nous explique qu’au cours des derniers mois ont été déclarés prioritaires, pour le Maroc, l’éducation, le tourisme, la gestion de l’eau, l’élaboration d’une politique culturelle intégrée, entre autres”
La réponse est très simple : parce que nous avions d’autres priorités, un paquet même. C’est ainsi que Google nous explique qu’au cours des derniers mois ont été déclarés prioritaires, pour le Maroc, l’éducation, le tourisme, la gestion de l’eau, l’élaboration d’une politique culturelle intégrée, entre autres. On a même trouvé, citées au rang des priorités stratégiques de notre paisible contrée, de mystérieuses “actions en faveur du continent africain dans le domaine nucléaire”, vous pouvez aller vérifier si ça vous chante. Oui, vous lisez une page sérieuse, et il faut rappeler que, depuis très longtemps, le Boualem a compris qu’il est bien incapable d’inventer quelque chose d’aussi saugrenu que notre réalité.
Mais cette liste extraordinaire de priorités ne semble pas, aux yeux du Boualem, s’accompagner de mesures spectaculaires. Autrement dit, le bougre a la pénible impression qu’on pourrait aussi bien annoncer aux gens qu’on a décidé de se lancer à corps perdus dans l’élevage du bouc en milieu semi-urbain ou la généralisation de l’enseignement de la capoeira en maternelle sans qu’il ne le remarque autour de lui. Il est très difficile de déterminer s’il s’agit là d’un des effets d’une sorte d’aigreur blasée ou de la conscience aiguë que nous avons perdu la main sur notre destin national, c’est un épais mystère.
“Il est d’ailleurs assez drôle de compter le nombre de fois où les certificats de résidence ont été annoncés caducs, alors qu’on vient d’en demander un à Zakaria Boualem”
Nous avons par exemple annoncé avec enthousiasme l’inscription de l’amazigh au rang des langues nationales sans que cette affaire ne dépasse le stade des panneaux autoroutiers. Si l’étrange idée vous prenait de vous adresser officiellement à un représentant de l’État dans cette langue, vous pourriez bien être déçu. Nous avons sans cesse expliqué que notre administration se numérisait et se modernisait, mais tous ceux qui la sollicitent savent que sa passion pour les timbres de toutes les couleurs et les tampons illisibles n’a jamais faibli. Il est d’ailleurs assez drôle de compter le nombre de fois où les certificats de résidence ont été annoncés caducs, alors qu’on vient d’en demander un à Zakaria Boualem.
Quant à l’enseignement public, la priorité permanente, il n’a jamais été si mal en point, le pauvre. Et si l’on parle du football, dont nous nous apprêtons à faire le fer de lance de toutes nos politiques, il suffit de rappeler que notre championnat est à l’agonie et qu’une bonne partie de ses dirigeants sont à l’ombre. Voilà donc où nous en sommes, il faut arrêter cette liste avant de sombrer dans la déprime, et merci.