Vu de Tel-Aviv, la petite phrase peut paraître anodine. Mais à Rabat, elle revêt une tonalité particulière au regard de l’envergure protocolaire et de la frénésie émotionnelle du personnage qui la formule lors d’une visite toute officielle. “Je l’ai dit avant et je le redis maintenant, en tant que président de la Knesset, très clairement : Israël devrait aller de l’avant vers cet objectif de reconnaissance de la marocanité du Sahara, tout comme notre allié le plus proche, les États-Unis d’Amérique”, a déclaré, le 8 juin, Amir Ohana, le président de la Knesset, lors de sa visite au Maroc, la première dans un pays arabe et musulman.
Glissée en marge d’une entrevue avec le président de la Chambre des représentants, Rachid Talbi Alami, la proclamation d’Amir Ohana charrie une question qui s’est tout de suite posée dans la capitale marocaine. Cet avocat issu du Likoud, le parti conservateur au pouvoir, né dans le sud d’Israël de parents nés à Ouazzane et Marrakech, s’exprimait-il à titre personnel ou sous sa casquette de deuxième personnage dans l’ordre protocolaire officiel de l’État hébreu ?
Au-delà de l’anecdote, la position exprimée par le président du parlement israélien illustre le paradoxe d’une relation contrariée entre Tel-Aviv et Rabat : celle d’un partenariat renforcé mais qui bute sur l’écueil de la sacro-sainte question du Sahara pour évoluer vers un win-win.
Une représentation qui en dit long
Officieusement, entre l’indépendance du Maroc en 1956 et le début des années 1990, les deux pays ont eu un partenariat axé sur les domaines de la sécurité et des renseignements. Officiellement, les relations n’ont été affirmées qu’avec l’ouverture en 1994 des bureaux de liaison, par la suite fermés lors de la seconde Intifada en 2000.
Secrètement, l’axe Rabat-Tel-Aviv continuait de fonctionner malgré la rupture de façade. La reprise des relations entre les deux pays, via les Accords d’Abraham parrainés par les États-Unis, a ainsi permis d’officialiser un état de fait partiellement en vigueur depuis plusieurs décennies. La normalisation, préparée secrètement entre Rabat et Washington, semble avoir été conçue à la hâte et laisse un goût d’inachevé.
En témoigne le niveau de représentation diplomatique entre les deux pays. Du côté de Tel-Aviv, on souhaite ardemment l’ouverture d’une ambassade… Lire la suite.