Sélection littéraire : lectures de vacances

Pour votre été, TelQuel vous propose sept livres, d’auteurs marocains 
et étrangers, à découvrir ou à relire pendant les vacances.

Par

Unsplash

L’Amie prodigieuse, d’Elena Ferrante

En l’espace d’une saga répartie en quatre tomes, la mystérieuse écrivaine napolitaine Elena Ferrante suit le parcours de deux fillettes, Elena et Lila, jusqu’à leur vieillesse, étalant ainsi son récit sur toute la seconde moitié du vingtième siècle.

Si cette tétralogie est d’inspiration autobiographique, chez Ferrante, le réel et le fictif sont indissociables. Avec en arrière-plan une description époustouflante de Naples en pleine ébullition, c’est aussi le souci constant de “devenir” — quelqu’un, quelque chose — que la narratrice place au cœur du récit.

Face à l’angoisse d’un futur qui n’attend pas, la fresque de personnages mis en scène dans la saga raconte, chacun à sa manière, la complexité des relations humaines. Dans L’Amie prodigieuse comme dans tous ses autres romans, Elena Ferrante parvient à placer ses mots là où l’indicible devient naturel et spontané.

De purs hommes, de Mohamed Mbougar Sarr

Cette année, la publication suivie de l’attribution du prix Goncourt à La plus secrète mémoire des hommes s’est soldée par un remarquable engouement de la critique autour de l’écrivain sénégalais Mohamed Mbougar Sarr.

Pour ceux qui souhaiteraient découvrir davantage le jeune romancier, De purs hommes est le roman qui a précédé son prix Goncourt. D’un œil juste et dépourvu de sentimentalisme, Mbougar Sarr y dépeint les mutations sociales de la société sénégalaise, son tiraillement entre tradition et modernité, et se livre à une tentative d’analyse de la violence — innée ? – qui somnole en chacun de nous.

Le diable est dans les détails, de Leïla Slimani

Ce petit livre, relativement méconnu dans l’œuvre de Leïla Slimani, est un court recueil de textes et nouvelles, suivi d’un entretien de la romancière avec le journaliste et écrivain Eric Fottorino, intitulé Comment j’écris.

Truffé de réflexions percutantes sur l’essence même de la littérature, Le diable est dans les détails, suivi de Comment j’écris, s’impose comme un ouvrage indispensable pour tout lecteur souhaitant mieux comprendre l’œuvre de Leïla Slimani, ainsi que le parcours de la romancière à succès qu’elle est devenue.

Saturne, de Sarah Chiche

Ce roman, que l’auteure dédie à tous les “endeuillés”, est une ode à l’indomptable résilience de ceux qui veulent continuer à vivre.

À travers une fresque générationnelle, qui se déroule à la fois à l’intérieur et en dehors d’une Algérie indépendante, Sarah Chiche raconte l’intimité d’une grande famille bourgeoise, propriétaire d’un empire médical. Mais là où l’argent coule à flots, les tragédies sont souvent les plus brutales.

Pourvue d’une sensibilité hors du commun, Sarah Chiche se fait maître dans la description méticuleuse du sentiment, et ce, même dans sa dimension la plus inavouable. La vie triomphe toujours, semble-t-elle vouloir nous dire, et il n’y a qu’un pas entre une histoire de mort et une histoire d’amour. “Tout est perdu, tout est splendide”, écrit-elle.

Vivre à ta lumière, de Abdellah Taïa

Le dernier roman de Abdellah Taïa, paru en mars 2022, se lit et se ressent au rythme de la voix de celle qui l’a inspiré : M’barka Allali Taïa, la mère de l’écrivain. C’est peut-être la première fois que Abdellah Taïa livre un roman aussi ancré dans l’histoire de son pays, tant les étapes de la vie de M’barka (Malika, dans le roman) sont aussi celles du Maroc du vingtième siècle.

À travers des passages poignants de sincérité et muni d’une impression de brutalité — pourtant si soigneusement travaillée par l’écrivain —, Taïa va jusqu’à invoquer un certain Mehdi Ben Barka, tel un esprit immortel qui veillerait sur les plus démunis.

Tantôt tremblante, tantôt rayonnante de puissance et de vivacité, la voix de M’barka-Malika, apporte une dimension nouvelle à l’œuvre de Abdellah Taïa, sans jamais se départir de l’intensité qui fait sa marque de fabrique.

Le dernier combat du Captain Ni’mat, de Mohamed Leftah

Un classique incontournable. Le captain Ni’mat est un sexagénaire égyptien aisé, militaire de carrière, installé au Caire. Retraité au moment où commence le récit, Ni’mat se découvre une attirance pour les hommes, qui se transforme en passion charnelle. C’est auprès d’Islam, son domestique noir, qu’il fait alors l’expérience d’un amour différent, plus fort que tout ce qu’il a pu ressentir auparavant.

Loin de toute convention, Mohamed Leftah, une des plus puissantes plumes de la littérature marocaine, fait table rase des passions dont il ne faut pas parler, avec une audace qui lui est propre, dans ce roman publié à titre posthume en 2010 et initialement censuré.

Subjuguant par sa lucidité, Le dernier combat du Captain Ni’mat rend hommage à la puissance de l’individualité, chante la cruauté de la beauté et puise dans la sagesse de la poésie arabe préislamique, afin d’émettre une critique virulente à l’égard de la montée de l’intégrisme religieux en Égypte, et plus largement au Maghreb.

En attendant Bojangles, d’Olivier Bourdeaut

Sacré best-seller quelques mois seulement après sa parution, ce premier roman d’Olivier Bourdeaut peut se lire comme un hymne à l’intranquillité de la vie. Narré à hauteur d’enfant, En attendant Bojangles est l’histoire d’un amour fou ou d’une folie amoureuse entre deux parents dont le fils est le narrateur.

Naïf, souvent déconcerté, mais profondément touchant, celui-ci tente de restituer le monde dans lequel il grandit, marqué par des extravagances toutes plus démesurées les unes que les autres.

Derrière le ton léger et les mondanités qui peuplent cet univers aussi vertigineux qu’attachant, Bourdeaut dépeint aussi une féroce et irrésistible envie de vivre face à un monde qui ne cesse de s’écrouler.