#MeTooUniv : un an de prison ferme pour le professeur de l’école de traduction roi Fahd à Tanger

Le tribunal de première instance de Tanger a condamné, le 12 février, à un an de prison ferme un professeur d’espagnol enseignant à l’école supérieure de traduction roi Fahd pour des faits de harcèlement sexuel. Il aurait notamment fait visionner une “vidéo porno” à une élève en décembre 2021.

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L’École supérieure roi Fahd de traduction, à Tanger. Crédit: DR

Après la vague #MeTooUniv, les premières condamnations commencent à tomber. Alors que l’un des professeurs impliqués dans l’affaire “Sexe contre bonnes notes” à l’université de Settat a été condamné, samedi 12 janvier, à deux ans de prison ferme, c’est au tour du professeur d’espagnol de l’école de traduction Roi Fahd accusé de harcèlement sexuel de recevoir le verdict du tribunal de première instance de Tanger.

Un an de prison ferme. Une condamnation jugée trop légère par la partie civile : “Nous ne sommes pas satisfaits de ce verdict, car on parle de faits très graves qui vont à tout jamais marquer la victime”, a déclaré à l’AFP l’avocate Aicha Guellaa.

Le verdict a également suscité une vague d’indignation sur les réseaux sociaux, où collectifs et internautes dénoncent des peines encore trop légères lorsqu’il s’agit de harcèlement sexuel.

Vidéo porno

Le 30 décembre 2021, des élèves de l’école de traduction Roi Fahd de Tanger contactent la presse pour parler de la plainte pour harcèlement sexuel qu’ils viennent de déposer contre un de leurs professeurs. Nous sommes au début de #MeTooUniv, quelques jours après la diffusion de messages à caractère sexuel envoyés par un professeur de l’ENCG Oujda à des étudiantes et l’indignation qui s’en est suivie.

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À Tanger, le professeur accusé aurait notamment fait visionner une vidéo pornographique à une étudiante en plein cours. “Il est allé s’asseoir à côté d’elle, au fond de la classe, et lui a demandé pourquoi elle ne répondait pas à ses avances. Elle a esquivé la question, mais c’est là qu’il a sorti son téléphone, a mis un site porno espagnol, et lui a montré une vidéo en lui disant ‘je veux que tu me fasses ces positions’”, racontait à TelQuel un étudiant témoin de la scène.

La jeune femme filme la scène et sort du cours, poursuivie par le professeur qui la supplie, devant témoin, d’effacer l’enregistrement. “Il l’a même entraînée dans une salle vide, d’où elle s’est échappée parce qu’elle avait peur de rester seule avec lui”, continue le témoin. Deux jours plus tard, l’étudiante décide de réunir toutes les preuves et va déposer une plainte auprès du procureur du roi, appuyée par onze témoins des différentes scènes de harcèlement.

Les affaires se multipliant, le ministère de l’Enseignement supérieur est interpellé par les militantes, mais également par des élus, à l’instar de la députée PAM Najwa Koukouss. Le ministre Abdellatif Miraoui annonce une politique de “tolérance zéro” concernant le harcèlement sexuel. Des cellules d’écoute sont mises en place dans plusieurs universités, dont l’école supérieure de traduction de Tanger, et le professeur accusé est suspendu. Le 5 janvier, ce dernier est interpellé puis présenté dans la foulée, le lendemain, devant le procureur du roi près la cour d’appel de Tanger.

Peine insuffisante

Le 12 janvier, le tribunal de première instance de Tanger tranche : le professeur est condamné à un an de prison ferme. “Insuffisant”, “un an c’est ce que tu prends quand tu conduis sans permis”, peut-on lire sur le compte Instagram 7achak ou encore sur celui de Moroccan Outlaws 490, les deux collectifs à l’origine du mouvement #MeTooUniv. Tout comme l’avocate de la partie civile, les militantes dénoncent des peines souvent trop faibles au vu du traumatisme subi par les victimes.

Militantes qui réclament une justice plus juste envers les femmes victimes de harcèlement voire d’agression sexuelle, comme l’expliquait à TelQuel Sonia Terrab, membre fondatrice de Moroccan Outlaws (collectif Hors-la-loi) : “Plus on est une caisse de résonance par rapport à tous ces crimes liés à la sexualité, plus ça nous permet aussi de demander une justice plus saine, plus équitable, une justice qui soit en faveur des femmes et pas contre elles, qui les protège au lieu de les condamner”. Le collectif a d’ailleurs mis en place, fin janvier, sa propre cellule d’écoute et d’accompagnement pour les victimes.