Driss Jettou prône l'union des pôles de l'audiovisuel public

La Cour des comptes souligne la nécessité de rassembler et de rapprocher les composantes du secteur audiovisuel public dans un pôle unifié. C’est ce qu’a indiqué, ce 28 janvier à Rabat, le premier président de la Cour des comptes, Driss Jettou.

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Le président de la Cour des comptes, Driss Jettou. Crédit: Rachid Tniouni / TelQuel

Une telle initiative a trop tardé. Treize ans après le lancement des premières étapes de la réforme, ce pôle audiovisuel public n’a pas encore été institué”, a relevé le président de la Cour des comptes Driss Jettou, dans un exposé sur les activités des juridictions financières, en 2018, lors d’une séance commune des deux Chambres du Parlement.

Un pôle qui pourrait induire une nouvelle dynamique dans le secteur, à travers la modernisation et l’équipement des structures, et engendrer la complémentarité et la synergie dans leurs activités, surtout dans le climat de forte concurrence des chaînes satellitaires étrangères, a estimé le président de la Cour des comptes.

Manque de synergies

En ce sens, le premier président a rappelé que “le Conseil supérieur de la communication audiovisuelle avait émis un avis en 2006 appuyant la nécessité de rassembler et rapprocher les composantes du secteur audiovisuel public dans un pôle public unifié, diversifié et complémentaire, tout en bénéficiant des réalisations des deux sociétés actuelles”.

Driss Jettou, 74 ans, a notamment indiqué que “la Cour observe que ces deux sociétés publiques, malgré leur situation financière difficile et le fait qu’elles disposent du même président directeur général, ne forment pas un pôle unique leur permettant de travailler dans un environnement meilleur en ce qui concerne la coordination et la complémentarité des activités, ainsi que l’économie dans la gestion des ressources”.

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À cet égard, l’ancien chef du gouvernement, de 2002 à 2007, note que le paysage audiovisuel bénéficie d’un grand intérêt de la part des différents milieux de l’opinion publique, de même qu’il connaît des défis hautement importants. La raison ? Les attentes du citoyen en faveur d’un service public de qualité et en amélioration continue. Ces défis concernent également le contexte de la concurrence aiguë que vivent les deux sociétés, du fait de l’expansion accrue des activités des grandes chaînes satellitaires étrangères et de la multiplicité des médias modernes de communication.

Le président de la Cour des comptes a aussi mis l’accent sur la situation financière délicate des deux sociétés publiques, précisant que “le résultat net de la SNRT s’est dégradé de façon considérable en 2012, année au cours de laquelle le déficit enregistré avait atteint 146,35 millions de dirhams”. Et de poursuivre : “Bien qu’elle ait connu une légère amélioration au cours des années suivantes, la SNRT affronte de nombreuses contraintes pour stabiliser sa situation financière.

Quant à SOREAD-2M, Driss Jettou a indiqué qu’elle connaît une détérioration encore plus grave, car elle enregistre depuis 2008 des résultats négatifs, notant que “la société a subi une perte annuelle moyenne de 100 millions de dirhams durant la période 2008-2018, ce qui l’empêche de procéder aux investissements indispensables pour moderniser ses diverses structures”.

Le modèle économique de SOREAD-2M, une entrave à un compromis ?

Concernant les ressources financières, la SNRT compte essentiellement sur les subventions de l’État. Celles-ci ont atteint en 2018 un montant de 931 millions de dirhams, alors que les ressources propres de la société (provenant surtout de la vente des espaces publicitaires) restent modestes, puisqu’elles n’ont guère dépassé les 13 % de son financement depuis 2013, a fait savoir Driss Jettou.

En revanche, il confirme que pour son financement, SOREAD-2M s’appuie de façon substantielle sur les produits de la publicité, les subventions de l’État ne dépassant pas en moyenne, depuis 2013, les 50 millions de dirhams par an, soit 7 % des ressources de la société.

La Cour considère que le modèle économique appliqué par SOREAD-2M rend difficile la possibilité d’un compromis entre la profitabilité financière et les engagements en matière de service public, sachant que les cahiers des charges exigent des obligations relatives à la diffusion de la publicité.

Partant de son évaluation de la gestion des deux sociétés, la Cour des comptes constate “le non-renouvellement des contrats-programmes entre l’État et ces deux organismes publics depuis 2012, ce qui va à l’encontre du rôle stratégique attendu du secteur audiovisuel public et le met en situation de contradiction avec les dispositions de la loi 77.03 relative à la communication audiovisuelle qui prévoient que les dotations budgétaires de l’État aux deux sociétés soient accordées sur la base de contrats-programmes”.

(avec MAP)