Les faits se sont déroulés à la mi-août, sur l’autoroute à proximité de Kénitra. Deux migrants de nationalité malienne sont décédés pendant leur déplacement forcé, organisé par les autorités marocaines, de Tanger vers le sud du pays.
« C’est arrivé près d’une semaine avant Aïd el kébir. Selon nos informations, deux personnes ont essayé de sauter du bus qui les transportait. Une des deux est morte sur place. Il s’agit d’un jeune Malien de 16 ans, identifié comme Moumine Traoré », nous indique Aziz Ghali, membre du bureau central de l’Association marocaine de droits de l’homme (AMDH) et de la section de Kénitra.
Le deuxième migrant décédé n’a toutefois pas encore pu être identifié. Selon l’AMDH, après l’incident, il a été transféré au service de réanimation de l’hôpital El Idrissi de Kénitra où il est resté 48 heures avant de perdre la vie. « A ce jour, nous n’avons pas encore d’informations le concernant. Son corps est toujours à la morgue de Kénitra », explique Aziz Ghali.
Les causes exactes de leur décès sont également inconnues. Selon l’association, l’incident a eu lieu à l’issue d’une « révolte des migrants » qui aurait éclaté dans le bus.
Une autopsie réalisée
Selon Aziz Ghali, une autopsie a été réalisée sur Moumine Traoré après une requête formulée par l’AMDH et avec l’autorisation de son frère. « Mais les autorités refusent de nous communiquer les résultats qui pourraient nous donner plus d’éléments sur les circonstances de leur mort », déclare-t-il.
« La gendarmerie de Kénitra nous a confirmé que l’autopsie a été faite. Les résultats sont chez le procureur général. Sa famille n’a pas été non plus informée des résultats », nous indique de son côté Saïd Tbel, membre également de l’AMDH qui suit de près le dossier. Interrogées par l’AFP à propos de ces décès, les autorités locales ont évoqué quant à elles un « accident » et ont indiqué qu’une enquête avait été ouverte pour en déterminer les causes.
Selon une source gouvernementale marocaine, également jointe par l’AFP, la dernière opération de déplacement forcé a débuté fin août, après le franchissement en force, le 22 août, d’une centaine de migrants de la clôture séparant le Maroc de Sebta. Le lendemain, ces migrants ont tous été renvoyés au Maroc.
Leur renvoi a été jugé illégal par plusieurs associations, dont Caminando Fronteras. Pour l’ONG, cette opération constitue « une énorme violation des droits humains ». Helena Maleno Garzon, membre de l’association, a également dénoncé la mort des deux migrants maliens.
Ayer a este lado de la frontera enterramos a #Moumine, el chico de 16 años muerto durante las redadas. Entre la violencia hay lugar espacios de Dignidad y Memoria.
Valiente, quedaste en el camino. #DEP pic.twitter.com/elv0bknTHi
— Helena Maleno Garzón (@HelenaMaleno) September 3, 2018
Bras de fer
Dans un manifeste, publié le 24 août, 48 associations espagnoles dénonçaient ces renvois des migrants originaires d’Afrique subsaharienne vers le Maroc. Elles réclament aussi un changement de la politique migratoire maroco-espagnole, qui « compromet la dignité morale de notre société et les principes humanistes sur lesquels elle doit s’établir ».
De leur côté, les autorités marocaines avaient qualifié l’assaut des 118 migrants à Sebta de « particulièrement agressif ». Selon elles, les migrants ont eu recours à des jets d’acides et d’excréments sur les forces de l’ordre pour forcer le passage vers l’enclave espagnole. La semaine dernière, les autorités marocaines ont ainsi annoncé avoir lancé une opération de déplacement de migrants vers le sud du pays pour « lutter contre les réseaux mafieux ».
Ces derniers jours, des centaines de policiers, appuyés par des forces spéciales et trois hélicoptères, ont effectué plusieurs interventions à Tanger dans les quartiers populaires de Boukhalef et de Mesnanatan. Ces interventions auraient fait plusieurs blessés, selon plusieurs témoignages de migrants et de riverains recueillis sur place par l’AFP .
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