Tard dans la nuit du samedi 17 mars, les comités des quartiers de Jerada se sont réunis au niveau de cinq points de ralliement pour discuter de la démarche à suivre. Des rassemblements qui interviennent notamment après la décision des autorités d’interdire toute manifestation non autorisée et les altercations violentes avec les forces de l’ordre, survenues le mercredi 14 mars.
«Les coordinations des quartiers ont décidé d’organiser dimanche des marches à partir des cinq points de ralliement», ont déclaré les porte-parole du Hirak de Jerada. Ils ajoutent que ladite marche «fera le tour des quartiers résidentiels, sans atteindre le centre-ville».
Après de longs débats et interventions de certains habitants, les coordinateurs ont défendu cette décision comme étant «celle qui permet de ne pas passer outre les consignes de la préfecture qui a interdit toute forme de manifestation sur les places publiques».
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En effet, une marche a déjà été tenue vendredi sans l’intervention des forces de l’ordre dont la présence à Jerada s’est considérablement accrue depuis les heurts de mercredi dernier.
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Une partie de la marche organisée vendredi 16 mars à Jerada, non loin du quartier périphérique F1.
DR: TelQuel.ma
Nouveau comité, et nouvelle revendication
Les propositions du gouvernement reléguées aux oubliettes, la déclaration commune des jeunes du Hirak de Jerada précise que les cinq marches annoncées ce dimanche seront suivies de réunions pour constituer un «comité des détenus».
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Selon Abdelhak Kerboub, l’un des coordinateurs du point de ralliement Al Manar, «ce comité comprendra six représentants issus des cinq points de rassemblement. Ils vont assister, dès lundi, au procès de [nos] détenus à Oujda».
Faisant partie des mineurs qui ont observé un sit-in dans les galeries souterraines de charbon entre mercredi et jeudi derniers, le jeune homme nous déclare que le même comité «mettra en place un procédé d’identification et de détermination du nombre exact des détenus afin de suivre les étapes de leur jugement».
Désormais dans leurs slogans, les membres du Hirak de Jerada incluent un quatrième axe dans leur cahier revendicatif. En l’occurrence, la «libération des détenus de la cause».
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Black-out autour du nombre des interpellés
A l’heure où nous mettons en ligne, aucune source officielle n’a rendu public le nombre de personnes interpellées. Suite aux affrontements violents enregistrés durant la journée du mercredi 14 mars, la préfecture Jerada avait annoncé le soir même 9 interpellations.
D’après de nombreux activistes et observateurs rencontrés sur place, ce chiffre a été revu à la hausse. «Plusieurs interpellations ont eu lieu jeudi vendredi. Mais il reste difficile d’estimer le nombre exact qui varie entre 20 et 30 personnes, voire plus», nous explique Abdelkader Aguili, représentant local du Centre marocain des droits de l’Homme (CMDH).
Parmi les interpellés on trouve Reda Achour, connu pour avoir relayé des images et vidéos des manifestations à Jerada depuis le déclenchement du Hirak le 23 décembre 2017, soit au lendemain de la mort de deux mineurs dans un puits clandestin de charbon.
Malgré nos relances auprès des autorités, aucune information n’a pu être donnée par rapport au nombre exact des personnes interpellées. Journaliste du site Jerada24, Mohamed Mrimi suppose la présence de femmes parmi celles-ci. «Nous aurons certainement plus de détails lors de l’ouverture du procès», explique-t-il.
Des blessés non déclarés, et un cas «grave» au CHU d’Oujda
Dans leur déclaration finale du samedi, les coordinations de quartiers ont également évoqué le cas des manifestants «victimes des affrontements avec les forces de l’ordre» et «dont il faut préciser les circonstances». Idem pour les interpellés, le nombre de ces blessés demeure inconnu.
«Aucun d’entre eux n’a souhaité se présenter à l’hôpital provincial de Jerada pour se soigner, par peur d’être arrêté», nous indique Lakhdar Mahyaoui, représentant local d’Amnesty Maroc. D’après lui, «des infirmières se sont déplacées de leur propre chef aux domiciles de certains d’entre eux pour leur prodiguer soins et médicaments».
Parmi les cas déclarés «graves» par les coordinations du Hirak, celui de Abdelmoula Zaâiqer, 15 ans. A son chevet au CHU d’Oujda, sa mère Najat Mahjoubi déclare que son fils «a été fauché par une estafette des Forces auxiliaires», ajoutant qu’«aucun responsable ne s’est présenté à elle (…) Si ce n’est le médecin qui l’autorise à rentrer le voir (son fils, NDLR) durant de brefs instants».
Mère célibataire de 37 ans, Najat Mahjoubi nous rapporte que les services du CHU d’Oujda lui ont expliqué que «dans le meilleurs des cas, il (son fils, NDLR) ne pourra plus faire usage de ses jambes».
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