Concrétisant les promesses de campagne du milliardaire républicain et un décret du 25 janvier, le département de la Sécurité intérieure a autorisé mardi les agents d’immigration et de douane à interpeller la plupart des personnes en situation irrégulière qu’ils rencontreraient dans l’exercice de leurs fonctions, ne faisant une exception explicite que pour les sans-papiers arrivés enfants sur le territoire, surnommés les « Dreamers ».
La nouvelle a intensifié les craintes des immigrés sans papiers. Des cas récents d’arrestations en pleine rue ont semé le trouble parmi ceux qui s’estimaient jusqu’à présent à l’abri d’une expulsion. « Ce dramatique changement de politique est une preuve évidente de l’intérêt de l’administration Trump à déchirer des familles et à répandre la peur parmi les communautés d’immigrants« , a pointé le maire de New York Bill de Blasio. « Le président a choisi les politiques de la division plutôt que la sécurité de notre pays« , a-t-il ajouté, prévenant que les policiers new-yorkais « ne se transformeront pas en agents d’immigration« .
L’opposition démocrate au Congrès et les associations de défense des sans-papiers ont dénoncé une politique « d’expulsions de masse« , un terme contesté par l’exécutif. Ils affirment que des immigrés cesseront d’aller à l’école ou au travail par peur d’une arrestation. « Les tribunaux et le public ne laisseront pas ce rêve anti-américain devenir réalité« , a prévenu Omar Jadwat, de l’ONG de défense des droits civiques ACLU.
Près de Washington, des agents des services d’immigration ICE ont arrêté ces dernières semaines des personnes en situation irrégulière sur le parking d’un supermarché, ou encore près d’un refuge contre le froid géré par une église. A Denver, une femme s’est réfugiée à l’intérieur d’une église pour échapper à un ordre d’expulsion. Le 21 février, un Mexicain s’est suicidé quelques minutes seulement après avoir été expulsé des Etats-Unis, se jetant du haut d’un pont à Tijuana, tout près de la frontière. Il est impossible aux autorités d’expulser immédiatement les plus de 11 millions de sans-papiers. En pratique, les fonctionnaires auront toujours comme consigne de cibler en priorité les délinquants et les criminels.
Mais alors que Barack Obama avait prescrit d’arrêter en priorité les personnes venant de traverser la frontière ou condamnées pour des crimes ou délits graves, il sera désormais laissé à la libre appréciation des fonctionnaires l’évaluation du danger posé par un étranger à l’ordre public ou à la sécurité nationale. Les personnes poursuivies pour des délits mais pas condamnées, ou ayant obtenu des aides publiques frauduleusement, sont spécialement ciblées. La procédure d’expulsion accélérée, sans passer par la justice, sera élargie à ceux arrivés depuis moins de deux ans (contre deux semaines auparavant). Les effectifs des douanes et de la lutte contre l’immigration clandestine seront accrus. « La priorité, ce sont ceux qui représentent une menace pour ce pays« , a ajouté Sean Spicer, porte-parole de la Maison Blanche, estimant à un million le nombre de gens ayant déjà reçu d’un juge la notification d’une obligation de quitter le territoire.
Mais Donald Trump a, pour l’instant, décidé de ne pas s’en prendre aux sans-papiers arrivés jeunes aux Etats-Unis, et qui ont obtenu un permis temporaire grâce au programme Daca, créé en 2012 par Barack Obama.A ce jour, environ 750.000 personnes en bénéficient. Le sort de ces « Dreamers » divise depuis des années les républicains, entre ceux qui reconnaissent la légitimité de leurs demandes de régularisations, et les conservateurs partisans d’une ligne dure, inquiets d’un appel d’air potentiel.
Donald Trump lui-même a exprimé sa compassion à l’égard de ces jeunes gens, qui peuvent aujourd’hui travailler légalement sans craindre d’être expulsés. « Nous traiterons Daca avec coeur« , a-t-il déclaré lors d’une conférence de presse jeudi dernier. Une rencontre est prévue jeudi entre le secrétaire d’Etat américain Rex Tillerson et le secrétaire à la Sécurité intérieure John Kelly et le président mexicain Enrique Peña Nieto. Ils devraient discuter notamment de la sécurité à la frontière et de la coopération policière.
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