Après avoir joué aux arlésiennes depuis des années, le projet de loi organique sur la grève 97-15 a finalement été adopté le 28 juillet en conseil de gouvernement et semble enfin sur les rails. Présenté par le ministre de l’Emploi et des affaires sociales, il faisait partie des projets de loi qui devaient obligatoirement être soumis au Parlement avant la fin de cette législature. La validation devant le conseil présidé par Benkirane ne signifie pas pour autant la fin du parcours avant son entrée en vigueur. Une commission ministérielle devra se pencher sur la loi et y « inclure des remarques avant de la présenter au conseil des ministres », souligne le communiqué du conseil de gouvernement.
Le projet de loi est une application de l’article 29 de la constitution qui dispose que « le droit de grève est garanti. Une loi organique fixe les conditions et les modalités de son exercice ». Dans son article 5, la loi organique relative à la grève énonce que « tout appel à la grève en dehors des disposition de cette loi organique est illégal » et que « sont interdites toutes les grèves qui ont des visées politiques ».
L’article 7 explique qu’on ne peut avoir recours à la grève qu’après avoir eu des négociations sur le cahier revendicatif durant une période 30 jours suivant la réception par l’employeur de ce cahier revendicatif. La loi interdit par l’article 8 également tout contrat qui oblige le salarié à renoncer à son droit de grève. Une exception est toutefois prévue dans une période déterminée dans le cas d’une convention collective à condition qu’il y ait des dispositions qui prévoient le règlement des différends collectifs.
Concernant la protection des salariés dans le cas de l’exercice du droit de grève, la loi prévoit dans son article 10 que l’employeur a l’interdiction d’embaucher, pendant la période de la grève, des salariés remplaçant les grévistes pendant la période du débrayage. À moins que les salariés ne refusent de faire le service minimum dans certains secteurs fixés par l’article 34, comme les institutions sanitaires, les tribunaux, les services météorologiques, les chemins de fer ou l’assainissement. La future loi prévoit également dans son article 11 l’interdiction de toute mesure discriminatoire qui peut avoir un impact sur la situation administrative et professionnelle des salariés grévistes.
La ponction de salaire formalisée
Il existe des corps de métier qui sont interdits d’exercer ce droit. L’article 33 énumère plusieurs secteurs et professions, notamment les juges, les membres des FAR et de la gendarmerie, les fonctionnaires de la sûreté nationale, les fonctionnaires de l’administration pénitentiaire, les fonctionnaires de la protection civile ainsi que les personnes qui doivent assurer le service minimum. D’un autre côté, elle prévoit une protection envers les salariés qui refusent d’observer la grève en garantissant la liberté de travail pendant la période de la grève. La ponction de salaire, objet de polémique depuis son application par le gouvernement Benkirane, sera désormais encadrée par un texte. L’article 14 précise que la grève est une « suspension temporaire du travail » durant laquelle les participants à la grève ne peuvent « bénéficier de leur salaire ».
La décision d’organiser une grève relève des prérogatives de l’assemblée général des salariés qui soit obtenir un quorum des trois quart et ce quinze jours avant l’organisation du débrayage. Pour être effective, la décision doit être votée par la majorité absolue des salariés. Une fois la décision prise, l’employeur doit être mis en courant au moins sept jours avant l’organisation du débrayage. Dans le cas d’une grève nationale, le syndicat qui appelle à la grève doit prévenir le chef du gouvernement, le ministère de l’Intérieur, le ministère de l’Emploi et les organisations professionnelles des employeurs sept jours avant le grève. La même période est prévue également pour le cas d’une grève sectorielle pour prévenir l’autorité gouvernementale qui a la tutelle du secteur qui prévoit la grève. Dans le cas d’une grève dans une institution ou une entreprise, le syndicat doit prévenir l’employeur, le wali de la région, le gouverneur de la préfecture et de la province.
S’agissant du volet sanction, il est à noter l’absence de peines privatives de liberté au profit des amendes. Ces dernières varient entre 20 000 dirhams et 50 000 dirhams pour les employeurs qui entraveraient l’exercice du droit de grève selon les dispositions prévues par la loi, et entre 2 000 dirhams et 10 000 dirhams pour les salariés qui ne respectent pas les conditions d’organisation de la grève ainsi que d’autres dispositions prévues.
Cette loi rentrera en vigueur six mois après sa publication dans le Bulletin officiel.
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