«Aujourd’hui, je lance un message d’alerte. Et j’espère que le gouvernement est conscient de la gravité de la situation actuelle de l’économie marocaine et qu’il n’attend pas mes annonces. Il faut que l’on sorte du stand-by », avait déclaré Ahmed Lahlimi, mercredi 27 janvier lors de la présentation de l’évolution de l’économie nationale en 2015 et ses perspectives pour 2016. Pour le Haut-Commissaire au Plan, si cette année s’annonce, déjà, mauvaise à cause notamment du déficit de la pluviométrique et son impact sur le secteur agricole, 2017 risque d’être pire. « Il faut avoir revoir nos politiques macroéconomiques », annonce Lahlimi.
Une croissance famélique à 1,3% en 2016
«Nous prévoyons un taux de croissance de 1,3% pour cette année. Et pour cause, la valeur ajoutée agricole accusera une baisse de 10,2%. Aussi la production agricole devrait se replier de 40 à 30% », précise le Haut-Commissaire au Plan. En 2015, la valeur ajoutée agricole s’est accrue de 15%. Une croissance au-dessus de la moyenne. Il faut noter par ailleurs que le taux de 1,3% risque d’être revu à la baisse en juin prochain si le déficit de la pluviométrie persiste. «Ces conditions, tel qu’en augure le début de 2016, sont par ailleurs porteuses d’un contexte social où la problématique de la pauvreté et des inégalités sociales et territoriales devrait se poser avec une nouvelle acuité », souligne Lahlimi.
La faute à El Nino
Pour le Haut-commissaire au plan, cette année est comparable aux années de sécheresse qu’a connues la Maroc en 1995 et 2007. D’après le patron du Haut-Comissariat au Plan (HCP), la cause principale de la sécheresse aussi bien pour 2016 que pour 1995 et 2007 est le phénomène d’El Nino. Il s’agit d’un courant chaud équatorial du Pacifique qui est généralement suivi de près par une série de phénomènes climatiques extrêmes tels que la sécheresse et l’augmentation de la température. Lors des deux années 1995 et 2007, la valeur ajoutée agricole avait connu une baisse de 41% et 20,8% respectivement.
Le recul de la valeur non agricole inquiète
Mais ce qui inquiète Lahlimi ne se résume pas seulement à la chute de la valeur ajoutée agricole, mais se rapporte plus au repli de l’évolution du secteur non agricole. Le HCP avait d’ailleurs récemment publié un rapport faisant état d’une augmentation de l’investissement au cours des cinq dernières années. Une augmentation qui ne s’est pas traduite par l’amélioration du rendement. Pour le patron du HCP, c’est la politique de l’État qui est à blâmer dans ce dossier.
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Nos prévisions sont les meilleures !
Avant de commencer sa présentation relative à la conjoncture économique en 2016, Lahlimi a tenu à rappeler que parmi toutes les institutions nationales (CMC, Bank Al-Maghrib, gouvernement) et internationales (FMI, Banque mondiale), c’est le HCP qui émet les prévisions qui se rapproche le plus aux réalisations. « Nos prévisions émises en janvier affichent un écart avec les réalisations de seulement 0,3% vers la fin de l’année en, contrairement au gouvernement et à Bank Al-Maghrib dont l’écart ressort généralement à 0,8% », avait-il précisé.
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Curieux repli des crédits…
Lahlimi pointe également du doigt la nette baisse du rythme de croissance des crédits. Pour lui, il s’agit d’un phénomène curieux. «Alors que les liquidités ont augmenté suite à l’amélioration des réserves de changes et que les taux d’intérêt marquent une baisse, les prêts bancaires affichent un ralentissement soutenu », avait-il laissé entendre. Pour le patron du HCP, il faut aller vers une cohésion des politiques monétaire, économique et budgétaire. «Une baisse du niveau du financement n’est pas normale », a-t-il souligné.
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Il faut arrêter avec l’inflation!
L’inflation a pendant très longtemps été la bête noire de la Banque centrale. C’est d’ailleurs la pièce maitresse de la politique monétaire menée par Abdellatif Jouahri, le Wali de Bank Al-Maghrib. Lors de sa présentation, Lahlimi s’est montré virulent vis-à-vis de cette politique. «Ce n’est pas normal pour un pays comme le nôtre d’avoir un taux d’inflation maitrisé à 1,3% ou 1,5%, tout le temps. Un tel taux est enregistré chez les économies très développées et dont la maturité économique est à son paroxysme. Ce n’est pas notre cas », regrette Lahlimi. Pour lui, il faut aller vers une dynamisation de notre développement, même si cela devait se traduire par une hausse de l’inflation.
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