Chantage royal : Mediapart livre les dessous du dossier d'instruction

Le site indépendant Médiapart a pris connaissance du dossier d'instruction dans l’affaire du chantage royal. Certains éléments qui en ressortent rendraient l'affaire encore plus compliquée.

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Le site d’informations indépendant français Mediapart, révèle les dessous du dossier d’instruction dans l’affaire dite du « chantage royal », concernant les journalistes Eric Laurent et Catherine Graciet.

Mediapart évoque une piste selon laquelle les enregistrements audios, révélés par le Journal du dimanche, dès le dimanche 30 août ne seraient pas fiables à 100%, en reprenant notamment le témoignage, sans le citer,  d’un commandant de la Brigade de répression de la délinquance contre la personne (BRDP), chargé de décrypter les enregistrements « Le premier ficher, peu audible, a pu faire l’objet de modifications. », affirme-t-il, sur le ton de l’hypothèse sans toutefois trancher.   Un ingénieur du laboratoire central de l’Institut national de la police scientifique (INPS) dit lui qu’il «a pu avoir été modifié avec des moyens techniques élaborés» toujours sur le ton de la suspicion et sans être catégorique.

Mediapart oublie toutefois de préciser que le Maroc confirme que les enregistrements sont là, et qu’il y en a trois, dont deux réalisés sous la supervision de la police française. Pour le Palais, c’est bien Laurent qui parlera en premier d’argent et qui exigera une somme de trois millions d’euros en échange desquels il s’engage, avec sa consœur à renoncer à la rédaction de son livre. Comme le concluait Le Monde, «la phrase-clé  (celle qui détermine qui des deux protagonistes évoque l’argent en premier) fait sans doute partie de celles que les transcriptions signalent comme « inaudibles », mais devrait refaire surface après le travail de la police scientifique sur les enregistrements.»

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Sur la teneur des propos échangés, Mediapart ne relève rien d’inédit. Lors du troisième rendez-vous, Catherine Graciet, présente pour la première fois est assez directe : « Déjà, je vais vous dire, je suis d’accord avec les modalités qu’Éric a énoncées. Y a pas de souci avec ça, nous sommes sur la même longueur d’onde », annoncera-t-elle rapidement. Parmi ses sources, la journaliste évoque des éléments reçus de la DGSE (le service d’espionnage français), des écoutes téléphoniques et des informations sensibles sur des personnalités marocaines. La thèse selon laquelle la DGSE aurait fourni des documents aux journalistes a néanmoins été démentie par les services en questions. Mediapart ne le signale pas dans son article.

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Elle fait aussi état d’une affaire de « proxénétisme » et de la découverte de « 50 kilos de cocaïne » dans une valise diplomatique marocaine, qui aurait eu lieu en 2010 à Orly, des scandales qui auraient été étouffés par la France, selon les assertions de la journaliste. Il est ensuite question de « querelles d‘héritage ». La crédibilité de ces informations semblait remise en question par la partie marocaine, dont l’avocat s’est montré suspicieux lors des entrevues, selon d’autres extraits, rapportés notamment par Le Monde.

En garde à vue, des accusations graves envers le royaume

Ayant obtenu le dossier d’instruction, Mediapart révèle les propos des deux auteurs, une fois en garde à vue, pour tenter de se défendre. « Ces faits n’ont strictement rien à voir avec la vérité, il s’agit d’une construction destinée à discréditer Mme Graciet et moi-même », déclare Éric Laurent. Et de rajouter : «  À aucun moment il ne s’est agi d’une tentative de chantage ni d’extorsion de fonds, mais au contraire d’une proposition avancée par l’autre partie pour faire en sorte que sur ce sujet brûlant il n’y ait pas de publication ». Le Maroc avait toutefois répondu à ces accusations : « Et les 40 000 euros qu’ils ont chacun empochés ? Ils comptaient nous les renvoyer par la poste ? », attestait ainsi Le Monde, reprenant le témoignage d’une source proche du Palais.

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Mais quelques heures plus tard, le journaliste avouera finalement avoir « suggéré à Naciri dès le premier rendez-vous une somme en contrepartie de la non-parution du livre dont le contenu nous inquiétait Catherine et moi ». « Il m’a semblé que ce livre était très sensible et qu’au fond il serait préjudiciable à la stabilité du Maroc ». C’est à ce moment-là que Laurent justifiera tant bien que mal la somme demandée, en mettant en avant la maladie de sa femme et sa fatigue professionnelle.

Dans le même temps, Catherine Graciet livrera un récit assez proche de celui de Laurent, dans lequel elle brandit aussi le «coup monté»Plus loin, elle affirme même : « je ne voyais pas le mal, et je respectais la déontologie journalistique de la protection des sources» (sic). 

 

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